2.2.2 - Le coût de reproduction.

Il appartient à A. MARSHALL d'établir la différence qui existe dans la structure de prix des produits reproductibles et celle de ceux qui ne sont pas. ‘"Cette différence est illustrée par le fait que le prix de location d'une mine ne se calcule pas d'après les mêmes principes que celui d'une terre. Le fermier s'engage à rendre la terre aussi riche qu'il l'a trouvée : une société minière ne le peut pas. Aussi, tandis que la rente du fermier se calcule à l'année, la rente d'une mine consiste principalement en "redevances" proportionnelles aux quantités qui sont extraites des réserves accumulées par la nature"’ 229. ‘"Cette redevance par tonne de charbon, lorsqu'elle est exactement fixée, représente, dans la valeur de la mine, regardée comme une source de richesse future, la diminution causée par l'enlèvement d'une tonne de charbon dans ce magasin de la nature"’ 230.

L'idée essentielle qui ressort de la citation précédente est que la redevance doit être calculée de telle façon à dédommager le propriétaire de la mine, du gisement dans le cas du pétrole, de la diminution des réserves de son sous-sol. On parle alors de coût de reconstitution et de reproduction.

J.M. CHEVALIER définit le coût de reconstitution de la manière suivante : "En outre, la cession d'une ressource naturelle épuisable, doit être faite à un prix qui couvre non seulement les coûts de production et les rentes, mais aussi le coût de reconstitution du gisement. Celui-ci est égal à ce qui est nécessaire pour découvrir une quantité d'huile égale à la quantité cédée231. Cette redevance ou royalty devrait être ‘"égale au coût de l'exploration marginal mondial qui est bien représentatif de la valeur d'une tonne de brut en terre"’ 232.

Il est indéniable que la définition de l'auteur aide à mieux comprendre la structure et le niveau du prix du marché du pétrole. Le coût de reconstitution établit une nette différence entre le prix de production et le prix de reproduction. Ce dernier est égal au prix de production tel qu'il se dégage dans le processus de production le moins efficient auquel il faut ajouter les rentes de monopole. Remarquons que la notion de prix de reproduction nous renseigne mieux sur la grandeur des rentes de monopole. Elles sont données par la différence entre le prix de marché et la somme constituée des coûts marginaux de production et d'exploration d'une part, et le profit moyen d'autre part. Royalty et rente de monopole sont les deux fractions constituant le "tribut" de K. MARX.

Le calcul théorique du prix de cession du pétrole pose cependant des problèmes liés à la définition du coût de reconstitution. On peut avancer les remarques suivantes :

La notion de reproductibilité sous-jacente au raisonnement précédent est étroite. Dans le très long terme, on peut poser l'épuisement des gisements de pétrole comme une fatalité. Cela est encore plus vrai et dans un délai moins long pour un pays ne disposant que de réserves limitées.

On peut conclure en avançant que le prix de cession du pétrole reste tributaire de la conception que l'on se fait de la reproductibilité. On substitue dans le coût de reconstitution le pétrole au pétrole comme si celui-ci était physiquement reproductible. Par ailleurs, ce coût ne tient pas compte des autres sources d'énergie. En intégrant celles-ci dans le calcul, on pourrait connaître la limite vers laquelle le prix du pétrole devrait tendre d'une part et contourner la difficulté posée par la non - reproductibilité sachant que les nouvelles sources (solaire, nucléaire), sont reproductibles.

Notes
229.

Idem, p. 39.

230.

J.M. CHEVALIER : op. cité, p. 251.

231.

J.M. CHEVALIER : op. cité, p. 251.

232.

J.M. CHEVALIER : op. cité, p. 253.

233.

G. DESTANNE DE BERNIS : Relations économiques internationales, Dalloz, Paris 1977, p. 472.

234.

M. MEKIDECHE : Le secteur des hydrocarbures. OPU, Alger 1983, p. 22.

235.

M.E. BENISSAD : Eléments d'économie pétrolière. OPU, Alger 1981, p. 30.

236.

M.E. BENISSAD : op. cité, p. 69.