Un accès difficile à l'écrit.

Nathalie n'entre au C.D.I. de son établissement que pour effectuer ses devoirs car elle sait y trouver les dictionnaires, les seuls ouvrages auxquels elle prête intérêt.

Les rayons livres des grandes surfaces n'attirent ni Mireille, ni Olivier. Quant à la librairie, Valérie indique qu'elle y pénètre quand le professeur exige une lecture :

"Pour l'école si, sinon non, je ne me vois pas du tout y aller".

D'ailleurs, elle ne fera pas l'effort de chercher toute seule le titre demandé, elle préfère s'adresser immédiatement au personnel de la librairie. Le dernier ouvrage lu, un roman de Mary Higgins Clarks, a été acheté par sa mère dans le rayon livre d'une grande surface.

Cet environnement leur est étranger parce que le livre leur est étranger. Quand on l'interroge sur sa dernière lecture, Mireille ne peut donner ni le titre, ni l'auteur, ni la collection ou l'éditeur. Valérie rapporte qu'un livre l'a marqué en classe de troisième. Elle ne peut faire mieux que sa camarade, ni évoquer un tant soi peu de quoi il parle :

"C'était une femme qui... Oh, je ne pourrai même pas vous expliquer. Je ne sais pas. Pourtant je l'avais bien aimé, mais je ne me rappelle pas l'histoire" (Valérie).

Valérie ne se remémore pas non plus les titres des autres romans de Mary Higgins Clarks déjà lus. Et pour le dire elle souffre d'un manque de vocabulaire :

"Mary Higgins Clarks, j'ai tous les machins, mais j'en ai lu qu'un" (Valérie).

Ces élèves n'arrivent pas à capitaliser un minimum de connaissances qui rendrait préhensible le monde de l'implicite qu'est l'environnement lectoral. Il n'est pas surprenant que cette absence de sédimentation les conduit à s'en éloigner davantage.