II. Les textes de Giono et les « catégories » de l'autobiographie

Vu que les textes de Giono ne portent pas de sous-titres génériques (roman, essai, nouvelle, autobiographie...), il est difficile pour le lecteur de leur donner un statut déterminé et de leur appliquer, en conséquence, les normes classiques propres à chaque genre.

Giono a peut-être volontairement écarté de telles indications pour, éventuellement, laisser toute liberté d'interpréter au lecteur, mais surtout pour éviter, à notre avis, de confiner ses oeuvres dans un cadre rigide et en même temps réducteur; ce qui serait contraire à l'esprit d'ouverture que nous savons animer Giono, et donc contraire au sens même de la création chez lui. C'est probablement donc par un parti pris de liberté, qui se manifeste par exemple par le caractère polysémique et plurivalent de ses oeuvres, que l'auteur a choisi de se passer de sous-titres.

On a déjà noté que sur certains détails, les textes de Giono, par la mise en oeuvre de procédés multiples, dont certains sont propres à chaque texte, présentent des écarts par rapport à l'autobiographie, telle qu'elle est définie par certains théoriciens du genre. Essayons maintenant de voir comment et dans quelles mesures ces textes s'adaptent à certaines « catégories » d'écriture (nous retenons ici ce terme de « catégorie » même s'il n'est peut-être pas tout à fait approprié) qui sont plus ou moins proches de l'autobiographie, et en même temps qui s'en démarquent. Parmi ces « catégories », on peut citer : « le récit de vie », « l'autofiction », « le roman autobiographique », etc. Les appellations proposées par la critique sont multiples. Les définitions le sont aussi. Retenons celles que propose Philippe Lejeune et voyons comment et de quelle manière l'écriture de Giono se démarque un peu de ces différentes « catégories ».