IV. Les constantes

Nous avons vu en quoi consiste la mutation dans la seconde moitié de l’oeuvre de Giono. Nous avons essayé de mettre en évidence les différents points du changement. Mais l’oeuvre de Giono forme un tout. Au-delà et en dépit des différences entre les textes d’avant et d’après-guerre, elle forme une unité. C’est cet aspect de la problématique de l’écriture chez Giono que nous nous proposons maintenant d’examiner.

Cette unité est assurée par :

  1. La reprise, dans certains textes, de thèmes, d’images ou d’idées qui ont été déjà évoqués dans des textes antérieurs.

  2. La réapparition quelquefois des mêmes personnages ou de personnages qui portent le même nom.

  3. La rédaction quelquefois d’une partie d’un texte qui constitue une sorte de suite ou de dénouement à un texte précédent.

  4. Le besoin qu’on trouve assez souvent chez Giono d’écrire des « préfaces » ou des « postface » à des oeuvres déjà publiées, où il donne son interprétation, sa « lecture », de ces oeuvres. Ce qui permet d’actualiser celles-ci et de leur donner souvent des significations nouvelles. Giono procède de la même façon dans les différents entretiens qu’il accorde.

  5. l’évocation de la vie ou de l’oeuvre d’autres écrivains.

Voyons ces points en détail.

Notons tout d’abord que certains de ces points ont été déjà partiellement évoqués au cours de l’analyse de certains textes. Si nous y revenons encore, c’est pour montrer qu’il y a une continuité dans l’oeuvre de Giono.

D’autre part, nous regroupons ces différents points en trois rubriques essentielles auxquelles nous donnons comme titres des termes empruntés à Genette. Ce sont les termes d’« intertextualité », de « paratextualité » et de « métatextualité »684 pour désigner respectivement :

  1. Les reprises (ou le renvoi) dans une oeuvre à des éléments d’autres oeuvres qui l’ont précédée.

  2. Le rapport d’une oeuvre avec ses préfaces ou ses postfaces.

  3. Le rapport d’une oeuvre de Giono avec des textes d’autres auteurs.

Notes
684.

Rappelons que pour G. GENETTE, l’« intertextualité » c’est « une relation de coprésence entre deux ou plusieurs textes, c’est-à- dire, eidétiquement et le plus souvent, par la présence effective d’un texte dans un autre ». Le « Paratexte » désigne les « titre, sous-titre, intertitres; préfaces, postfaces, avertissements, avant-propos, etc.; notes marginales, infrapaginales, terminales; épigraphes; illustrations; prière d’insérer, bande, jaquette, et bien d’autres types de signaux accessoires, autographes ou allographes, qui procurent au texte un entourage (variable) et parfois un commentaire, officiel ou officieux ». Enfin, la « métatextualité » est selon Genette « la relation, on dit plus couramment de "commentaire", qui unit un texte à un autre texte dont il parle, sans nécessairement le citer (le convoquer), voire, à la limite, sans le nommer ». Palimpsestes, Op. cit., respectivement p. 8, 9 et 10.