1.2.2 Concentration des services de hauts niveaux et diffusion des services banaux

Une analyse sur la dernière période intercensitaire à travers la grille STRATES (annexe F) nous permet d’aller plus avant dans la recherche de la nature et du sens des évolutions constatées. Dans les bourgs et les petites villes (graphiques ci-dessous), l’évolution fut sensiblement similaire. D’une part, les emplois de production matérielle ont bénéficié d’une croissance globale, malgré la baisse du secteur agricole dans les bourgs, et d’autre part les emplois concourant indirectement à la production matérielle (transports, services divers aux entreprises, etc.) ont également connu une croissance qui fut même supérieure à celle enregistrée par la sphère de la production matérielle.

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Graphique 34 : Evolution de l'emploi dans les bourgs de 1982 à 1990 (grille STRATES).
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Graphique 35 : Evolution de l'emploi dans les petites villes de 1982 à 1990 (grille STRATES).

Il semble donc que ces niveaux de base de la hiérarchie urbaine maintiennent, plus ou moins, leur fonction héritée de centre de production concrète, ce qui confirme les impressions laissées par l’analyse précédente. Mais il semble également que les bourgs et les petites villes développent des emplois de production indirecte (logistiques, services économiques et financiers), ce qui tendrait à indiquer que leur rôle dans le cycle de production n’est pas un simple archaïsme amené à disparaître à moyen ou long terme. S’ils développent de nouvelles activités concourant à la production, cela ne signifie-t-il pas qu’ils s’adaptent plus ou moins aux mutations en cours ? Cela n’implique-t-il pas, en d’autres termes, qu’ils font bien mieux que résister aux transformations économiques, mais qu’ils s’y insèrent, même si les données dont nous disposons ne permettent pas de préciser la nature de cette insertion et leur rôle exact dans le cycle de production ? Cependant le bon sens nous conduit à postuler que ces emplois indirectement liés à la production sont loin d’être toujours de très haut niveau.

Sur le plan des services aux ménages, les bourgs et les petites villes ne détiennent toujours qu’un nombre négligeable d’emplois de reproduction sociale élargie, c’est-à-dire liés à des services aux ménages de haut niveau. Le total cumulé à chacun de ces niveaux ne dépassant pas les 2.000 emplois, nous n’avons donc pas pu les prendre en compte, mais cela n’en est pas moins lourd de sens.

A l’inverse, nous pouvons relever toute l’ampleur de la croissance de la reproduction sociale simple, c’est-à-dire des services aux ménages plus ou moins basiques. Dans ces deux catégories de villes, cet essor fut principalement l’oeuvre des secteurs publics et parapublics ce qui confirme, une nouvelle fois, toute l’importance de la puissance publique dans le développement du tertiaire en ces niveaux de base de la hiérarchie urbaine.

Si nous portons maintenant notre regard sur les échelons supérieurs de la hiérarchie urbaine (graphiques ci-dessous), c’est-à-dire les villes moyennes, Saint-Etienne et Lyon, nous pouvons apercevoir que les emplois de production matérielle baissent globalement, hormis dans les secteurs agro-alimentaires dans les villes moyennes et à Saint-Etienne, ainsi que dans le secteur du bâtiment et du génie civil dans la banlieue lyonnaise. Parallèlement à ce déclin, nous assistons à une croissance très nette des emplois de production abstraite, mais avec des différences sensibles.

Sur le plan de la reproduction sociale, les différences entre les trois niveaux supérieurs de la hiérarchie urbaine sont encore plus visibles. Alors que la croissance des services de base aux ménages (RSS) et des services plus élaborés (RSE) fut similaire dans les villes moyennes (respectivement +21,46% et +21.12%), l’essor de la reproduction sociale élargie a été nettement plus important que celui de la reproduction sociale simple à Saint-Etienne (RSE : + 32,59% contre RSS : + 11,09%) et dans le centre de Lyon (RSE : + 17,78% contre RSS : + 3,88%). Seule la banlieue métropolitaine s’est comportée à l’inverse avec un gonflement plus important de la reproduction sociale simple, même si celui de la reproduction sociale élargie a été loin d’être négligeable (RSE : + 17,23% contre RSS : + 17,23%).

Il semble donc, globalement, que plus la ville était importante et plus elle a bénéficié d’un essor conséquent de ses services aux ménages de haut niveau. Signalons d’ailleurs, que ces évolutions étant exprimées en valeur relative, cette évolution traduit non seulement une transformation conséquente de la structure de l’emploi à chaque niveau de la hiérarchie urbaine, mais également, si nous traitions de valeur absolue, un véritable mouvement de concentration de ce type d’emplois dans les villes les plus importantes.

Il apparaît, en outre, comme le montre le graphique 38 que la sphère privée n’est pas étrangère à ce phénomène centripète. Dans la métropole lyonnaise, c’est bien la reproduction sociale élargie privée qui a connu la croissance la plus conséquente, ce qui nous renvoie de nouveau à l’analyse précédente sur les secteurs d’activité traditionnels de l’INSEE.