1.2.1 - la décennie soixante-dix.

Les chiffres du tableau n° 33 mettent en évidence l'évolution de l'absorption interne et celle de sa couverture par le PIB selon que l'on tient ou non compte de la production des hydrocarbures. Le rapport de l'absorption interne au PIBHH augmente continuellement exception faite de l'année 1971 qui est marquée par une baisse de la production des hydrocarbures due au différend algéro – français suite à la nationalisation des hydrocarbures. D'une moyenne de 124,66 % pour le premier plan, ce rapport passe à 146,66 % pour le second plan. Cette hausse s'explique essentiellement par celle du taux de l'investissement. Calculé sur la base du PIBHH, ce taux passe de 43 % en moyenne pour le premier plan à 71 % pour le second. Même avec les limites qu'impose le raisonnement en termes courants, l'effort d'investissement ne semble pas avoir été le fait d'une austérité puisque la part de la consommation finale dans le PIBHH passe de 82 à 86 % de la première à la seconde sous-période.

L'ampleur croissante du déficit en ressources par rapport à la seule production hors hydrocarbures nous laisse imaginer le poids direct (V.A des hydrocarbures) et indirect (la dette) de ces derniers dans l'effort d'accumulation.

Tableau n° 33 : Structure du financement de l'accumulation en millions de dinars courants et en % (1970-1979)
1970 1971 1972 1973 1970-1973 1974 1975 1976 1977 1974-1977 1978 1979 1970-1979
1. Produit intérieur brut 24.072,3 25.044,3 30.413,2 34.593,1 114.122,9 55.560,9 61.573,9 74.075,1 89.240,5 278.450,4
2. PIB hors hydrocarbures 20.858 22.753,9 25.961,6 28.140,9 97.714,4 37.138,6 46.006,2 54.436,1 63.647,6 201.228,5 80.350,6 94.687,5 4.769,81
3. V.A hydrocarbures 3.214,3 2.290,4 4.451,6 6.452,2 16.408,5 18.422,3 15.567,7 19.639 25.592,9 77.221,9 24.481 33.534,7 151.646,1
4. Cons. finale 17.022,9 18.380,1 21.564,6 22.822,8 79.790,4 31.653,3 39.422,2 45.179 56.207,8 172.462,3 65.474,6 75.964,5 393.691,8
5. Produit intérieur disp.
hors hydrocarbures
3.853,1 4.373,8 4.397 5.318,1 17.924 5.485,3 6.584 9.257,1 7.439,8 28.766,2 14.876 1.8.723 80.289,2
6. Invest. total 8.751,6 8.887,1 10.441,2 13.940,5 42.020,4 22.075,2 27.837,6 31.296,5 40.814 122.653,3 54.621,7 54.431,3 273.926,7
7. Absorption int. 25.774,5 27.267,2 32.005,8 36.763,3 121.810,8 53.728,5 67.259,8 77.105,5 97.021,8 295.115,6 120.369,3 130.395,8 667.418,5
8. Absorption int/ PIB % 107,07 108,88 105,24 106,27 106,74
9. Absorption int/ PIB
hors hydrocarbures %
123,57 119,84 123,28 130,64 124,66 144,67 146,2 141,64 152,44 146,66 149,81 137,71 140,81
10. Importations nettes 1.702,2 2.344,4 1.592,6 2.170,2 7.809,4 - 1.832,4 5.685,9 3.030,4 9.781,3 16.665,2 15.264,7 2.173,2 41.912,5
11. PID hors hydrocarbures
Invest. total en %
44 49 42 38 43 25 24 29 18 23 27 34 29
12. V.A hydrocarbures / Invest. total en % 37 26 42 46 39 83 56 62 58 63 45 62 55
13. Importations nettes / Invest. total en % 19 25 15 16 19 - 8 20 9 24 14 28 4 15
Source : Construction personnelle à partir des données de la Banque Mondiale, Mémorandum Algérie 1987.

La part de la V.A des hydrocarbures dans le financement de l'investissement augmente régulièrement exception faite de l'année 1971 pour les raisons indiquées plus haut. De 39 % en moyenne pour le premier plan, elle passe à 63 % pour le second quadriennal tout en marquant un pic de 83 % pour l'année 1974. La réévaluation à la hausse de l'enveloppe financière du second plan a fait que cette part s’était maintenue autour de 60 % durant les trois dernières années de ce même plan. Corrélativement, la part du PIDHH dans le financement de l'accumulation a décliné régulièrement. De 43 % en moyenne pour le premier plan, elle n'est plus que de 23 % pour le second. Le rythme et le taux de l'investissement semblent dépendre du niveau, en termes courants, de la valeur ajoutée des hydrocarbures.

Malgré la hausse rapide de l'investissement, la part des importations nettes dans son financement tend à baisser. Cette participation est respectivement de 19 et 14 % pour les deux plans. Le résultat de l'année 1974 traduit l'excédent de la balance commerciale.

En comparant les participations de la V.A des hydrocarbures et des importations nettes dans le financement de l'accumulation, on peut remarquer un net mouvement de balancier entre les deux. Chaque fois que la part des hydrocarbures augmente, celle de la dette baisse et réciproquement. Ce mouvement de balancier souligne la complémentarité entre la rente et la dette tout comme il met en évidence la faiblesse continue du produit disponible hors hydrocarbures dans le financement de l'investissement eu égard à l'effort colossal que recommande ce dernier.

Les signes, tant attendus, d'une libération progressive vis-à-vis de la rente et la dette ne se sont toujours pas produits au terme de cette décennie. L'injection massive et continue du capital fixe a été le fait d'un transfert de l'extérieur sous une forme directe (rente pétrolière) et indirecte(la dette) . En 1980, A. BENACHENHOU écrivait déjà à ce sujet ‘"l'effort d'accumulation n'a pas été rendu possible par notre capacité de produire mais par notre capacité de mettre en valeur les hydrocarbures et nous endetter"’ 272.

Le premier plan quinquennal qui couvre près de la moitié de la décennie quatre-vingts correspond à l'horizon prévu pour le plein emploi et l’émergence du système productif. Il serait intéressant d'interroger les chiffres relatifs à cette période pour analyser le sens de l'évolution de la relation entre l'investissement et la rente - dette.

Notes
272.

A. BENACHENHOU, op. cité, p.226