BELLINGEN (FLEURY DE)

J’ai gardé pour la fin ce passage étonnant de Fleury de Bellingen, professeur de français à La Haye :

‘Si ta voisine lui ressemble si elle est belle, et qu’elle n’ait point d’Ame et de vie, c’est-à-dire ni conscience ni vertu, j’en fais moins d’état que d’une statue de marbre : les traits que les yeux chassieux admirent en sa face sont les indices apparents des vices de son cœur : son visage est le tableau naïf de l’amitié, de la haine, du désir, de l’aversion, de la joie, de la tristesse, de l’ennui, de la malice, de la fureur, de la jalousie, de la honte, de la concupiscence, de la crainte, de l’impatience, du désespoir, et des impures espérances, bref de toutes les passions immodérées qui gouvernent son esprit. C’est une montre d’horloge, qui marque les moments et les heures du temps, les mouvements et les ressorts duquel sont cachés dans le cœur. C’est un air (aussi dit-on l’air du visage) où s’élèvent en diverses figures les météores de nos passions ; où paraissent visibles toutes les couleurs invisibles, et tous les changements secrets de nos sentiments, et nous montrent quel temps il fait, même nous présagent quel temps il fera en l’intérieur, et en l’extérieur des Personnes que nous contemplons 882 . (Les illustres proverbes historiques ou Recueil de diverses questions curieuses, pour se divertir agréablement dans les Compagnies, 1655, p. 165-166)’

dans lequel la métaphore météorologique (à travers la signification « air-temps ») est ouvertement filée, et mise en relation avec l’air du visage lui-même, qu’on pouvait croire, en raison son éloignement avec la métaphore d’origine, à l’abri des variations de l’atmosphère et des intempéries...

Notes
882.

. Je reproduis les caractères d’origine, sans ajouter de caractère gras.