3.2.2.2. Le public manipulateur en radiologie

Ce public n’apparaît effectivement pas dans la population interviewée de la monographie, la recherche ayant été circonscrite aux unités de soins. Nous avons toutefois choisi de retenir les manipulateurs radio dans notre champ d’étude par questionnaire, et ce pour plusieurs raisons. La rationalisation des dépenses de santé a fait et continue de faire évoluer l’organisation hospitalière. Pour diminuer la durée moyenne de séjour (DMS) des patients, les hôpitaux doivent être dotés d’un plateau technique performant. Les services d’imagerie, plus communément appelés services de radiologie, se sont complètement transformés au cours des quinze dernières années, du fait de :

une technicisation accrue : la radiologie conventionnelle, telles que la radiographie pulmonaire, la radiographie osseuse..., bien qu’encore existante, a pris une part de plus en plus faible de l’activité, au profit de technologies nouvelles permettant l’obtention de diagnostics beaucoup plus précis. La scanographie ou scanner est devenu un examen courant et jouit, par ailleurs, d’une forte image médiatique, d’où l’impact sur la clientèle hospitalière. « ‘Il semble que la volonté des radiologues d’acquérir un scanner joue un rôle déterminant. Même si la demande ne peut se justifier en termes de niveau d’examens, leurs préoccupations en termes d’images, de prestige, de technicité, de professionnalisme confortent ou suggèrent l’argument institutionnel de cohérence avec une vocation d’hôpital général... L’équipement est un emblème, un totem à signification polysémique, un gage de compétence, une source de productivité, imposé comme prix à payer pour garantir la qualité de la prestation des offreurs’ 118 ».

L’imagerie par résonance magnétique (IRM) 119, la dernière née des technologies de pointe, de par sa particularité en matière d’obtention des images, a fait faire un bond en avant à la recherche diagnostique. A titre d’exemple, il était auparavant nécessaire de pratiquer des examens extrêmement invasifs, voire douloureux, chez des patients présentant des pathologies neurologiques. Des anesthésies partielles ou totales y étaient le plus souvent corrélées, allongeant par ailleurs le temps d’hospitalisation.

Aujourd’hui un simple examen IRM, fait en ambulatoire120, permet une excellente visibilité du cerveau et ses différentes cavités, de la moelle épinière...Les fortes capacités diagnostiques de ces appareils et de l’angiographie numérisée ont d’autre part fait évoluer l’exercice professionnel du radiologue et du manipulateur vers une fonction thérapeutique. On « traite » les patients aujourd’hui dans les services d’imagerie : on ponctionne un abcès, on dilate une artère, on embolise un vaisseau qui saigne.... C’est ce que l’on appelle la radiologie interventionnelle. La frontière est parfois mince entre ce qui est pratiqué au bloc opératoire et ce qui est pratiqué en radiologie.

La réalité du rôle soignant des manipulateurs radio. Le manipulateur radio, technicien à ses débuts, est devenu ainsi un soignant à part entière. Les actes de soins se sont multipliés. Si les missions sont différentes, on peut néanmoins noter une part de rôle soignant commune aux infirmières et manipulateurs radio.

La technique n’est plus la finalité du travail. Elle constitue le moyen privilégié de décider des meilleurs choix thérapeutiques et, pour une partie, de les mettre en oeuvre localement. Les manipulateurs radio doivent ainsi travailler en étroite collaboration avec leurs collègues infirmières afin que les patients puissent bénéficier de leurs examens dans les meilleurs conditions de réalisation possibles. Le temps d’hospitalisation est court, les examens nombreux, ce qui impose une grande coordination des acteurs de soins.

Un accroissement des effectifs manipulateurs radio. Nous avons pu voir précédemment, combien les effectifs paramédicaux se sont accrus au cours des dernières années (+ 99,6 %)121. Les services de radiologie sont tout à fait représentatifs de cette forte expansion. Les manipulateurs radio forment aujourd’hui un des groupes paramédicaux les plus importants après le corps infirmier.

Les missions diagnostiques et thérapeutiques des services de radiologie, servies par des technologies de pointe, des effectifs conséquents de manipulateurs techniciens mais surtout soignants, ainsi que des radiologues thérapeutes, ne sont plus à démontrer. Les manipulateurs de radiologie font toutefois rarement l’objet d’enquêtes exploratoires, aux infirmière(s), d’où notre choix de les inclure dans notre échantillon.

L’évolution de l’organisation hospitalière, en matière de production de soins et de techniques exploratoires, explique ainsi le choix de ce public. Par ailleurs, le fait que l’auteur de cette thèse ait débuté son activité professionnelle comme manipulatrice radio a contribué à soutenir ce choix.

Le questionnaire des manipulateurs radio reprend les mêmes axes que celui des infirmières 122. Ils ne s’appuient pas cependant sur la même base géographique d’exploration. En effet, les lieux géographiques d’exercice des deux métiers sont totalement différents, car n’appartenant pas aux mêmes réalités structurelles.

Notes
118.

CLAVERANNE (JP), KRICHEN (M), CHANDERNAGOR (P) : « Le statut des équipements hospitaliers : stratégie(s) d’acteur(s) et ordre technicien » dans le cadre national de recherche sur l’hôpital MIRE. Direction des hôpitaux. Contribution à l’ouvrage collectif « l’hôpital stratège, dynamiques locales et offres de soins », coordonné par (A.P) CONTANDRIOPOULOS et (Y) SOUTEYRAND, John Libbey Eurotext, Paris 199+6, 317 pages, p.257-270

119.

C’est un champ magnétique qui permet l’acquisition d’image d’une « tranche » du corps humain, émission de rayons X

120.

Ambulatoire : sans nécessité d'hospitaliser le patient

121.

voir figure n° 12

122.

les axes concernent, outre les pratiques de soins, des pratiques techniques.