1.2.1 Une tertiairisation de l’emploi à tous les niveaux de la hiérarchie urbaine

A travers les secteurs d’activités traditionnels de l’INSEE (annexe E), une lecture synthétique de l’évolution de l’emploi par grands types d’unités urbaines nous permet d’apercevoir la montée en puissance du secteur tertiaire sur l’ensemble de la hiérarchie urbaine.

Dans les bourgs, les petites villes et les villes moyennes (graphiques ci-dessous), l’évolution fut relativement similaire. Les emplois industriels et agricoles ont eu tendance à baisser légèrement ; les seconds d’ailleurs bien plus que les premiers. Seules les petites villes ont bénéficié d’une légère croissance de l’industrie au cours de cette période. L’ensemble du secteur productif n’est cependant pas en recul, car nous avons assisté dans le même temps à un essor léger mais généralisé de l’agro-alimentaire. Par-delà les évolutions économiques globales, il semble donc que ces niveaux intermédiaires et de base de la hiérarchie urbaine maintiennent, relativement, leur rôle traditionnel de centre de production matériel.

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Graphique 29 : Evolution de l'emploi dans les bourgs de 1968 à 1990 (grille ternaire).
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Graphique 30 : Evolution de l'emploi dans les petites villes de 1968 à 1990 (grille ternaire)
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Graphique 31 : Evolution de l'emploi dans les villes moyennes de 1968 à 1990 (grille ternaire).

Les emplois liés au commerce et aux transports – télécommunications progressent pour leur part mais dans une bien moindre mesure que les services. Ce sont ces derniers, en effet, qui ont connu la croissance la plus importante et, d’ailleurs, selon une intensité relativement similaire à ces trois premiers niveaux de la hiérarchie urbaine. L’essor des services non marchands fut partout plus conséquent que celui des services marchands et financiers, ce qui semble indiquer que la puissance publique a joué un rôle considérable dans cette tertiairisation de l’emploi. N’est-ce pas elle, en effet, le principal producteur ou le principal financeur des services non-marchands ?

Autant que l’évolution de l’emploi nous permette d’en juger, il semble, en définitive, que ces niveaux subalternes de la hiérarchie urbaine aient réussi à maintenir, plus ou moins, leur rôle traditionnel de centre de production et même à accroître leur fonction tout aussi classique de centre de services. N’ont-ils pas réussi à développer leur secteur tertiaire et plus particulièrement encore celui relevant des secteurs public et parapublic ?

Au niveau supérieur de la hiérarchie urbaine (Saint-Etienne et Lyon), l’évolution de l’emploi fut sensiblement différente. Les emplois industriels ont baissé partout sauf dans la banlieue lyonnaise. Cette dernière semble ainsi pérenniser, voire renforcer son rôle en ce domaine, car ce léger essor se produit alors que les autres niveaux de la hiérarchie urbaine ont enregistré une baisse quasiment généralisée. Outre l’industrie, le secteur agro-alimentaire, les transports et les télécommunications progressent également, ici comme ailleurs, mais seulement dans les banlieues de ces deux villes.

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Graphique 32 : Evolution de l'emploi dans l'agglomération stéphanoise de 1968 à 1990 (grille ternaire).
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Graphique 33 : Evolution de l'emploi dans l'agglomération lyonnaise de 1968 à 1990 (grille ternaire).

De fait, ce qui différencie ces niveaux supérieurs de la hiérarchie urbaine du reste des villes de la RUL, c’est essentiellement l’importance de l’essor des services marchands et financiers. Contrairement aux noyaux urbains secondaires, la croissance de ces derniers fut ici globalement supérieure à celle des services non-marchands. A Lyon et Saint-Etienne, la tertiairisation de l’emploi ne semble donc pas principalement renvoyer à l’action de la puissance publique, mais aussi et surtout à des logiques de marché, à des jeux et à des stratégies d’acteurs privés.

Si l’évolution des agglomérations lyonnaises et stéphanoises se différencie nettement de celle des niveaux intermédiaires et de base de la hiérarchie urbaine, elle ne fut pas pour autant similaire dans l’une et l’autre de ces villes. La croissance du tertiaire fut, d’une part, beaucoup plus importante dans la métropole qu’à Saint-Etienne. D’autre part, seule la primatiale des gaules a bénéficié d’un essor de la production et de la distribution d’énergie (grâce notamment au développement des différentes directions régionales d’EDF et de GDF). Somme toute, les services privés et certaines activités de commandement et d’organisation de la production et des échanges (distribution d’énergie) semblent s’être bien plus développés à Lyon qu’à Saint-Etienne, ce qui pourrait suggérer une concentration des fonctions les plus hautes dans la métropole.

Ces premiers éléments nous permettent, en définitive, d’apercevoir l’importante tertiairisation de l’emploi sur l’ensemble de la hiérarchie urbaine, tertiairisation qui ne s’est donc pas toujours accompagnée d’un déclin du secteur industriel. Ils nous permettent également de souligner que cette croissance des services fut sensiblement différente dans le bas et dans le haut de la hiérarchie urbaine. Si la puissance publique semble être principalement en cause dans les niveaux subalternes, c’est le secteur privé, qui semble essentiellement à l’oeuvre aux échelons supérieurs.