2.2.1 - Le critère de reproductibilité chez D. RICARDO et K. MARX.

Dans la théorie de la valeur - travail, la détermination objective du prix présuppose une marchandise particulière. La question revient à distinguer les produits qui sont marchandises de ceux qui ne le sont pas. Il n'est pas dans notre intention d'exposer le concept de marchandise. Aussi, nous remettrons-nous à une définition qui semble faire autorité. Un produit n'est considéré comme marchandise que s'il répond au double critère d'une part, valeur d'usage et valeur d'échange, et s'il est reproductible d'autre part225. C'est ce dernier critère qui retiendra notre attention. D. RICARDO et K. MARX ont donné quelques indications.

RICARDO a très clairement circonscrit l'analyse de la valeur à la marchandise. La détermination du prix présuppose le travail qui constitue la substance commune de toutes les marchandises. De ce fait, les produits qui ne sont pas le résultat de l'activité humaine sont exclus du corps des marchandises. Le critère de différenciation, entre les produits qui sont marchandises et ceux qui ne le sont pas, est celui de la reproductibilité. Un produit résultant du travail humain peut être reproduit à l'infini. "Quand nous parlerons de marchandises, de leur valeur échangeable et des principes qui règlent leurs prix relatifs, nous n'avons en vue que celle des marchandises dont la quantité, peut s'accroître par l'industrie de l'homme, dont la production est encouragée par la concurrence et n'est contrecarrée par aucune entrave226.

Notre intérêt étant les hydrocarbures, le chapitre sur la rente foncière nous éclairera davantage. ‘"Quand je parlerai de rente dans la suite de cet ouvrage, je ne désignerai que ce que le fermier paie au propriétaire foncier pour le droit d'exploiter les facultés indestructibles du sol"’ 227. Ce passage indique, à la fois, que RICARDO élimine les produits miniers, car non reproductibles, mais aussi l'agriculture minière qui finit par épuiser le sol. Dans le cas de l'agriculture, la reproductibilité suppose l'injection de capital dans le sol pour préserver les facultés naturelles.

A la suite de D. RICARDO, K. MARX ne traite que des produits reproductibles. ‘« Le prix d'objets n'ayant en soi aucune valeur, c'est à dire n'étant pas le produit du travail, comme par exemple la terre, ou, du moins ne pouvant être reproduits par le travail, comme les antiquités, les chef d'oeuvres de certains artistes etc. peut être déterminé par les combinaisons très fortuites. Pour vendre un objet, il suffit uniquement qu'il soit monopolisable et aliénable »’ 228.

Pour la théorie de la valeur - travail, il est clair que le pétrole, comme tout autre stock sous terre, n'est pas une marchandise et par voie de conséquence n'a pas de valeur. La dépense de travail mort et vivant, concerne son extraction et non sa production. Alors comment fixe-t-on le prix d'une ressource en terre non reproductible ?

Notes
225.

P. SALAMA et J. VALLIER : Une introduction à l'économie politique. Maspéro, Paris 1979,

p. 9. Cf. aussi J. GOUVERNEUR, Eléments d'économie politique marxiste; Ed. Contradictions, Bruxelles 1978, p. 26.

226.

D. RICARDO, op. cité p. 26.

227.

D. RICARDO : op. cité, p. 58.

228.

A. MARSHALL : Principes d'économie politique, Paris 1971, Livre IV, Chap. 3, p. 237 cité par J.P. ANGELIER , op. cité, p. 39.