II – SIGNIFICATIONS « MÉTÉOROLOGIQUES »

Dans un très grand nombre d’occurrences, l’air, sans perdre sa nature d’élément, comme nous le verrons, se trouve associé à des considérations qu’on peut appeler météorologiques, et qui se trouvent structurées à différents niveaux. Je tiens à préciser que, dans toute cette partie, je serai amenée à « traduire », en quelque sorte, en mots d’aujourd’hui des significations anciennes. Ainsi, le mot météorologie recouvre, pour nous, une discipline scientifique qui s’est développée en tant que telle au XIXe siècle, et, en ce qui concerne les climats, on est passé de la théorie géographique, qui prévaut au XVIIIe siècle, à une théorie proprement météorologique (le mot climatologie est daté de 1834) 340 .

Dans ces emplois relatifs à la météorologie, l’air est rattaché explicitement à un lieu. Je fais tout de suite l’état des lieux le plus souvent cités. Ce sont bien sûr ceux où résident Mme de Sévigné et Mme de Grignan. On sait que Mme de Sévigné se partageait entre Paris (elle s’installe fin octobre 1677 à l’Hôtel Carnavalet qu’elle occupera jusqu’à sa mort 341 ), l’abbaye de Livry qui était tenue par son oncle, l’abbé de Coulanges, et qui se trouvait à quatre lieux au nord-est de Paris, sur la route de Meaux 342 , et son château des Rochers en Bretagne, près de Vitré. Quant à sa fille, elle épouse en janvier 1669 François de Grignan, qui est nommé à la fin de la même année lieutenant-général pour le Roi au gouvernement de Provence, et elle quitte sa mère pour la Provence le 4 février 1671. Elle s’installera en juillet 1672 à Grignan, près de Nyons, dans un château – détail qui aura son importance, comme nous le verrons – construit sur un mamelon qui domine de 33 mètres toute la plaine environnante. Mme de Grignan séjourne aussi à Aix. En raison de ses fonctions, son mari était appelé aux Assemblées, et il avait son habitation dans l’ancien palais du roi René, qui abritait le Parlement. La mère et la fille sont séparées, mais cette vie d’éloignement est ponctuée d’assez longues retrouvailles, quand Mme de Grignan séjourne à Paris, ou quand Mme de Sévigné s’installe à Grignan. Le mot air est donc souvent associé à ces lieux, qu’il s’agisse de régions (Ile-de-France, Provence), de villes (Paris, Livry, Aix) ou de domaines (les Rochers). Les occurrences les plus nombreuses touchent la Provence et Grignan, dont le climat donnait bien du souci à Mme de Sévigné... D’autres lieux occasionnels, liés à des déplacements ou des voyages, sont également mentionnés. Selon la signification « météorologique » à laquelle on a à faire, l’association du mot air et d’un nom de lieu se réalise sous différentes formes.

Notes
340.

. Pour l’histoire de ces notions, on se reportera à D. Parrochia (1997), et pour celle des mots au Dictionnaire historique de la langue française.

341.

. Mme de Sévigné loua une maison rue de Thorigny de 1669 à 1672, puis elle habita de 1672 à 1675 rue des Trois-Pavillons (plus tard rue Elzévir), mais, ne pouvant loger correctement les Grignan et leurs gens, elle s’installa dans une maison plus grande située rue Courtevilain (rue Montmorency) appelée la Courtaude. Cette solution n’étant pas satisfaisante, l’on se décida pour Carnavalet.

342.

. À la mort de l’abbé en 1687, cette abbaye fut donnée à l’ancien évêque de Nîmes : Après avoir pleuré l’abbé, j’ai pleuré l’abbaye, dit Mme de Sévigné dans sa lettre du 13 novembre 1687 (t. 3, l. 987, p. 333).