Si nous avons choisi d’étudier le thème du mal de façon détaillée à travers l’analyse d’un texte comme Le Moulin de Pologne , c’est parce que ce roman réunit, à notre avis, trois formes de mal. La première est une variante du mal qu’on retrouve dans les textes d’avant 1939. Ce mal a souvent pour origine une force naturelle qui dépasse celle des hommes et qui se manifeste par exemple sous forme d’incendie (Colline ) ou d’inondations (Batailles dans la montagne ). Cette forme s’appelle ici le « Destin » qui frappe la famille des Coste depuis cinq générations. La deuxième est d’origine humaine. Elle est liée à la méchanceté des hommes et à leur « noirceur ». La troisième se manifeste au niveau individuel. C ’est un mal intérieur qui peut être causé par l’ennui ou qui peut provenir d’un vide affectif. Pour y remédier, le personnage peut avoir recours aux formes diverses du divertissement (même au crime) ou à la pratique d’une passion dévorante. Ces deux dernières formes du mal distinguent la plupart des romans de la deuxième manière.
Dans Le Moulin de Pologne , il est possible de déceler ces trois formes du mal chez M. Joseph qui lutte à la fois contre le Destin, contre la méchanceté des hommes et contre un mal intérieur. Faisant partie de ces « âmes fortes », il est pourvu d’un caractère exceptionnel qui l’aide à déployer ses forces morales et psychologiques pour mener à bout sa lutte sur plusieurs fronts.