IV. INTERPRETATION DES RESULTATS ET DISCUSSION

4.1. Interprétation sur les caractéristiques des groupes

Au niveau du sexe, les trois groupes sont complètement comparables ( p > 0,99 ). Par contre, il existe une différence d’âge significative entre le groupe de TOC, le groupe de contrôle non-clinique et le groupe de phobie sociale. C’est à dire que le groupe de phobie sociale est plus jeune que les deux autres groupes bien qu’il n’existe pas de différence entre le groupe de TOC et le groupe de contrôle non-clinique. Cela nous oblige pour comparer les variables psychométriques à utiliser une Ancova, avec l’âge comme covariant, afin d’obtenir les résultats statistiques plus objectifs. En fait, l’analyse montre que la différence d’âge n’influence pas les résultats de comparaisons.

Quand on compare d’autres caractéristiques entre le groupe de TOC et le groupe de phobie sociale, on ne trouve pas de différence statistique sur l’état professionnel ( p = 0,19 ), sur la dépression associée ( p = 0,59 ), sur le trouble panique associé ( p = 0,69 ), sur les médicaments actuellement pris ( p = 0,11 ) ou sur les troubles de la personnalité associés en trois classes ( p = 0,68 ). Par contre, par rapport au groupe de phobie sociale, le groupe de TOC a plus de sujets ayant un niveau d’étude plus bas et moins de sujets ayant un niveau d’étude plus haut (p=0,0032), et plus de sujets mariés et divorcés et moins de sujets célibataires (p=0,015). Mais l’ANOVA à deux facteurs confirme que ces différences n’influencent pas les résultats de comparaisons.

Il est intéressant de noter que, dans notre échantillon, deux tiers des patients atteints de TOC (32/48) et 77,8% des patients atteints de phobie sociale (28/36) présentent au moins un trouble de la personnalité. Ces résultats montrant la comorbidité des troubles de la personnalité chez les phobiques sociaux et chez les obsessionnels compulsifs ressemblent à ceux existant dans les travaux de la littérature (Johnson et coll., 1995, Baer et coll., 1992, Black et coll., 1993, Bejerot, Ekselius et von Knorring, 1998, Matsunaga et coll., 1998).

De plus, dans le groupe de TOC de notre échantillon, les troubles de personnalité les plus fréquemment observés sont le trouble de la personnalité obsessionnelle-compulsive (21/48, soit 44%) et la personnalité dépendante (18/48, soit 38%). Ce qui est différent de certaines études (ex. Joffe et coll., 1988, Matsunaga et coll., 1998) mais proche à d’autres (ex. Rasmussen et Tsuang, 1986, Black et coll., 1993, Bejerot, Ekselius et von Knorring, 1998). Joffe et coll. (1988) ne rapportent que 4,4% (1/23 cas) des patients atteins de TOC qui présentent un trouble de la personnalité obsessionnelle-compulsive associé, ce qui est très bas dans les travaux publiés. Ils supposent que cela est sûrement lié au problème de l’instrument d’auto-évaluation dans lequel les traits compulsifs sont sous-rapportés. Dans notre étude, le diagnostic des troubles de personnalité est établi basé sur la liste simple des troubles de personnalité (mais en entretien structuré) selon le DSM-IV; le diagnostic de la personnalité obsessionnelle-compulsive et de la personnalité évitante est donné avec une liste détaillée des caractères selon les critères du DSM-IV dans un entretien structuré. Nous pouvons donc les considérer valables. L’étude de Bejerot et coll. (1998) a trouvé que 36 % de patients atteints de TOC présentent un trouble de la personnalité obsessionnelle-compulsive. Pour eux, il existerait une relation spécifique entre le trouble de la personnalité obsessionnelle-compulsive et les TOC. Le résultat de notre étude semble supporter cette hypothèse.

Par contre, Joffe et coll. (1988) et Black et coll. (1993) rapportent que la moitié de patients atteints de TOC dans leurs échantillon présentent un trouble de personnalité dépendante. Dans notre échantillon, le taux du trouble de la personnalité dépendante associé au TOC est atteint à 38 %. Ce qui montre le rôle important de la personnalité dépendante dans le TOC.

Tandis que dans le groupe de phobie sociale de notre échantillon, c’est le trouble de la personnalité évitante qui est le plus fréquemment observé (26/36, soit 72%). Ce résultat est identique à ceux que l’on trouve dans plusieurs études ( Schneier et coll., 1991, Herbert et coll., 1992, Emmanuel et coll., 1993 et Cottraux et coll., 1997). Jobnson et coll. (1995) concluent que le trouble de la personnalité évitante parmi des troubles de personnalité est le plus fréquemment trouvé chez les patients atteints de phobie sociale. Ces résultats mettent en évidence la relation particulière entre le trouble de la personnalité évitante et la phobie sociale.