a) Les conduites de recherche

1) Prendre une boîte, la secouer et l'ouvrir en fonction du bruit : Mustapha (7,3) et Mikrabane (7,5)

   

2) Prendre une boîte, la secouer, détecter l'absence ou la présence de l'objet et ouvrir systématiquement afin de voir

"Dans sa première exploration, Medhi (6,5) va par trois fois prendre une boîte, puis l'ouvrir et ne rien trouver. A la quatrième boîte, après qu'il l'ait secouée, et avant qu'il ne l'ouvre, nous lui demandons si l'objet est dans la boîte ; il répond par l'affirmative. Comme le sait-il ? Il ouvre la boîte et sort la bille.

Invariablement dans les explorations suivantes, il effectue le même parcours de recherche tout en prenant les boîtes, en les secouant et en les ouvrant pour voir ou non l'objet. Ses réponses ne consistent qu'à ouvrir les boîtes et à montrer l'objet."

"Ridouane (5,5) prend la boîte verte et dit "non". Il l'ouvre alors et "il est pas dedans". Il prend la boîte noire, la secoue et écoute longuement le bruit. Il ouvre la boîte : "oui".

"Mabrouk (6,3) se précipite sur une première boîte qu'il secoue. Nous lui demandons si l'objet s'y trouve : il ouvre alors la boîte et dit "rien". Il continue ainsi jusqu'à s'emparer de la dernière boîte, il la secoue : "je l'ai crouvé". Comment sait-il ? Il secoue énergiquement la boîte à son oreille, l'ouvre et nous montre l'objet."

Ces enfants, bien qu'ils aient perçu la présence de l'objet via le bruit, ne reconnaissent sa présence qu'après avoir ouvert la boîte, vu l'objet et cela systématiquement. Ainsi dans leurs explications, ils ne peuvent prendre en compte l'indice bruit et leur certitude ne s'effectue qu'à la vision de l'objet. En conséquence, nous observons un décalage entre l'action de secouer, et la non prise en compte de l'action au niveau de la représentation de la situation : le bruit restant au niveau sensori-moteur et la vue de l'objet tenant lieu d'explication et de preuve.

Que penser également de la réponse de Mabrouk qui, après avoir secoué la boîte à son oreille nous répond ceci : "pasque je l'ai crouvé pas ici, pas ici,... là" ? Ne prenant pas en compte le bruit dans son explication, il applique en revanche une explication découverte et mise en place dans la situation précédente : recherche sous des coussins. Nous obtenons encore un décalage entre la conduite consistant à secouer la boîte et le raisonnement, garant de la représentation et consistant à évoquer la différenciation des positions. Mikrabane et Ferdi nous proposent aussi ce type de décalage vertical.

"Mikrabane (7,5) prend une autre boîte qu'elle secoue. Comme elle entend du bruit, elle l'ouvre avec précipitation en criant : "il est là" Comment savait-elle ? "parce que j'ai trouvé ça... après ça..." ; elle donne les différentes positions des boîtes. Nous insistons, elle montre alors l'objet."

Ferdi (6,0) prend une autre boîte, la secoue, l'ouvre et trouve l'objet. Nous lui demandons comment il a fait pour trouver : "je reviens là, il montre la première boîte et après je reviens là."

Dans la suite de l'expérimentation, nous aurons l'occasion de découvrir encore ce type de réponse. A notre sens, cela pourrait provenir du besoin du sujet de répéter afin de s'approprier un schème : que celui-ci soit sensori-moteur ou représentatif. En conséquence les réponses s'apparenteraient à une assimilation répétitive représentative fondée sur un besoin qui nous prouve que ces enfants ne possèdent pas le schème "chercher" de façon sûre, plus précisément de chercher en plusieurs endroits. Ainsi, ils en sont à l'incorporation d'objets de plus en plus variés, à la conduite de différenciation des positions mise en place dans les situations-problèmes précédentes.

Nous pourrions alors prendre en compte le besoin de répétition comme un indice clinique révélateur soit d'un palier d'équilibration propre à l'acquisition d'un schème ou d'un système de schèmes nouvellement acquis, soit d'une pauvreté d'accommodation du sujet.

Pour en revenir à notre deuxième conduite consistant à secouer une boîte et à n'affirmer la présence de l'objet qu'après l'avoir vu, Ridouane (5,5), après l'avoir attentivement écouté, ne va plus du tout en tenir compte dans sa recherche. Il ne cherchera l'objet qu'en ouvrant chacune des boîtes. Nous pensons de fait que l'action de secouer par inadvertance et causant le bruit peut ne pas être intégrée à la recherche par prédominance de la construction de l'objet au niveau de la vision par rapport à l'audition. Et/ou encore peut-il s'agir d'assimilation fondée sur le besoin répétitif de l'enfant de découvrir en ouvrant les boîtes ?