Face aux délocalisations, valoriser les compétences dont dispose l’atelier France (200 personnes), devient une urgence afin de sauvegarder les emplois. Le passage à une organisation multipostes basée sur plus d’autonomie et de flexibilité semble être une des solutions.
La mise en place d’équipes autonomes rend caduque la production en ligne, en vigueur depuis de nombreuses années, limitant le travail d’une ouvrière à une ou deux opérations de confection maximum.
‘« Le groupe autonome polyvalent 206 est un groupe de cinq à dix personnes réalisant toutes les opérations, à partir des pièces coupées jusqu’au produit fini. Chaque personne de ce groupe répond à la plupart des exigences des opérations, y compris les opérations de qualité et pliage auparavant confiées à des agents de maîtrise.s’engage sur des objectifs de qualité et de quantité ;
s’organise pour réaliser ses objectifs ;
est encadré par une animatrice, dépendant d’un chef d’unité ».
Selon l’entreprise, les groupes autonomes présentent l’intérêt de satisfaire tant le client que l’entreprise et le personnel1.
Il s’agit de :
Pour le client
tenir des prix compétitifs
assurer la qualité
respecter les délais
Pour l’entreprise
rendre flexible la production
accroître la performance
améliorer le prix de revient
maintenir le niveau de qualité
Pour le personnel
vivre une autre façon de travailler ensemble
reconnaître les compétences
améliorer la rémunération
favoriser les initiatives
créer de nouvelles conditions de travail.
Pour ce faire, d’importants moyens ont été mis en oeuvre tant en investissements que dans les domaines de la formation et de l’information. Le plan de communication, autour du projet, a notamment permis la bonne adhésion du personnel à la réorganisation. La mise en place d’un système d’information en temps réel et d’un nouveau mode de relation avec le personnel (deux heures de réunion par semaine d’auto-organisation) corrélés à des réunions de lancement, en sont les principaux axes.
Le retour sur investissement s’avère très positif quatre ans plus tard.
Les clients bénéficient d’une meilleure livrabilité et le traitement des urgences est plus efficace.
L’entreprise a amélioré son niveau de qualité par une forte baisse de ses déchets. Elle a par ailleurs accru la flexibilité et réduit parallèlement l’absentéisme. Quant aux impacts relatifs au personnel, on relève un élargissement et un enrichissement du travail fortement responsabilisants. La qualification remplace l’ancienneté comme critère d’évolution, la création de quatre échelons supplémentaires ouvrant par ailleurs plus de possibilités. La rémunération moyenne s’est élevée de 11 %, modifiant ainsi la relation avec les partenaires sociaux.
En résumé, les principales idées-clés émises à propos de l’exercice de la polyvalence au sein de ces entreprises sont les suivantes :
la polyvalence :
est un mode de vie au quotidien ;
est culturelle ;
doit être négociée, organisée et valorisée ;
permet de répondre aux fluctuations de l’activité, à l’absence des salariés et évite la monotonie ;
facilite la communication interne ;
doit être dosée pour préserver les savoir-faire et maintenir la position concurrentielle ;
représente la capacité à mettre en oeuvre les compétences détenues par les individus ;
s’inscrit dans une logique collective organisationnelle et managériale ;
accroît la responsabilité et l’autonomie des individus ;
nécessite et promeut le travail en collaboration ;
élargit et enrichit le travail humain, en le diversifiant.
Ces quatre cas d’entreprises montrent que la polyvalence a constitué :
un levier de mobilité. Le parcours professionnel dépasse la vision des postes. En effet, le poste est surtout un point de repère, nécessaire à la structuration de l’entreprise et à sa gestion administrative et financière ; l’outil référentiel de compétences sert, quant à lui, à décrire l’ensemble des fonctions de l’entreprise et à ce titre, promeut la mobilité interpostes et intermétiers.
un levier en termes d’enrichissement de la fonction managériale. Les managers ont à identifier les besoins de leur unité en compétences, en dépassant les seules compétences techniques jugées trop spécifiques et réductrices. La palette de compétences détenues par les personnes s’inscrit dans une logique d’adéquation avec l’organisation et non seulement avec le poste, d’où l’importance de cerner les caractéristiques de « l’organisation employeur », la gestion du patrimoine des compétences en dépend largement.
BON (B), BOURSIER (D) : « Le passage à une organisation multipostes basée sur plus d’autonomie et de flexibilité pour faire face aux délocalisations et sauvegarder l’emploi ». Intervention à la manifestation IIR, op. cité