1. La métropolisation : un phénomène ambivalent de concentration et de diffusion

Le problème fondamental de la croissance urbaine durant ces dernières années est qu’elle procède pour une large part de l’exurbanisation des ménages et des activités. Se pose alors la question du devenir de la source de ces flux (les agglomérations) ainsi que de leur destination (les franges périurbaines) ; question fondamentale s’il en est car elle porte directement sur l’avenir même des villes. L’interprétation de cette dynamique donna lieu à de nombreux débats157 souvent passionnés, ce qui se conçoit aisément, et cette première section nous permettra d’en rendre compte, du moins partiellement. Nous n’avons pas, en effet, la prétention de vouloir présenter ici la totalité des positions développées. Recherchant moins l’exhaustivité que l’exemplarité des thèses exprimées, nous n’en retiendrons que quelques-unes unes, celles qui, à notre sens, ont avancé des options ou des appréciations nettement différenciées.

Ce rapide exposé nous permettra de replacer notre propos dans un cadre intellectuel plus large. Il nous conduira, également, à constater combien la manière de lire les dynamiques urbaines peut influer sur les conclusions des analyses avant même qu’elles ne soient menées. Les dynamiques urbaines et, en l’espèce, la métropolisation et la périurbanisation, si l’on veut bien pour l’instant différencier ces deux termes, sont en effet bien souvent réduites au rang de phénomènes univoques. La métropolisation serait une dynamique centripète, la périurbanisation un mécanisme centrifuge.

Réduire des processus à leurs conséquences physiques les plus immédiates est sans nul doute utile et nécessaire à l’investigation empirique, mais ainsi simplifiés, comment ne pas aboutir, in fine, à des interprétations plus ou moins teintées de catastrophisme ? Comment ne pas lire ces dynamiques comme des ruptures, des déstructurations ou des désorganisations ? Comment ne pas conclure, en l’occurrence, que la métropolisation est à même d’engendrer la désertification de la majeure partie du pays pour former quelques mégalopoles et, à l’inverse, que la périurbanisation vide les agglomérations de leur substance, pour dessiner la suburbia à l’horizon des mutations urbaines ?

Somme toute, cette première section nous amènera bien au-delà de la simple présentation de quelques interprétations quant au sens de ces processus et quant à l’avenir des villes que cela suggère. Elle nous invitera, du moins est-ce notre ambition, à entr’apercevoir, à travers quelques cas spécifiques, combien les réductions opérées pour lire le réel peuvent influer sur l’image que nous avons de ce même réel. Cela nous permettra, en définitive, d’opérer un choix tout à la fois raisonné et étayé quant à la manière dont nous chercherons, nous-mêmes, à appréhender les dynamiques en cours.

Notes
157.

Se reporter notamment à Ascher F ., 1998.