A partir des sens se constituent les différents espaces : buccal, visuel, auditif, tactile, ...etc. Ces espaces existent de façon pratique et hétérogène sans véritable coordination. Il y a bien des coordinations par assimilation réciproque entre espace visuel et tactile par exemple, mais elles ne sont pas durables, faute de permanence. L’espace primitif est donc constitué d’une somme d’espaces et chacun de ces espaces peut être ramené à des schèmes élémentaires.
déplacer la bouche dans la recherche du mamelon,
ajuster réciproquement le pouce et la bouche,
ajuster les objets saisis en vue de les sucer ;
suivre les mouvements, même ceux de translation,
retrouver la position des objets,
évaluer les distances en profondeur ;
entendre et localiser les sons ;
toucher,
retrouver de la main un objet lâché.
Chacun de ces schèmes définit des déplacements élémentaires qui sont ensuite constitués en groupes pratiques élémentaires. Lorsque par exemple, le nourrisson recherche le sein de sa mère, il exécute des mouvements, les ordonne et peut les répéter. Toute trajectoire ainsi effectuée est susceptible de répétition et de renversabilité, en conséquence de quoi le groupe pratique élémentaire se constitue : ‘«Il est constitué par une réversibilité dans les actes mêmes de l’enfant, sans que cette réversibilité ni ses résultats ne soient perçus ou représentés» 49.’ En effet, le petit enfant qui ne se dissocie pas du milieu ne peut différencier les déplacements de son corps, ni ceux de l’objet. Il peut encore moins situer ses activités dans l’espace, ni les concevoir en relation aux déplacements de l’objet. C’est ainsi que les divers espaces hétérogènes décrits précédemment existent sans que l’enfant dissocie pour autant ses mouvements propres de ceux de l’objet.
«La construction du réel», J. PIAGET, p.131.