Conclusion du chapitre.

Les analyses quantitatives et qualitatives, menées dans les trois sections de ce chapitre, ont permis de montrer que la politique d'endettement extérieur de l'Algérie a été articulée à la rente pétrolière. Le financement d'un vaste et ambitieux programme de développement n'a été possible que grâce au "boom" pétrolier et l'élargissement de la solvabilité extérieure qui a été conséquent.

Après plus d'une décennie et demie d'aisance financière, l’économie algérienne ne semblait toujours pas avoir développé les ressorts pour résister aux chocs d'origine exogène. La crise financière qui a fait suite au "contre-choc" pétrolier révèle plus que tout autre chose les difficultés structurelles de mise en place du système productif.

Instabilité socio-économique et difficultés financières extérieures se conjuguent et poussent les pouvoirs publics à engager des réformes dès la fin de la décennie quatre-vingts. En optant pour une démarche gradualiste, ils entendaient conserver toute leur autorité sur la conduite des réformes tout en espérant retrouver la confiance des bailleurs de fonds.

La faiblesse des moyens de paiements extérieurs eu égard aux besoins de financement croissants ont conduit l'Algérie à rééchelonner deux fois sa dette extérieure et accepter ainsi les injonctions du Fonds Monétaire International tant décriées la veille. La nouvelle phase de l'endettement qui s'enclenche avec le rééchelonnement laisse peu de liberté quant à l'utilisation des moyens libérés par ce dernier. Ils sont destinés à "assainir" la situation macro-financière.

Aussi importants soient- ils, ces moyens restent insuffisants pour mener de front une politique de redéploiement et d'élargissement d'un système productif immature, sous utilisé et vieillissant d'une part, et de s'acquitter d'un service de la dette qui reste contraignant d'autre part. Dans le moyen terme, l'Algérie devra s'accommoder d'une intégration à l'économie mondiale par le seul secteur des hydrocarbures qui jouera de plus en plus le rôle d'une enclave. Les secteurs industriels restants ne peuvent espérer affronter avec succès la concurrence des produits étrangers. Le risque d'un démantèlement d'une partie de leurs segments est bien réel.

Leur articulation, du point de vue financier, au seul secteur des hydrocarbures, qui absorbait systématiquement leurs difficultés financières, ne peut continuer à être assurée aujourd'hui compte tenu de la contrainte qu'exerce le service de la dette . Le risque de financer une enclave au détriment d'un redéploiement du reste de l’industrie est réel. On peut souligner, par ailleurs, que les prévisions relatives à la capacité de remboursement de la dette à partir de 1998 reposent sur le seul développement des exportations d’hydrocarbures.

Les stratèges de développement faisaient de l'articulation de la dette extérieure à la rente pétrolière une nécessité passagère. Convaincus de détenir la meilleure "recette" de développement, la mise en oeuvre du schéma des "industries industrialisantes" devenait un problème essentiellement financier. Dette et rente permettaient alors de financer un ambitieux programme qui ne tardera pas, selon les stratèges, de générer un surplus permanent, donc reproductible par le système productif projeté.

Il nous faut nous interroger sur le statut doctrinal de la rente et la dette. Le chapitre suivant nous permettra de préciser ce point.