I – DÉFINITION COURANTE ET DÉFINITION SCIENTIFIQUE

Le premier axe est celui qui distingue une définition courante d’une définition scientifique.

Cette distinction est clairement marquée dans le PR, où une définition identifiée comme Cour. s’oppose à une autre précédée de la mention Phys., chim. Dans le GR, les mentions sont également explicites, mais la relation n’est plus la même : la première définition cumule en effet les deux mentions Phys., chim. et cour., contenant en principe la seconde qui ne reprend que la mention Cour. Le rôle que jouent ces définitions dans l’organisation des articles est différent également. Dans le GR, la définition « scientifique et courante » est la première définition qui ouvre l’article, quoiqu’elle soit située au second niveau de la structuration, le premier nœud étant vide comme on l’a vu précédemment : la définition dite « courante » qui appartient au même niveau de structuration, apparaît en second. Dans le PR, c’est la définition courante qui ouvre l’article : la définition scientifique, précédée du losange caractéristique de ce type de subdivision, apparaît seulement comme une « nuance de sens » qui s’attache à la première définition. Même si la taille réduite de l’article impose des raccourcis de ce type, celui-ci n’en résulte pas moins d’un choix fait parmi d’autres : la seconde définition « ce fluide en mouvement » par exemple aurait pu figurer à cette place, tandis que la définition scientifique aurait pu donner lieu à une définition autonome.

Le GLLF et le TLF ne proposent aucune mention spécifique pour distinguer une définition courante d’une définition spécifique. C’est dans le contenu même des définitions et dans le rapprochement qu’on peut faire avec celles du PR et du GR que l’on peut discerner une distinction entre les deux. Ainsi dans le TLF, la toute première définition, au plus haut niveau de la structuration, peut être considérée comme plutôt scientifique, bien qu’elle ne retienne pas certains traits – relatifs en particulier à la composition de l’air – donnés par les deux dictionnaires qui marquent cette définition en tant que telle. Mais on ne peut dire qu’elle s’oppose à une définition courante. D’abord parce que la structuration, très ramifiée, propose un grand nombre de définitions subordonnées, et surtout parce que c’est de cette première définition que dérivent explicitement toutes les autres, données comme autant de points de vue différents sur ce même objet premier : c’est ce qu’exprime la reprise au second niveau de la structuration (en A et B), et même au troisième (en A1, 2 et 3), de la construction « l’air en tant que... » qui fait varier le trait subséquent à partir d’une reprise anaphorique de la première définition. On trouve bien une mention Sc. et techn. en C, mais sans qu’apparaisse une véritable définition, les nœuds immédiatement subordonnés se présentant sous la forme d’un commentaire syntaxique suivi d’un énoncé métalinguistique :

  1. [Accompagné d’un adj. déterminatif] Air sert à désigner [...]
  2. [Comme compl. de n.] Air sert à former des syntagmes désignant [...]

Dans les deux cas, on dresse l’inventaire de termes, représentés par des expressions ou des syntagmes, relatifs à diverses espèces d’air (1) ou à des instruments fonctionnant à l’aide d’air ou ayant pour finalité de traiter l’air (2).

Le GLLF enfin, si on le compare aux trois autres dictionnaires, semble escamoter la définition scientifique. Le premier énoncé définitoire :

‘Fluide gazeux qui forme l’atmosphère’

correspond plutôt aux définitions dites courantes du PR et du GR dont il reprend des traits constants. Toutefois la suppression du trait « humain » (« que respirent les êtres vivants ») présent dans la définition courante de ces deux autres dictionnaires, son report et son étoffement dans la définition suivante :

‘Ce gaz en tant que nous sommes baignés par lui, que nous le respirons’

montrent que, si l’on se place dans la seule perspective du GLLF, la première définition serait plutôt scientifique par rapport à la seconde : ce qui se trouve confirmé par les exemples choisis (relatifs à la composition, à la pesanteur, à la raréfaction de l’air), l’évocation de l’ancienne physique et le terme air comprimé qui clôt le paragraphe. Dans ce cas, la définition qu’on pourrait dire courante apparaît comme dérivée de la définition donnée comme scientifique, qu’elle reprend anaphoriquement : on retrouve ici une forme simplifiée de la structuration du TLF.