2.1.1. La planification sanitaire (1991) 50

La loi du 31 juillet 199151 et ses décrets d'application abrogent la précédente. Son objectif est d'encadrer l'accélération du changement par la mise en place, notamment, d'une carte sanitaire et d'un schéma d'organisation sanitaire. L'apparition de nouvelles instances en découle naturellement. Cette planification a pour objet " de prévoir et de susciter les évolutions nécessaires de l'offre de soins, en vue de satisfaire de manière optimale la demande de santé ". Sont ainsi mis en corrélation les besoins de la population, les données démographiques, les progrès des techniques médicales et l'offre de soins existante.

La carte sanitaire 52 détermine d’une part les limites des régions et des secteurs sanitaires et psychiatriques, d’autre part la nature et l'importance des installations et des activités de soin d'un coût élevé ou nécessitant des dispositions particulières dans l'intérêt de la santé publique, en fonction des besoins de la population.

Elle fixe six disciplines (médecine, chirurgie, obstétrique, psychiatrie, soins de suite ou de réadaptation, soins de longue durée) relatives aux activités de soins. Douze de ces dernières sont classées comme étant d'un coût élevé .53

Pour exercer ces diverses activités, la loi distingue les matériels lourds à but diagnostic et thérapeutique, et précise leurs conditions d'installation afin d'éviter l'excès d'actes médicaux susceptibles de grever le budget de l'état.

Le schéma régional d'organisation sanitaire (SROS) 54 détermine la répartition géographique des installations et activités de soins sus définies afin d'assurer une satisfaction optimale des besoins de la population. Il est établi pour chaque région sanitaire, pour tout ou partie des installations ou activités. 

Des schémas nationaux ou interrégionaux peuvent dans certains cas être établis également. La création, l'extension, la conversion totale ou partielle de tout établissement de santé sont soumises à l'autorisation du ministre chargé de la santé ou du représentant de l'Etat ; Il en est de même pour les installations et équipements en matériels lourds55.

De nouvelles instances consultatives voient le jour tels que :

Le comité national et les comités régionaux de l'organisation sanitaire et sociale (CNOSS et CROSS)56, le collège national d’experts et les commissions régionales d’évaluation .

Un rapport est élaboré chaque année par les services de l'Etat et les organismes d'assurance maladie sur le montant total des dépenses des régimes d'assurance maladie dans la région pour l'année écoulée, sur les évolutions constatées et sur les évolutions prévisibles pour l'année suivante. Il est présenté au comité régional de l'organisation sanitaire et sociale.

Par ailleurs, les établissements de santé publics ou privés, " doivent développer une politique d'évaluation des pratiques professionnelles, des modalités d'organisation des soins et de toute action concourant à une prise en charge globale du malade, afin notamment d'en garantir la qualité et l'efficience. L'évaluation des pratiques médicales doit respecter les règles déontologiques et l'indépendance professionnelle des praticiens dans l'exercice de leur art "57

Une analyse des activités est de ce fait indispensable, et nécessite la mise en oeuvre de moyens cohérents (systèmes d'informations, méthodologies, expérimentations...).

L'articulation avec la planification interne des établissements de santé 58 est mise en exergue

Des contrats pluriannuels conclus entre les établissements de santé, publics ou privés, les organismes d'assurance maladie, le représentant de l'état, et le cas échéant des collectivités locales, permettent la réalisation des objectifs retenus par le schéma d'organisation sanitaire. Ils fixent les obligations des établissements et prévoient les moyens nécessaires à la réalisation des objectifs poursuivis. Ils sont conclus par les préfets de région, après avis des préfets de département concernés.

Un rapport sur les objectifs et prévisions d'activité 59, ainsi que les moyens consentis, est présenté par le directeur au conseil d'administration qui délibère. Cette délibération et ce rapport sont transmis au représentant de l'état et aux organismes de sécurité sociale.

Le projet d'établissement 60 définit quant à lui, pour une durée de cinq ans, sur la base du projet médical, les objectifs généraux de l'établissement dans le domaine médical et des soins infirmiers, de la politique sociale, du plan de formation, de la gestion et du système d'information. Il doit être compatible avec les objectifs du schéma d'organisation sanitaire.

Des rapports d'activité et d'évaluation, formalisés tous les deux ans, doivent préciser l'état d'avancement du projet d'établissement et comporter une évaluation de la qualité des soins61, en fonction des grands objectifs du dispositif de soins, promouvant l’adéquation des ressources et des besoins en termes de soins, dans un souci de qualité optimale.

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Figure 10 : Les grands objectifs du dispositif de soins
[Note: Schéma extrait de la revue " Actualité et dossier en santé publique " N° 11, juin 1995, p. XVII]

Une obligation de communication d'informations 62 est instituée entre les établissements de santé, l'autorité administrative et les organismes d'assurance maladie. La révision de la carte sanitaire et du schéma d'organisation sanitaire dépend de la qualité et de la transparence de ces informations.

Une nouvelle organisation des structures de soins renforce les impératifs de communication, coordination, concertation.

‘« L'unité de base est l'unité fonctionnelle. Le département devient un regroupement d'au moins trois unités fonctionnelles. Le chef de service est nommé par le ministre, le chef de département est nommé par le conseil d'administration après avis de la commission médicale d'établissement.
Ces derniers assurent la conduite générale du service et organisent son fonctionnement technique. Ils sont assistés, selon les activités du service ou du département, par une sage-femme, un cadre paramédical ou médico-technique pour l'organisation, la gestion et l'évaluation des activités qui relèvent de leur compétence.
Dans chaque service ou département est institué un conseil de service ou de département chargé notamment de participer à l'élaboration du projet de service. Les infirmières sont représentées au sein d'un service de soins infirmiers dont la direction est confiée à l'infirmier général, dorénavant membre de l'équipe de direction. " 63

Cette loi du 31 juillet 1991 reste toutefois fidèle à l'esprit de celle de 1970. Elle comporte néanmoins des innovations importantes, notamment par le décloisonnement promu entre la médecine de ville et la médecine à l'hôpital, la médecine libérale et la médecine publique, la médecine lucrative et non lucrative.

L'établissement de Santé64 est le pivot du système. Le contrôle de l'offre de soins est renforcé et centralisé par le biais de la planification et des autorisations. La contractualisation est clairement affirmée, comme moteur de synchronisation et d'efficience.

Le processus de planification est un processus gestionnaire, un processus d'aide à la décision, également un processus de concertation sociale. Il se décompose en trois étapes clés, visant l’efficacité des actions mises en oeuvre.

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Figure 11 : Le processus de planification
[Note: Schéma extrait de la revue " Actualité et dossier en santé publique " op cit, p. III]

Notes
50.

ROCHAIX (M) : « Les questions hospitalières : de la fin de l’Ancien Régime à nos jours ». op cité, p.305

51.

CONTRERAS (AM) et JEAN (Ph) : " La réforme hospitalière du 31 juillet 1991 : la planification sanitaire. Recueil de textes législatifs et réglementaires ". Document de synthèse, février 1992.

52.

Article 712.2

53.

Liste des 12 activités classées comme étant d’un coût élevé

- transplantation d'organes et greffes de moelle osseuse ;

- traitement des grands brûlés ;

- chirurgie cardiaque ;

- neurochirurgie ;

- accueil et traitement des urgences ;

- réanimation ;

- utilisation diagnostique et thérapeutique de radioéléments en sources non scellées ;

- traitement des affections cancéreuses par rayonnements ionisants de haute énergie ;

- néonatalogie et réanimation néonatale ;

- traitement de l'insuffisance rénale chronique ;

- activités cliniques de procréation médicalement assistée et diagnostic prénatal ;

- réadaptation fonctionnelle

54.

article 712.3

55.

cf collectif d’auteurs : « Dossier : les nouveaux outils de planification sanitaire ». Actualité et dossier en santé publique, n° 11, juin 1995

Cf VIGOUROUX (C), conseiller d’état : « L’intervention publique dans le domaine de la santé : planification ,autorisation, schéma ». L’actualité juridique, droit administratif, 20 septembre 1995, pages 592 à 603

56.

Composition du CNOSS et du CROSS :

un député, un sénateur, des représentants de l’état, des collectivités territoriales et des organismes de sécurité sociale, des représentants des institutions et établissements de santé ou sociaux, des représentants des usagers de ces établissements, des représentants des professions de santé, des personnalités qualifiées.

57.

article 710.14

58.

article 712.4

59.

Article 714.6

60.

Article 714.11

61.

Article 714.23

62.

Article 712.7

63.

Collectif d'auteurs : " La réforme hospitalière expliquée aux médecins ". Le quotidien du médecin n° 4742, lundi 6 mai 1991.

64.

Voir en annexe 5 : l’organisation administrative d’un établissement hospitalier