4. Plan du développement

Notre travail se compose de six chapitres répartis en deux parties. La première partie regroupe quatre chapitres traitant de la place de l'usager de drogues illicites dans la société sous l'angle historique, psychiatrique et socio-anthropologique. Les deux chapitres de la seconde partie présentent une recherche empirique réalisée dans le cadre d'un centre médico-psychosocial de distribution de méthadone.

Nous débuterons notre première partie avec un historique des usages de drogues de manière à montrer le contexte dans lequel est née l'image du toxicomane actuel. Nous verrons comment au XIXe siècle la science médicale, sous le couvert de théories prétendument scientifiques, a tout à la fois dressé un portrait négatif des usagers de toxiques et contribué à la création du phénomène drogue en tant que problème social.

Si les approches médicales du siècle passé nous apparaissent avec le recul caricaturales quant à leurs conséquences disqualifiantes pour les usagers de drogues, l'approche psychiatrique descriptive actuelle n'en est pas moins infiltrée de préjugés. Ce sera l'objet du second chapitre où l'on montrera comment derrière l'objectivisme de cette approche, des stéréotypes culturels influencent l'élaboration d'une catégorie diagnostique telle que celle de dépendance à une substance. En retour, les représentations sociales de la toxicomanie produites par le monde médical vont participer à l'élaboration d'une identité déviante chez l'usager, dont l'impact sur son intégration sociale sera explicité.

Après avoir montré l'importance des représentations sociales dans la définition psychiatrique de la toxicomanie, nous nous intéresserons au phénomène plus général de la déviance, tel que la sociologie et plus spécifiquement l'interactionnisme symbolique l'ont conceptualisé. Le recours à la théorie de l'étiquetage permettra de rendre compte du rôle des acteurs sociaux qui désignent des comportements comme déviants, notamment au niveau de leur participation au processus interactif de création de l'identité déviante de l'usager de drogues. La sous-culture que véhicule le milieu de la drogue sera décrite dans sa fonction de lieu d'apprentissage et de transmission des techniques et connaissances utiles tant aux consommations de toxiques qu'à l'adoption du rôle de toxicomane.

Alors que le troisième chapitre aborde la construction de l'identité déviante comme une émergence de l'interaction sociale par le biais de la stigmatisation et de l'adoption du rôle de toxicomane, le chapitre quatre traite de mécanismes beaucoup plus déterministes tels que la socialisation et l'influence du contrôle social. Nous présenterons deux approches théoriques de la déviance applicables à l'étude de la toxicomanie qui privilégient l'une le rôle régulateur du contrôle social (la théorie du contrôle social) et l'autre l'influence des contacts avec le groupe déviant (les théories de la déviance culturelle). Une troisième approche centrée sur l'explication des comportements problématiques à l'adolescence permettra de resituer l'apparition des conduites de prises de drogues dans le contexte développemental de cette période de vie spécifique. Ces éléments théoriques seront ensuite mis à l'épreuve des recherches empiriques sur le rôle des différents agents de socialisation dans les comportements de prise de toxiques.

La deuxième partie sera consacrée à la présentation de notre propre recherche réalisée avec des patients en cure de méthadone. Le chapitre cinq situera le contexte institutionnel et définira la méthode utilisée pour le recueil et l'analyse des données.

Les résultats seront ensuite exposés dans un dernier chapitre. Trois groupes d'héroïnomanes catégorisés en fonction de la gravité de la toxicomanie seront comparés en ce qui concerne un ensemble de variables issues de différents questionnaires et abordant principalement la toxicomanie, la psychopathologie et l'intégration sociale. Les analyses statistiques permettront de mieux percevoir les liens existant entre ces trois ordres de phénomènes.

Dans une seconde partie de ce chapitre, l'analyse approfondie de quatre cas cliniques permettra de repérer dans leur discours la place qu'occupent les raisons psychopathologiques et sociales de consommer des drogues.

La conclusion générale fera le point sur les apports de connaissance de notre travail et avancera de nouvelles pistes de réflexion.