6.1. L'EVOLUTION DE LA FABRIQUE LYONNAISE DANS LES ANNEES 1880

A Pariset, les difficultés de la Fabrique inspirent la réflexion suivante: "Une évolution si rapide dans la production n'a pas pu se produire sans que la Fabrique lyonnaise en souffrît. Il faut voir un effort prodigieux, et non pas un signe de prospérité, dans les résultats extraordinaires que nous venons de signaler. Le régime n'a pas cessé d'être défavorable" 932 . Si l'on regarde l'évolution des bénéfices de la maison Arlès-Dufour par exemple, force est de constater que le coup est rude: de 667.285 francs en 1880-81, ceux-ci s'affaissent à 642.829 lors de l'exercice suivant puis - 1.935.797 en 1882-83 pour s'effondrer à - 2.646.868 en 1884-85 933 . La vérité, c'est que la filière lyonnaise a vieilli et les constats ou les efforts que font ses représentants dans les années 1880 sont identiques à ceux de la décennie précédente. Quelle analyse les contemporains font-ils de la situation ? Pour répondre, on dispose de l'ouvrage de Léon Permezel, L'industrie lyonnaise de la soie, son état actuel, son avenir 934 de 1883. Que dit-il ? Analysant la concurrence, celui-ci écrit: "Depuis le premier juin 1882, les fabriques autochtones ont acquis un énorme développement (...) nous constatons là les déplorables conséquences de la fâcheuse politique économique que suit notre gouvernement dans ses relations extérieures" 935 . Puis il constate 936 : "S'ensuit-il de ce que notre suprématie est aujourd'hui reconnue de tous, que nous devons nous reposer sur l'oreiller des succès passé et nous désintéresser de ce qui se fait autour de nous! Cette tendance paraît, malheureusement, être un peu celle de notre Fabrique, nous la croyons très dangereuse". Il insiste beaucoup 937 sur la qualité de l'organisation de l'enseignement professionnel en Allemagne et en Suisse 938 : "De cet enseignement découlent: une instruction pratique parfaite, dirigée vers le côté industriel; la connaissance des règles économiques, qui sont la loi des affaires, l'étude des usages commerciaux de tous les pays, des principes de la législation, des questions financières, des changes, connaissances si profondément nécessaires aujourd'hui; la possession presque générale des trois principales langues commerciales: le français, l'anglais et l'allemand. (...) Ceux qui fréquentent les marchés de Londres, New York et même de Paris peuvent vous le dire. Les producteurs allemands et suisses y viennent eux-mêmes plusieurs fois par an et y font chaque fois de longs séjours. L'étude de la consommation faite sur le vif, les renseignements reçus des consommateurs eux-mêmes, constituent, au profit du producteur assez heureux ou assez intelligent pour les obtenir, un avantage énorme sur celui qui ne les reçoit que transmis de bouche en bouche par de nombreux intermédiaires, naturellement avec une perte de temps, et souvent, ce qui est pis encore mal compris, tronqués et dénaturés par une personne incompétente dans la fabrication: ce qui, alors, n'est plus une source de force, mais une cause de faiblesse. (...) Etre ainsi renseigné est une force colossale, force que nous dédaignons, malheureusement, beaucoup trop. L'accroissement énorme de la population d'origine saxonne constitue aussi, (...) un avantage sérieux. (...) Ces nombreux jeunes gens qui s'expatrient sont autant de convoyeurs des produits de la mère-patrie. (...) N'est-il pas singulier, Messieurs, de voir que le principe si généralement appliqué aujourd'hui de l'association des capitaux pour la création des puissantes organisations industrielles n'ait jamais été mis en pratique pour la soie? (...) Il y aurait lieu de se préoccuper de la création de vastes organisations, basées sur le modèle de celles qui ont fait la fortune des industries de la laine, du coton, et, près de nous de la métallurgie. (...) Aujourd'hui, avec les agents puissants que la science met à notre disposition, avec la vapeur, le télégraphe, bientôt l'électricité, agents inconnus ou inutilisés de nos devanciers; avec l'instruction professionnelle, que tant d'institutions philanthropiques distribuent si généreusement; aujourd'hui, dis-je, nous devons, messieurs, et ce sera notre dernier mot, maintenir cette industrie dans de telles conditions de succès et de prospérité, basées sur le progrès constant, que, quels que soient les efforts de nos rivaux (et nous pouvons nous attendre à des assauts énergiques), la Fabrique de Soieries de Lyon soit toujours, dans l'avenir, ce qu'elle a été dans les siècles passés: la premières Fabrique du monde!".

Pour lui, qu'une grande partie des 120.000 métiers à bras de la région lyonnaise chôment 939 , c'est une grande faiblesse "car la sécurité de l'ouvrier et la continuité du travail ne sont plus assurées, les salaires réclamés sont plus élevés; (...) le chômage trop facile et (...) un peu égoïste qu'impose le fabricant à l'ouvrier (...) rompt les liens de confiance et de sécurité pour son existence, qui devraient moralement unir l'ouvrier à son fabricant". Il compare la production totale en 1880 et en 1881: celle-ci est passée de 350 M FF, dont 170 pour les soieries mélangées et 186 pour les pures, à 395 M FF dont 239 pour les pures et 156 pour les mélangées. Rappelant que ces dernières sont produites par des métiers mécaniques, il souligne qu'il n'y a que 19.000 métiers de ce type à Lyon en 1880. Il raisonne enfin en "métiers à bras", calculant que si l'on ajoute à ces métiers mécaniques 10.000 métiers à bras pour les compléter, cela fera un total de 29.000 métiers ayant une production égale, à valeur égale, que les 110.000 métiers à bras produisant des soieries pures. Le premier responsable désigné des difficultés, c'est donc la politique extérieure du gouvernement. Le second, après avoir tout de même évoqué le laxisme de certains fabricants, c'est le système de formation professionnelle, jugé trop médiocre par rapport à ceux de la concurrence. Ces propos de Permezel illustrent fort bien la mentalité et les lacunes des fabricants lyonnais de cette époque. Ils montrent surtout que, face aux difficultés qu'ils doivent alors affronter, ceux-ci sont bien incapables d'échafauder des solutions valables. La vérité, c'est que Les fabricants lyonnais ont vieilli en même temps que leur appareil de production et que la situation leur échappe totalement. Ils raisonnent encore en terme "d'armement" et comptent leurs métiers à bras comme un général le ferait de ses régiments. Pour répondre aux problèmes des canuts justement, que font-ils ? Sous l'impulsion d'E. Aynard de la CCIL, ils créent un atelier expérimental où tous les types de métiers sont exposés afin que les ouvriers puissent choisir celui qui leur conviendra le mieux940. Dans le domaine de la formation commerciale, ensuite, si, dès les années 1860, la Chambre insistait déjà sur l'intérêt de propager l'étude des langues orientales941, les enseignants et les méthodes faisant défaut, ce n'est que dans les années 1880 seulement que les premiers cours de japonais sont dispensés942. Pareillement, on ne projette de créer un cours de chinois qu'en 1880, "M. Philastre, inspecteur en retraite des affaires indigènes en Cochinchine étant alors pressenti pour en assurer la tenue"943. Tout comme lors des crises de la décennie précédente, la Chambre de Commerce doit donner l'impulsion. Elle approuve par exemple l'initiative du Ministère du commerce qui veut favoriser les conférences des agents consulaires à l'étranger quand ils sont de passage en France, car: "l'un des obstacles les plus sérieux à l'expansion rapide de notre commerce international est trop souvent (...) la connaissance incomplète des mœurs, des usages, des coutumes, des besoins, des conditions économiques des peuples qui consomment nos produits"944. La même année, elle souscrit à hauteur de 2.000 francs à la création de la Société d'Encouragement pour le commerce français d'exportation à l'initiative de la Chambre de commerce de Paris et dont l'objectif est de placer des jeunes français compétents à l'étranger pour favoriser le commerce français945. C'est encore elle qui débourse 14.622,50 FF de frais de voyage et de séjour, auxquels il faut rajouter 1.281,10 FF de frais de publication d'un rapport paru en 1885, au titre de la participation à l'élaboration et la conduite d'un questionnaire et d'une enquête confiés à Paul Brunat946. Toujours en 1883, la Chambre propose une loi pour lutter contre les fraudes qui consistent à faire passer pour français des produits fabriqués à l'étranger et elle travaille à l'élaboration d'un projet de création à Boston d'une agence pour la vente directe des soieries françaises947 mais rien ne semble y faire et on lit: "Lyon (...) voit chaque jour son prestige diminuer, son influence s'évanouir (...), les rivalités qui existent entre négociants, plus encore que la concurrence étrangère, activent chaque jour sa décadence (...)".

Lyon s'enfonce dans la crise. Les tissus noirs ne sont plus demandés 948 et la Chambre n'en finit plus de constater la progression des tissus mélangés au détriment des soieries pures unies: la production lyonnaise de cette dernière catégorie d'article, qui était de 413,5 M FF en 1874 n'en est plus qu'à 160 M FF vingt ans plus tard, alors que celle des mélangés a quadruplé 949 . En 1884, une crise financière américaine liée aux chemins de fer entraîne un recul des ventes de soieries et durant l'hiver de cette même année, éclate une grande crise avec choléra à Paris, crise boursière à New York, "malaise commercial" en Angleterre et sur-production globale 950 . La nervosité gagne la Chambre qui proteste contre les procédés de désinfection des colis de soieries aux frontières d’Espagne et d’Italie qui rendent les soieries invendables et contre des problèmes de transport des œufs, les emballages défectueux entraînant manque d’air et moisissure 951 . Un tiers des 18.000 métiers que compte alors Lyon cessent de battre et une grêve sans précédent éclate 952 . Lyon subit une très forte poussée des soieries teintes en pièces allemandes, suisses et autrichiennes tandis qu'en Corée, ce sont les maisons anglaises qui ont des comptoirs à Yokohama qui introduisent les mousselines de Tarare sur le marché 953 . La Chambre constate 954 : "Nous ne sommes plus à l'époque où la présence à Lyon de deux ou trois acheteurs des grandes maisons de Paris ou de Londres produisait une vive sensation et en fixant les tendances de la mode, donnait souvent naissance à un mouvement général d'affaires (…) les achats sont devenus nombreux et morcelés (….) le fabricant doit diviser à l'infini sa production, le marché de la soie doit suivre celui de l'étoffe (…). Les stocks se divisaient autrefois en trois et même quatre réservoirs: la fabrique de soieries, le moulinage, le commerce des soies et les producteurs. Or aujourd'hui la fabrique se pourvoit au jour le jour, l'inconstance de la mode lui interdisant toute accumulation de matière première (…) le moulinier a disparu en grande partie en tant qu'industriel propriétaire de son moulin (…). Les ouvreurs sont pour la plupart de simples façonniers (…) les stocks restant entre les mains des producteurs, le fardeau de la récolte n'est pas partagé et il pèse plus lourdement (ce qui fait baisser les prix)". En 1885, les exportations françaises de soieries n'atteignent plus que 250 M FF 955 mais surtout, alors que celles à destination des Etats-Unis étaient de 50 M FF en 1873-79, elles sont passées à 33,5, alors que dans le même laps de temps, les importations américaines s'étaient élevées de 112 à 120 M FF. Néanmoins, la Chambre reste fidèle à ses idéaux. Elle verse une souscription de 3.000 FF à l'Association pour la défense de la liberté commerciale et projette de créer une marque municipale pour les étoffes en soie afin d'éviter les contrefaçons 956 .

Mais, décidément, les conditions qui avaient depuis toujours favorisé Lyon appartiennent de plus en plus au passé. Dans les années 1880, par exemple, les belles étoffes entrent de plus en plus dans le domaine de l'histoire. Celles-ci ne sont plus élaborées que dans des écoles d'art en Europe et aux Etats-Unis 957 et ne sont plus portées que pour l'apparat dans le cadre de bals costumés et de tableaux vivants. A partir de 1884 Liberty vend des robes à l'aspect "médiéval" et "en 1880 une personne cultivée se doit de s'intéresser et de connaître l'histoire des costumes". Les productions soyeuses ne bénéficient plus que de circonstances exceptionnelles liées à des engouements de plus en plus passagers et ne permettant plus qu'à de petites entreprises très spécialisées de travailler que de façon très ponctuelle. En 1884, par exemple, le glacé est à la mode, sa production bondit mais très rapidement le reflux de la demande entraîne sa surproduction. Pour faire tourner son entreprise, il faut alors savoir produire les étoffes "dans le vent" comme les gilets de soie brochés reproduisant des modèles italiens des XV et XVI° siècles de la firme Warner & Sons de Spitalfields. Finalement, la Fabrique lyonnaise finit par ne plus répondre qu'à un seul type de demande, celle du luxe. Une fois la crise passée, c'est le retour des riches étoffes, dès 1885, et le début des soieries produites mécaniquement au kilomètre et teintes en pièces 958 . L'année suivante, on lit dans les CRT: "En résumé, notre industrie a conservé intacte sa suprématie pour la perfection de ses produits, la science de la contexture du tissu, uni à un sentiment perfectionné de l'art, les aptitudes héréditaires que quatre siècles ont légué à ses fabricants et à ses ouvriers de tous ordres restent son apanage dans ce domaine de la production supérieure. Mais, grâce aux tendances actuelles de la mode à la poursuite toujours plus ardente du bon marché et aussi aux progrès indéniables réalisés par les fabriques étrangères, cette prééminence, cette souveraineté industrielle devient, en bien des cas, pour nous, un avantage stérile et presque sans objet" 959 et en 1888 paraît l'ouvrage d'Albert Racinet qui entérine cette évolution, l'Histoire du costume. C'est désabusés et las que les soyeux lyonnais finissent cette décennie qui marque leur irréversible déclin en dressant une sorte d'état des lieux. Le manque de dynamisme est flagrant. Des allocations continuent d'être versées et on envisage d'intégrer à l'enseignement commercial l'esperanto récemment créé par le Dr. Zamenhof mais la motivation n'est plus là 960 . N. Rondot, dresse un bilan 961 dans lequel il s'élève contre la hausse des salaires et la frivolité des femmes. Il réfléchit encore au problème de la désignation exacte des tissus 962 : Alors que dans les statistiques, les "tissus de soie mélangée" sont les tissus dans lesquels la soie entre dans une proportion quelconque, pour lui, les "étoffes de soie pure et étoffes dans lesquelles la soie domine en poids" 963 doivent être désignées comme "soieries véritables" 964 . Il se plaint que depuis vingt ans, les droits américains sur les étoffes sont de 50%, les mauvaises récoltes de blé, vin, huile et sucre font baisser la consommation rurale. Il constate que désormais, ce sont les modes parisiennes qui s'exportent, obligeant Lyon à s'aligner sur elles alors qu'à peine vulgarisées celles-ci disparaissent. Fataliste, il conclut enfin 965 : "Depuis vingt cinq ans dans l'industrie de la soie, presque tout a changé: matières, métiers, teintures, types et qualités d'étoffes, procédés de fabrication ou d'affaire. (...) Il n'y aura de solution durable que par le progrès, que par une plus haute valeur des hommes (...) Nous n'en restons pas moins convaincu qu'on trouvera dans l'institution d'un système d'enseignement plus complet et plus large un des plus efficaces moyens de garder notre force et de l'accroître".

Encore une fois, gardons-nous cependant de tout catastrophisme. Fin 1886, la production lyonnaise est encore de 377 M FF dont 240 M FF partant à l'exportation 966 , la part des façonnés est même repartie à la hausse 967 . Depuis 1874, la production de mélangés est passée de 39 à 152 M FF en 1884 pour se tasser à 155 millions en 1889, celle des tissus unis est au même niveau avec 153 M FF tandis que celle des articles "divers" qui n'était que de 19 M FF atteint désormais 46 M FF. Toujours en 1889, la Chambre estime que 300.000 ouvriers et un"matériel immobilisé" d'une valeur de 106 M FF assurent une production lyonnaise totale de 400 M FF 968 . A cette même date, la production de la concurrence des pays industrialisés occidentaux se monte à 903 M FF 969 à laquelle il convient d'ajouter 275 M FF de production asiatique estimée. Entre les périodes 1880-1884 et 1885-1889, les exportations de soieries françaises sont passées de 221 à 231 M FF et le nombre de commissionnaires, sans qu'il soit possible de distinguer le grossiste du détaillant 970 , de 253 à 309 entre 1880 et 1890 971 . Comme lors des crises précédentes, les maisons qui ne s'adaptent pas, meurent ou vivotent tandis que celles qui évoluent prospèrent. Ainsi, le redressement du CA de la maison Tassinari et Chatel en 1887 est assuré par les ventes de Paris. Dans un environnement fortement déprimé, l'Exposition Universelle de 1889 représente une aubaine pour Lyon. La Chambre l'a bien compris puisque, si de 1869 à 1888, le total des dépenses de secours de la CCIL est de 5.010.913 FF, sur les seuls 565.115,05 FF consacrés aux expositions, 200.000 l'ont été rien que pour cette manifestation exceptionnelle, soit 26% 972 . Du coup, cette dernière remet à l'ordre du jour les étoffes brochées ou façonnées 973 et les affaires lyonnaises repartent. A la fin de l'année, le CA de la Fabrique est de 451 M FF 974 . Permezel en profite pour faire un nouvel état des lieux 975 . Il recense 16 à 17.000 métiers à main à Lyon plus 50 à 55.000 dans les campagnes plus 20 à 22.000 mécaniques, soit l'équivalent de 130.000 métiers à main. De la production moyenne de la Fabrique, il donne l'évolution suivante: 451 M FF en 1871-75, 364 en 1876-79, 367 en 1881-85 et 385 en 1886-89. Il estime à 50% la part de la main d'œuvre et des bénéfices dans la valeur totale d'une étoffe et les exportations totales en 1888 à 223 millions de francs 976 . A propos de la sériciculture française, il évoque la création de stations agricoles avec l'aide du gouvernement et de la CCIL, les primes et les concours pour tenter de relever celle-ci. A cette occasion, il insiste sur la filature de schappe dont le CA est alors de 30 M FF pour une production de 1,3 million de kilo. de filés et 7.000 ouvriers. 303.358 kilo. partent vers l'Allemagne mais 424.863 kilo sont également importés, la consommation totale française étant de 1,4 million de kilo dont 700.000 pour Lyon.

En 1888, les importations françaises de soieries pures et mélangées atteignent par exemple 38 M FF et celles de tissus pongee et tussahs, 12 M FF 977 . Depuis 1880, ces importations sont stationnaires, entre 40 et 45 M FF 978 , et se composent de "foulards écrus tissés dans l'Inde, Chine, Japon". Elles sont en fait destinées à la ré-exportation après avoir été "francisées" au passage, bénéficiant ainsi de la réputation lyonnaise. A leur propos Permezel précise 979 : "ce sont en réalité des matières premières pour nos industries de préparation (...) elles contribuent (...) à compléter les assortiments de nos grandes maisons de vente et aident ainsi à faire de Paris le plus grand marché de soieries du monde". Il n'empêche qu'en 1900, sur les 40 à 45 M FF d'importations de soieries étrangères en France, 15 à 20 M FF sont des tissus suisses, 9 à 11 millions anglais et 1 million italiens et que pour plus de la moitié, les produits de la Fabrique sont absorbés par le marché intérieur 980 . En d'autres termes, la Fabrique lyonnaise qui était une véritable machine à exporter au milieu du XIX° siècle, est devenue trente ans plus tard une entreprise obsolète qui compte sur le marché intérieur pour subsister. D'audacieuse et opportuniste, elle est devenue frileuse et peureuse comme le laisse sous-entendre Permezel lorsqu'il écrit: "et quoique la Chine nous ait envoyé 11 M FF de ses tissus corah (...). Il y a là (...) pour l'avenir un nouveau danger pour nos producteurs". La Fabrique lyonnaise qui devait son prodigieux développement à une relative, mais permanente, protection de l'Etat, quel que soit le régime de celui-ci, découvre qu'elle doit désormais compter sur ses seules forces. Dans un monde en pleine ouverture dont Lyon ressent désormais la moindre pulsation et subit les conséquences du moindre bouleversement, les questions d'approvisionnement et notamment les conditions de celui-ci, c'est-à-dire les questions de logistique, se posent avec une acuité toute particulière. Après le virage de la production de masse, la filière lyonnaise doit désormais négocier celui de l'impérialisme.

Notes
932.

Pariset, Histoire de la Fabrique lyonnaise, Lyon, 1901, 430 p, p.391.

933.

Evolution des bénéfices de la maison Arlès-Dufour (1875-1885); Pierre Cayez, thèse; tableau n°23

934.

Lyon, 1883, 71 p. Permezel est un soyeux, membre de la CCIL. Son rôle est important en 1892 pour tenter d'obtenir la franchise douanière des matières soyeuses. Fut membre du Conseil Supérieur du Commerce.

935.

p.30.

936.

pp. 38-50

937.

p.52

938.

pp.50-56

939.

L. Permezel, L'industrie lyonnaise de la soie, son état actuel, son avenir, Lyon, 1883, 71 p, p.48. 120.000 métiers dont 20.000 concentrés en usines selon CCIL / CRT 1883, p.52.

940.

Une société dirige cette expérience, la Société de crédit pour les petits ateliers de tissage mécanique.

941.

CCIL / CRT 1865-1868

942.

par M. Guimet

943.

CCIL / CRT 1880; p.175

944.

CIL / CRT 1883, p.229

945.

CCIL / CRT 1883, p.256; La CCIL a pris deux parts de 1.000 FF, la première Assemblée Générale a lieu en juillet 1884 et le vice-président de cette société est le président de la CCIL lui-même.

946.

Apparemment, toutes les Chambres de commerce françaises (Paris, Elbeuf, Mazamet, etc...) et de nombreux syndicats (Chambre syndicale des négociants, des marchands de soie, etc...) participent à cette opération. CRT 1883, p.251-252.

947.

CCIL / CRT 1883, p.194 et p.54.

948.

CCIL / CRT 1884, p.21

949.

de soieries pures unies en 1874 = francs contre en 1884 alors que celle de soieries mélangées soit une augmentation de 38,4 M FF en 1874 à 152,6 M FF en 1884, ou encore "un passage de 1/10e de la production totale à 50%". CCIL / CRT 1884

950.

CCIL / CRT 1884 p.23 et Pariset p.394.

951.

CCIL / CRT 1884

952.

la loi du 21 mai 1884 prévoyant la création de syndicats professionnels, l'Union des tisseurs et similaires est créée. Lors de cette grêve, les trois quarts des métiers sont arrêtés et un conflit oppose fabricants et apprêteurs regroupés en corporation. Une souscription de 10.000 francs est remise aux ouvriers nécessiteux. Pariset p.394 et CCIL / CRT 1884, pages 39, 52 et 65.

953.

La Corée avait signé des traités avec les Etats-Unis, l'Allemagne et l'Angleterre qui font que ces pays pouvaient commercer avec elle mais la France n'avait encore rien signé. CCIL 1884.

954.

CRT 1884, pp.14-15.

955.

180 pour l'Europe, 60 pour l'Amérique dont 48 rien que pour les E.U; les exportations vers l'Europe se décomposent comme suit: 130 pour l'Angleterre, 20 pour l'Allemagne, 10 pour la Belgique, 9 pour l'Espagne et 8 pour la Suisse; Pariset p.399.

956.

CCIL / CRT 1885; respectivement p.187 et p.46.

957.

Philippa Scott, p.214. Dans les années 1880 toujours, naissance du mouvement "de l'Art et de l'Artisanat".

958.

M. Laferrère

959.

CCIL / CRT 1886, p.63

960.

Total des allocations pour l'enseignement professionnel en 1886: 33.500 francs dont 1.000 francs pour la Société de Géographie; CRT 1887.

961.

N. Rondot, La soie, production, consommation et prix, 1887, 41 p.

962.

p.29

963.

p.22

964.

Vaine réflexion dans le contexte d'alors puisqu'après 1880, selon Laferrère, p.100: "l'extension de la gamme de fibres utilisées par la Fabrique vide son sens l'étiquette "soierie lyonnaise"…

965.

pp.39-41

966.

M. Pariset, La Chambre de Commerce de Lyon, Lyon, 1886, 254 p, p.140.

967.

34 millions de francs en 1884 contre 48 en 1889. P. Cayez d'après CCIL, thèse p.548.

968.

CCIL / CRT 1890, p.209. Toute la production française soyeuse y est détaillée.

969.

Allemagne, Suisse, Autriche, Italie , Russie, Espagne, Angleterre, E.U, divers. Pour la production asiatique: Chine, Bengale, Indes anglaises et Japon. Mias pour celle-ci, la production est vraiment très approximative. CCIL / CRT 1890.

970.

Quarante cinq représentent des sociétés parisiennes comme Megroz au capital de M FF en 1880 ou Moret au capital de 3 M FF en 1887. Jusqu'au début des années 1890, quelques grosses maisons spécialisées dans l'uni n'eurent pas de succursales comme A. Giraud, C. J Bonnet. En 1890, on signale 50 maisons parisiennes à Lyon, 26 anglaises (22 de Londres et 4 de Manchester), 5 allemandes (2 de Munich, 2 de Leipzig et 1 de Hambourg).

971.

Respectivement Pariset p.417 et P. Cayez, thèse, p.46.

972.

CCIL 1889

973.

N. Rondot, 1894

974.

Tcheng Tse-sio, Les relations de Lyon avec la Chine, thèse, Paris, bibliothèque de l'Institut de Géographie de l'Université de Lyon et des Etudes Rhodaniennes, 1937, 182 p, p.49; n'hésite pas à parler "d'apogée" à cette occasion.

975.

CCIL / CRT 1890, pp.179-223, enquête et rapport de Permezel sur "le régime économique de la France en 1889".

976.

p.216

977.

R. Tan Shen-chi, La condition juridique des étrangers et particulièrement des sociétés commerciales françaises en Chine, thèse, Lyon, imprimerie des Missions Africaines, 1932, 175 p, p.7. Ces produits sont en effet considérés comme de la matière première pour les industries de la teinture, de l'impression et des apprêts.

978.

Pariset, p.403

979.

Permezel, pp179-223 et p.403.

980.

Pariset, p.403.