2.2.2.2. L'exercice infirmier

2.2.2.2.1. Les caractéristiques de la formation d'infirmier : la polyvalence

‘" La fonction infirmière92 comprend l'analyse, l'organisation et l'évaluation des soins infirmiers et leur dispensation soit sur prescription médicale, soit dans le cadre du rôle propre infirmier. Les infirmiers concourent à l'établissement du diagnostic sur prescription ou conseil médical, ils effectuent les soins spécifiques et d'hygiène nécessités par l'état de santé du malade. Ils réalisent enfin divers travaux administratifs nécessaires à l'exécution de ces soins et à la bonne marche du service "93.’

Les soins infirmiers, en tant que tels, visent à protéger, maintenir, restaurer ou promouvoir la santé et l'autonomie des fonctions vitales des personnes, en tenant compte des données physiques, psychologiques, socio-économiques et culturelles de la personne soignée. Outre l'aspect technique indiscutable, ils revêtent une dimension beaucoup plus large faisant appel à des aptitudes relationnelles, organisationnelles, pédagogiques, éducatives ...

L'hôpital demeure la principale référence professionnelle. En effet, même diversifiée, la pratique extra hospitalière s'appuie sur le savoir hospitalier. L'infirmier(e) travaille en étroite collaboration avec l'équipe médicale et les autres professionnels de santé. Nous verrons ultérieurement en quoi consiste précisément son activité au sein d'une unité de soins et en quoi la structure organisationnelle est facilitante ou non pour l'exercice de la pratique infirmière au quotidien.

Un diplôme d'état obtenu à l'issue de trois années de formation professionnelle, après le baccalauréat ou un titre équivalent, autorise l'infirmier(e) à exercer dans l'ensemble des secteurs d'activités existants (hôpitaux publics ou privés, cliniques, dispensaires, cabinets d'auxiliaires médicaux, établissements thermaux, pénitentiaires, scolaires et universitaires,...).

Cette dernière décennie, des diplômes universitaires ou d'université ont vu le jour et ce, suite à un besoin d'identité professionnelle et de reconnaissance légitime des soignants, ayant généré notamment à la fin des années 80 des mouvements sociaux importants. Ces formations ne mènent pas au diplôme d'état, mais présentent l'intérêt d'élargir le champ de connaissance des soignants.

L'émergence d'un nouveau profil infirmier a été favorisée par l'arrêté du 23 mars 1992, définissant le programme du nouveau diplôme infirmier94. Trois éléments sont ainsi mis en exergue :

  • - la professionnalisation et une meilleure reconnaissance sociale ;

  • - l'aptitude à répondre aux besoins de santé d'un individu ou d'un groupe dans le domaine préventif, curatif, de réadaptation ou de réhabilitation ;

  • - la polyvalence, afin de dispenser des soins infirmiers en tenant compte de l'ensemble des problèmes posés par une atteinte fonctionnelle et une détresse physique ou psychologique frappant une personne.

Un quasi bouleversement a d'ailleurs fait suite au rapprochement inattendu de la formation des infirmiers psychiatriques et des infirmiers de soins généraux diplômés d'état. Les premiers obtenaient jusqu'à cette date un diplôme d'état spécifique à la psychiatrie, leurs écoles étant distinctes et autonomes. L'exercice de leur métier ne pouvait se faire qu'en secteur psychiatrique. Aujourd'hui ne demeure qu'une seule formation professionnelle d'infirmier(e), faisant tomber la scission psychiatrie - soins généraux, au bénéfice de compétences communes. En effet, la psychiatrie ne constituait pas une spécialisation de la profession infirmière, à l'inverse des puéricultrices, des anesthésistes et des panseurs - instrumentistes en bloc opératoire qui nécessitent obligatoirement la possession du diplôme d'état d'infirmier(e) en soins généraux et un exercice du métier de base de deux années minimum (excepté pour la puéricultrice).

Ces trois métiers représentent les seules spécialités officielles et réglementaires de la profession infirmière initiale. Il n'en demeure pas moins que d'autres niveaux de spécialisation coexistent, correspondant plutôt à une expertise dans un domaine donné. Cette connaissance spécifique, détenue par un ou plusieurs membres d'une équipe, vient renforcer le potentiel de compétences collectives. A titre d'exemple, on peut noter l'intérêt d'infirmiers stomathérapeutes dans certains services. Grâce à une formation spécifique, ils dispensent aux stomisés95des soins adaptés ayant comme objectif le retour à l'autonomie.

‘" La profession d'infirmier a connu au cours de ces vingt dernières années une évolution considérable dans ses pratiques et dans ses responsabilités. Son activité est passée des soins infirmiers dispensés sur prescription ou conseils médicaux à des soins infirmiers très clairement identifiés tant par les actes techniques prescrits que par les actes relevant de son champ spécifique de compétence.
Avec l'édiction des règles professionnelles, son activité s'est encore enrichie par de véritables valeurs professionnelles faisant référence, soit à des principes généraux, soit à des devoirs très stricts vis-à-vis des malades.
En 1993, la révision du décret relatif aux actes professionnels et à la profession d'infirmier et la parution du décret relatif aux règles professionnelles des infirmiers et infirmières renforce la responsabilité de ces professionnels et nécessite une plus grande collaboration fondée sur le respect mutuel et une confiance partagés entre les médecins et les infirmier(e)s. "96

Les compétences des infirmier(e)s sont clairement détaillées dans ce décret du 15 mars 199397 qui délimite le champ d'intervention infirmier. Les soins infirmiers, préventifs, curatifs ou palliatifs sont de nature technique, relationnelle et éducative. Leur réalisation tient compte de l'évolution des sciences et des techniques. Ils ont pour objet :

  • de protéger, maintenir, restaurer et promouvoir la santé des personnes ou l'autonomie de leurs fonctions vitales physiques et psychiques, en tenant compte de la personnalité de chacune d'elles, dans ses composantes psychologique, sociale, économique et culturelle ;

  • de prévenir et évaluer la souffrance et la détresse des personnes et de participer à leur soulagement ;

  • de concourir au recueil des informations et aux méthodes qui seront utilisées par le médecin pour établir son diagnostic ;

  • de participer à l'évaluation du degré de dépendance des personnes ;

  • d'appliquer les prescriptions médicales et les protocoles établis par le médecin ;

  • de participer à la surveillance clinique des patients et à la mise en oeuvre des thérapeutiques ;

  • de favoriser le maintien, l'insertion ou la réinsertion des personnes dans leur cadre de vie familial et social ;

  • d'accompagner les patients en fin de vie et, en tant que de besoin, leur entourage.

‘" Pour ce faire, relèvent du rôle propre de l'infirmier, les soins infirmiers liés aux fonctions d'entretien et de continuité de la vie, et visant à compenser partiellement ou totalement un manque ou une diminution d'autonomie d'une personne ou d'un groupe de personnes "98

Relèvent du rôle sur prescription médicale, les scarifications, injections et perfusions dans le respect des techniques afférentes et par ailleurs, un certain nombre d'actes nécessitant qu'un médecin puisse intervenir à tout moment. L'infirmier participe également en présence d'un médecin à l'application de techniques spécifiques.

Les actes professionnels de l'infirmier, relevant tant du rôle propre que du rôle prescrit, énumérés dans le texte législatif, s'appliquent ainsi pour tout patient quelle(s) que soi(en)t sa ou ses pathologie(s). L'exercice infirmier est donc, dans sa conception originelle, un exercice polyvalent. La formation initiale, sanctionnée par un diplôme d'état polyvalent, aborde l'homme dans une dimension de soins holistiques.

Les soins préventifs et éducatifs s'inscrivent dans une démarche visant à développer l'autonomie des patients. L'infirmier(e) les aide ainsi à prendre en charge leurs problèmes de santé.

Les soins de maintenance et de réhabilitation représentent les " soins de vie ", nouvelle base philosophique de la fonction soignante. La population vieillit, et de ce fait les handicaps augmentent. La prise en charge de cette nouvelle frange de malades nécessite chez l'infirmier(e) des qualités d'observation, d'écoute, de réflexion et de créativité afin que soient mis en oeuvre des " projets de vie " personnalisés basés sur la promotion de la santé, la réhabilitation sociale et l'accompagnement des personnes en fin de vie.

Les soins curatifs font appel à la compétence technique de l'infirmier(e). Ils diffèrent selon la nature des pathologies médicales ou chirurgicales. L'enseignement est basé sur les pathologies courantes. Des modules optionnels peuvent être proposés aux étudiants pour les spécialités pointues.

Notes
92.

Cf Collectif d’auteurs : « Le guide de l’infirmière 1992 ». Hors-série de l’infirmière magazine, Paris, 1992, 249 pages.

93.

ACCART (JP), PASTY (N) : « Les médecins de l’hôpital » op. cité p. 121

94.

Annexe n° 9

95.

Stomisé : personne ayant subi l’abouchement chirurgical d’un organe creux à la peau

96.

Collectif d'auteurs " Infirmier-Infirmière à l'hôpital public : droits et devoirs ". Les guides de l'Assistance Publique - Hôpitaux de paris, éd. Doin, Paris, 1994, 41 pages, p. 5, Préambule Marinette Olivier.

Cf FLORET (MC) : " Les infirmières, les infirmiers et leurs écoles ". Op. Cité

97.

Décret n° 93-345 du 15 mars 1993, relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession d'infirmier (Journal officiel du 16 mars 1993) Annexe 10

98.

Décret n° 93-345 du 15 mars 1993, relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession d'infirmier (Journal officiel du 16 mars 1993) Annexe 10