2.2.2 - La productivité du travail.

La productivité du travail est liée à la nature et la quantité d'équipements et des matériaux que ce même travail met en oeuvre. L'étude de la productivité en termes d'évolution est insuffisante en soi puisqu'il s'agit de comparer le produit obtenu par un collectif de travailleurs à deux moments différents. Il serait plus judicieux de comparer la productivité de deux collectifs de travailleurs différents mettant en oeuvre les mêmes équipements ou de comparer le produit réellement obtenu à une norme théorique dont le calcul serait issu des capacités installées. Faute de telles données, on est réduit en général à étudier l'évolution de la productivité apparente.

Les données sur la productivité apparente du travail complètent celles relatives à la productivité du capital et attestent paradoxalement que le travail était plus intensif en 1967 que durant la période qui allait suivre et qui fût marquée par un taux d'investissement très élevé.

Tableau n° 54 : Indices de la productivité apparente du travail (1967 - 1978).
Secteurs 1967-1978 1979-1984
Agriculture 1,31 0,47
Industrie 0,84 1,28
BTP 0,49 0,85
Commerce et Tertiaire 1,40 0,98
Ensemble 0,90 1,09
Source : S.P. THIERRY, op. cité, p. 168 (1967-1978) et A. LENFANT : Un modèle en échec in "Demain l'Algérie" Sous la Direction de G. IGNASSE, SYROS 1995, p. 59.

En 1978, l'indice global a régressé de 10 % par rapport à son niveau de 1967. Remarquons que la productivité de l'agriculture, qui reste encore le fait de la nature pour l'essentiel, et celles des activités du commerce et du tertiaire ont eu pour effet de freiner la chute de l'ensemble. De l'industrie et du BTP, c'est ce dernier qui a enregistré la baisse la plus spectaculaire.

La série de 1979-1984 révèle un gain global de 9 % qui est le fait de l'industrie grâce à une montée en charge des équipements. En faisant l'hypothèse, très vraisemblable, que la productivité a stagné en 1979, on peut "réétalonner" la série et accéder à une comparaison directe entre les deux extrêmes. Les nouveaux chiffres seraient les suivants :

Tableau n° 55 : Indice de la productivité apparente (1967-1984).
Secteurs 1967 1978-1979 1984
Agriculture 0,76 100 0,47
Industrie 1,19 100 1,28
BTP 2,04 100 0,85
Commerce et Tertiaire 0,71 100 0,98
Ensemble 1,11 100 1,09
Source : Calculs à partir du tableau n°54

La productivité de l'ensemble a régressé de près de 2 %. A l'exception des activités du commerce et du tertiaire qui enregistrent un gain de 38 %, tous les autres secteurs ont fortement régressé ou stagné. L'industrie gagne 7,5 % en 18 ans. Le BTP enregistre une perte de près de 60 %. Au vu des amples fluctuations dans ses rendements, l'agriculture semble totalement soumise aux aléas de la nature.

En rapprochant les évolutions respectives de la productivité et de la production, on s'aperçoit aisément que les importantes augmentations de cette dernière sont le fait d'une injection renouvelée du capital et non d'une meilleure utilisation des moyens disponibles. L'industrie ne parvient pas à "entraîner" le BTP et l'agriculture. La remarque de S.P. THIERRY synthétise bien ce point de vue : ‘"conçue pour anticiper la demande des autres secteurs, l'industrie se retrouve placée en permanence dans une situation de substitution aux importations, ne réussissant à rattraper dans aucun domaine (biens d'équipement, biens intermédiaires, biens de consommation) le niveau de la demande intérieure en forte progression"’ 330.

Les blocages du système productif de l'Algérie ne sont pas sans effet sur la montée de son endettement et corrélativement sur le développement de son secteur des hydrocarbures.

Notes
330.

S.P. THIERRY, op. cité, p. 222.