1.1.1.3. 1960- 1970 Le courant de la contingence et de la planification : adapter la structure

A partir des années 60, et plus particulièrement aux Etats-Unis, l'organisation est considérée comme un système ouvert sur l'environnement, donc soumis aux aléas et aux incertitudes liés à cet environnement. Il n'y a donc plus d'organisation idéale. Ce système ouvert s'inscrit toutefois dans une approche rationnelle de l'organisation.

Cette dernière est composée d'individus rationnels qui prennent des décisions. Les individus, ou décideurs, ne possèdent cependant pas tous les éléments d'information qui feraient de cette prise de décision un acte entièrement rationnel. Ils opèrent des choix en fonction de leur perception , de leur position, de leur programme d'action. Dans un ensemble complexe, ils réduisent l'incertitude en simplifiant les données du problème à résoudre. C'est en ce sens que la rationalité de la décision est limitée.

Il s'agit pour les managers d'adapter la structure aux contraintes de l'environnement. La survie et le développement des organisations dépendent de forces exogènes qu'il convient de repérer avec soin.

P. LAWRENCE et J. LORSCH38 observèrent que les entreprises, leaders des secteurs stables, conservaient une forme d'organisation simple et fonctionnelle. En revanche, les leaders de secteurs à évolution rapide adoptaient des structures plus décentralisées. L'efficacité de toute entreprise dépend ainsi de la congruence des structures et des procédures avec les contraintes de l'environnement.

La bonne organisation est celle qui sait s'adapter à son environnement. Le processus d'adaptation en est le centre. Les comportements entre les personnes sont marqués par les rapports à l'extérieur, et font l'objet d'ajustements constants. Selon les cas, l'allié devient opposant ou conflictuel, puis de nouveau coopérant... Les rapports interindividuels ne sont pas de l'ordre de la psychologie. Les enjeux des relations règnent autour des incertitudes, ce qui s'oppose au formel.

L'adaptation de la structure à son environnement constitue la pièce maîtresse de la « théorie de la contingence » initiée par LAWRENCE et LORSCH.

La structure, dépendante de l'environnement, conditionne la performance. On distinguera quatre principaux facteurs de contingence :

Les mécanismes de coordination constituent un ensemble de solutions structurelles qui seront mobilisées en fonction du caractère spécifique des problèmes de coordination rencontrés. Le choix de ces mécanismes se fait en prenant en compte les facteurs de contingence pré-cités.

Il est intéressant de voir qu'à cette période, les relations de coordination influent sur le paramétrage des postes de travail. L'organisation doit spécifier à ses membres la nature de leur travail, de leurs tâches, de leurs fonctions. Cette spécification sera plus ou moins précise selon le degré de spécialisation des postes.

La spécialisation découle directement de la nature et du degré de la division du travail. Elle prend deux formes distinctes.

La spécialisation horizontale résulte de la fragmentation d'opérations complexes en série d'opérations élémentaires. La fabrication d'automobiles est toujours conçue comme telle (l'assemblage des portes, le montage des sièges, se font sur des postes de travail différents).

La spécialisation verticale résulte, quant à elle, de la séparation entre la conception des tâches et leur réalisation. C'est, comme nous l'avons vu et comme chacun sait, celle prônée par TAYLOR. L'exécution des tâches n'appelle dans ce cas aucune initiative de la part de l'exécutant. La spécialisation verticale définit le degré de contrôle de l'opérateur sur la manière d'effectuer son travail.

A l'intérieur d'une organisation, la spécialisation dans ses deux dimensions, varie fortement d'une partie de l'organisation à l'autre, et diminue en fonction du niveau hiérarchique. Il ne faut toutefois pas confondre degré de spécialisation et présence de spécialistes, qui peuvent travailler sur des postes très largement définis au sein d'équipes pluridisciplinaires et sur des missions multiples ou changeantes.

La formalisation vient expliciter le contenu du travail, qu'il soit spécialisé ou non (description de postes, règlements, manuels de procédures). Elle est très nettement liée à la taille de l'organisation. Plus cette dernière est grande, moins la mémoire des hommes suffit !

La formation internalise les exigences de l'organisation, en agissant sur les comportements à acquérir, et confère plus d'autonomie à la personne devenue plus compétente. Une formation et une formalisation poussées, sous-tendues par des règles précises, peuvent encourager la polyvalence des opérateurs, en principe du moins, et augmenter leur capacité d'action, et ce, en fonction des contraintes environnementales.

La mise en application de la théorie de la contingence présente cependant le risque d'hypertrophier l'incidence de l'environnement et de le promouvoir en déterminisme absolu.

Notes
38.

LAWRENCE (PR), LORSCH (JW) : " Adapter les structures de l'entreprise ". Paris, Ed. D'Organisation, 1973