2.1.1 - Le poids déséquilibrant des hydrocarbures.

Tableau n° 47 : Allocation des investissements planifiés en millions de DA
1970 1971 1972 1973 1970 -1973 1974 1975 1976 1977 1974 -1977
1. Hydrocarbures 1.592 1.845 2.111 2.332 7.880 3.467 5.922 8.315 11.084 28.788
2. Hors hydrocarbures 1.634 1.842 2.731 3.429 9.636 4.699 8.255 8.519 10.826 32.299
Section (1) 170 265 648 854 1.937 638 1.229 884 1.547 4.208
- Industrie mécanique et électrique 170 265 648 854 1937 638 1.229 884 1.457 4.208
Section (2) 952 1.057 1.427 1.728 5.164 2.759 4.302 3.921 5.816 16.798
- Energie 285 176 286 228 975 271 608 800 1.110 2.789
- Sidérurgie métallurgie 599 741 869 942 3.151 1.552 2.250 2.100 2.428 8.330
- Matériaux de construct. 68 140 272 558 1.068 936 1.444 1.021 2.278 5.679
Section (3) 419 429 616 801 2.267 1.259 2.575 3.514 3.334 10.682
- Produits chimiques 161 19 195 267 642 595 942 932 1.100 3.569
- Textiles et cuirs 55 63 106 164 390 239 277 574 1.238 2.328
- Industrie agro-aliment. 94 115 156 178 543 121 156 395 946 1.618
- Divers 109 232 159 192 692 304 1.200 1.613 50 3.167
Section (4) 93 91 40 46 270 43 149 200 219 611
- Mines 93 91 40 46 270 43 149 200 219 611
TOTAL (1 + 2) 3.226 3.687 4.842 5.763 17.518 8.166 14.177 16.882 21.910 61.087
Source : Construit à partir des données de la Banque Mondiale, Mémorandum Algérie 1987
Tableau n° 47 (suite) : Allocation des investissements planifiés en millions de DA
1978 1979 1978-1979 1980 1981 1982 1983 1984 1980-1984 1970 -1984
1. Hydrocarbures 18.535 17.570 36.105 12.929 12.244 10.395 7.270 7.273 50.111 122.884
2. Hors hydrocarbures 13.961 14.465 28.426 14.653 10.797 10.121 6.859 7.673 50.103 120.466
Section (1) 2.597 3.464 6.061 3.262 1.668 1.233 1.008 1.155 8.326 20.532
- Industrie mécanique et électrique 2.597 3.464 6.061 3.262 1.668 1.233 1.008 1.155 8.326 20.532
Section (2) 6.696 5.153 11.849 5.972 5.082 4.833 2.841 3.666 22.394 56.205
- Energie 1.465 1.423 2.888 1.624 1.641 1.900 1.376 1.642 8.183 11.596
- Sidérurgie métallurgie 3.363 3.110 6.473 3.656 2.882 2.496 1.121 1.665 11.820 14.835
- Matériaux de construct. 1.868 620 2.488 692 559 437 359 359 2.391 29.774
Section (3) 4.333 5.662 9.995 5.255 3.967 3.871 2.908 2.676 18.677 41.621
- Produits chimiques 1.171 2.019 3.190 1.603 742 784 286 818 4.233 11.634
- Textiles et cuirs 2.046 2.096 4.142 2.337 1.648 1.099 457 519 6.060 12.920
- Industrie agro-aliment. 1.107 1.177 2.284 892 729 979 547 329 3.476 7.921
- Divers 9 370 379 423 848 1.009 1.618 1.010 4.908 9.146
Section (4) 335 186 521 164 80 184 102 176 706 2.108
- Mines 335 186 521 164 80 184 102 176 706 2.108
TOTAL 32.496 32.035 64.531 27.582 23.041 20.516 14.129 14.946 100.214 243.350
Tableau n° 48 : Allocation des investissements planifiés en % (1970 - 1984)
1970 1971 1972 1973 1970 -1973 1974 1975 1976 1977 1974 -1977
1. Hydrocarbures 49 50 44 40 45 42 42 50 51 47
2. Hors hydrocarbures 51 50 56 60 55 58 58 50 49 53
- Section (1) 5 7 13 15 11 8 9 5 7 7
- Section (2) 30 29 29 30 29 34 30 23 26 27
- Section (3) 13 12 13 14 13 15 18 21 15 17
- Section (4) 3 2 1 1 2 1 1 1 1 1
TOTAL 100 100 100 100 100 100 100 100 100 100
Tableau n° 48 (suite) : Allocation des investissements planifiés en % (1970 - 1984)
1978 1979 1978-1979 1980 1981 1982 1983 1984 1980-1985
1. Hydrocarbures 57 55 56 47 53 50 51 49 50
2. Hors hydrocarbures 43 45 44 53 47 50 49 51 50
- Section (1) 8 11 9 12 7 6 7 8 8
- Section (2) 21 116 18 21 22 24 20 24 22
- Section (3) 13 17 16 19 17 19 21 18 19
- Section (4) 1 1 1 1 1 1 1 1 1
TOTAL 100 100 100 100 100 100 100 100 100

Sur une enveloppe de 243.350 millions de dinars allouée aux investissements planifiés sur toute la période, 122.884 vont au secteur des hydrocarbures, soit une part moyenne de 50,5 %. On peut remarquer en plus que cette part n'a fait qu'augmenter avant de retomber à son niveau moyen durant la dernière sous-période. Elle a été de :

  • 45 % durant le premier plan quadriennal (1970-1973) ;

  • 47 % durant le second plan quadriennal (1974-1977) ;

  • 56 % durant les deux années de pause (1978-1979) ;

  • 50 % durant le premier plan quinquennal (1980-1984).

Corrélativement, les autres blocs ont vu leurs parts respectives se stabiliser ou baisser. De 11 % durant le premier quadriennal, les investissements alloués à la section des biens d'équipement ont baissé à 7 % durant le second pour remonter à 8 % à peine

durant le quinquennal. Ceux de la section des biens intermédiaires ont connu le même mouvement baissier. Pour les mêmes sous-périodes, leur part est passé de 29 à 27 et 22 %. Les industries légères ont vu, en revanche, leur part monter de 13 à 17 et 19 %.

La structure de plus en plus déséquilibrée des investissements en faveur des hydrocarbures est frappante. Elle l'est d'autant plus qu'elle ne correspond pas à celle qui a été planifiée. Les chiffres du tableau 49, même s'ils ne recoupent pas tout à fait les nôtres, montrent que le secteur des hydrocarbures a systématiquement opéré une surréalisation en termes nominaux au détriment des autres secteurs.

Tableau n° 49 : Répartition en % des investissements planifiés prévus et réalisés.
1970 - 1973 1974 - 1977
Prévu Réalisé Prévu Réalisé
1. Hydrocarbures 37,09 47,07 40,12 48,55
2. Industrie de base 41,93 36,11 45,62 38,33
3. Transformation 9,67 6,24 8,33 6,84
4. Mines et Energie 11,29 10,47 5,41 6,23
Source : LAKSACI. M., "La monnaie dans le financement des investissements planifiés" in Recherches économiques de LOUVAIN, Vol. 52 n° 2, 1986, p. 15.

Le souci d'opérer un certain rééquilibrage durant le second plan quadriennal au profit des industries de base (biens intermédiaires et biens d'équipement) a été abandonné dans les faits au profit d'un détournement des investissements vers les hydrocarbures. A l'évidence, le planificateur a tenté de corriger les distorsions dès la fin du premier plan quadriennal. La pratique a voulu que le secteur des hydrocarbures réalise 8 % de plus que ce qui lui était alloué initialement après avoir prélevé 10 % déjà durant le premier quadriennal. Les industries de base ont perdu près de 6 % durant le premier plan et plus de 7 % durant le second.

Le maintien de la structure déséquilibrée de l'investissement s'explique, à notre avis, par la contrainte faite au secteur des hydrocarbures de continuer à entretenir les autres secteurs dont on n'a pas achevé la mise en place ou qui connaissent encore des problèmes de montée en production. Cette assertion peut être appuyée par l'évolution de la ventilation de l'investissement à l'intérieur du secteur des hydrocarbures lui-même. Elle privilégie les activités orientées vers l'exportation au détriment des fonctions "industrialisantes".

Tableau n° 50 : Structure des investissements de la branche des hydrocarbures en % (1967 - 1978).
1967-1969 1970-1973 1974-1978 1967-1978
Exploration 24,7 15,6 10 11,4
Développement 18,5 25,8 33,6 31,7
Canalisation 19,5 20,6 9,6 11,7
Raffinage 0,1 5,7 4,9 4,8
Engrais 14,5 4,7 3,1 3,8
Pétrochimie 0,1 1,9 3,5 3,1
Plastiques - 1 2,2 2
G.N.L 0,3 11,2 14,2 13,1
Distribution 1,4 2,1 3,6 3,3
Moyens propres 9,3 4,7 7,8 7,4
Filiales 1 1,1 1,9 1,7
Siège 10,6 5,6 4,6 5
Unité de service - 1 1 1
TOTAL 100 100 100 100
Source : M. MEKIDECHE, Le secteur des hydrocarbures OPU, Alger, p. 47.

Les dépenses consacrées à l'exploration/développement des gisements, aux canalisations, au raffinage et au G.N.L, au sein desquelles est intégré l'essentiel des dépenses orientées vers l'exportation, représentent 62,8 % du total durant le triennal, 78,9 % durant le premier plan quadriennal et 72,3 % durant la période allant de 1974 à 1978. Malgré le léger fléchissement de fin de période, l'investissement reste bloqué dans la sphère extravertie, soit la sphère de rente. La fonction financière des hydrocarbures l'emporte sur sa fonction d'intégration. Les activités relevant de cette seconde fonction, en l'occurrence la pétrochimie, les engrais et les plastiques n'attirent que 11,7 % du total des investissements de la branche sur toute la période.

Le diagnostic qui précède peut être affiné en rapprochant les dépenses d'investissement consacrées aux hydrocarbures à la contribution relative du secteur au PIB.

Tableau n° 51 : Contribution de la V.A des hydrocarbures à la PIB en 106 DA et en %.
1967 1978
Montant % PM* % PIB Montant % PM % PIB
V.A (hydrocarbures) 14,2 50 35 24,6 44 28
PIB 40,3 - - 86,7 - -
Source : MPAT, bilan économique et social
* PM = La production intérieure brute hors hydrocarbures.

En rapprochant les chiffres du tableau n° 51 de ceux qui ont précédé, on ne manque pas d'être frappé par l'écart entre l'évolution de l'investissement dans les hydrocarbures relativement à l'ensemble et la contribution du secteur au PIB et PIB hors hydrocarbures. L'efficacité de l'investissement y est relativement moins élevée que dans le reste de l'économie.

Les écrits sur l'économie algérienne ont déjà souligné, dans leur quasi - totalité, les problèmes de surcoûts dus aux délais de réalisation, de réévaluation, d'inflation importée et de surcapacités installées. Tous ces facteurs tendent à déprimer la productivité globale des facteurs de production. A. BRAHIMI, ancien Premier ministre, note pour sa part que la production du secteur reste en deçà des capacités installées et conduit donc à une perte de surplus potentiel322. Pour l'auteur les surcapacités étaient évaluées en 1978 à :

  • 20 milliards de m3/an pour le gaz ;

  • 17 millions de tonnes pour le pétrole ;

  • 13,8 milliards de m3 pour le transport par gazoduc ;

  • et 10 milliards de m3 pour le GNL.

On peut retenir, au terme de ce point, que la stratégie de captation de la rente a relativement prévalu sur celle de sa mise en valeur. Pour appuyer ce point de vue, il nous reste à examiner l'évolution de la section des biens d'équipement sur laquelle reposait, rappelons-le, toute la stratégie de transformation de la rente en système productif.

Notes
322.

A. BRAHIMI : Stratégie de développement pour l'Algérie, Défis et enjeux. Economica 1991,

pp. 99 et 100.