2. Sociologie de la déviance

2.1. Définition de la déviance : transgression et désignation

Dans une perspective sociologique, la toxicomanie est généralement considérée comme un cas particulier de déviance160 dans la mesure où elle se caractérise par une violation de normes et qu'elle est identifiée et stigmatisée comme telle par la société. La conduite du toxicomane représente en effet une double transgression ; d'une part elle transgresse la loi qui prohibe dans nos sociétés l'usage de certaines substances161 et d'autre part elle enfreint la règle tacite assignant tempérance au comportement humain.

Le concept de déviance s'applique à des phénomènes fort divers allant des crimes et délits aux handicaps physiques, en passant par les maladies mentales et même somatiques. Avec M. Cusson, on peut définir la déviance comme

‘l'ensemble des conduites et des états que les membres d'un groupe jugent non conformes à leurs attentes, à leurs normes ou à leurs valeurs et qui, de ce fait, risquent de susciter de leur part réprobation et sanctions162. ’

Cette définition met bien en évidence la dimension interactive de la déviance qui résulte de l'affrontement d'un groupe qui juge et stigmatise et d'un autre qui dévie et transgresse des normes instituées. Ainsi définie, cette notion s'applique donc beaucoup plus à une situation sociale globale qu'à un ensemble de caractéristiques propres à une catégorie d'individus bien précise.

Notes
160.

Le concept de déviance est particulièrement récent dans la langue française puisqu'il apparaît dans les dictionnaires et encyclopédies vers la fin des années soixante. Son entrée dans la langue anglaise s'est faite par contre beaucoup plus tôt vers le début des années quarante.

161.

Rappelons qu'historiquement la création d'une liste de stupéfiants hautement contrôlés est née d'un souci d'éviter les empoisonnements.

162.

M. Cusson, Ch. 10 : Déviance, in : R. Boudon, Traité de sociologie, Paris, PUF, 1992, p. 390.