4.2. Théorie de l'apprentissage social

La théorie de l'apprentissage social est un courant du comportementalisme qui s'intéresse à la construction de la personnalité, envisagée comme un ensemble d'habitudes apprises en réponse aux stimuli de l'environnement. Le processus d'apprentissage obéit au principe du conditionnement instrumental 279 et s'effectue par imitation lors de l'exposition au modèle. Il est de plus particulièrement influencé par le jeu des récompenses et punitions qui émanent du milieu social.

Certains théoriciens ont mis l'accent sur la dimension cognitive de l'apprentissage social, intégrant de la sorte les aspects subjectifs du processus. Ainsi, A. Bandura280 met en évidence les mécanismes de régulations internes de l'estime de soi qui jouent un rôle de renforcement du comportement. Pour cet auteur, deux modalités d'apprentissage sont à l'origine de tout comportement.

D'une part, l'apprentissage direct concerne le résultat des actions qui agit comme renforcement lorsqu'il est positif et comme inhibiteur lorsqu'il est négatif. Progressivement c'est l'anticipation de la conséquence de l'action qui motive le sujet dans une situation donnée à adopter telle ou telle conduite. De plus, au cours du développement la préférence se déplace des gratifications extérieures et matérielles vers les gratifications symboliques et immatérielles. D'autre part, l'apprentissage par observation nécessite la présence d'un modèle comportemental suscitant l'attention et la mémorisation chez le sujet.

Selon la théorie de l'apprentissage social, le choix d'un comportement, qu'il soit conforme ou déviant, se fait en fonction des avantages qu'il procure (renforcement positif) et des inconvénients qu'il permet d'éviter (renforcement négatif). C'est l'équilibre des récompenses et des punitions attendues qui guide la conduite humaine281.

Contrairement à la théorie du contrôle social qui ne conçoit qu'une source possible de socialisation (de nature conventionnelle), la théorie de l'apprentissage social envisage l'existence de processus de socialisation tant conventionnels que déviants. C'est le contenu de la socialisation qui joue un rôle explicatif décisif et il n'est pas nécessaire de postuler une déviance inhérente à la nature humaine qui resurgirait en cas d'affaiblissement du lien avec la société conventionnelle, comme l'envisage la théorie du contrôle social.

L'adoption de comportements déviants résulte dès lors avant tout d'un processus d'apprentissage et d'observation se déroulant au sein du groupe des pairs. L'exposition aux modèles déviants est un aspect central de la théorie, dans la mesure où une telle exposition exerce une socialisation directe vers la déviance. Ceci se produit par le biais des renforcements sociaux au sein du groupe déviant sous la forme d'encouragements et de récompenses relationnelles qui sanctionnent les actes conformes aux normes du groupe282.

Notes
279.

La définition du conditionnement instrumental varie suivant les usages. Il peut être synonyme de conditionnement opérant ou représenter une catégorie plus large englobant ce dernier. Le conditionnement opérant est un mécanisme d'apprentissage où le comportement du sujet est renforcé par une conséquence positive (récompense) ou par la suppression d'une punition.

280.

A. Bandura, Social Learning Theory, New York, Mc Caleb-Seider, 1971.

281.

D. S. Elliott et al., 1985, op. cit.

282.

D. S. Elliott et al., 1985, op. cit.