Conclusion du chapitre.

L’impasse des tentatives d’autoguidage des réformes a laissé place dès le début de 1994, à un ajustement standardisé. Les résultats macro-financiers obtenus jusqu’ici sont qualifiés d’impressionnants par le Fonds Monétaire International. L’analyse des statistiques nous a révélé que ces derniers ne sont pas les faits exclusifs de la discipline et de la rigueur observées dans l’exécution des programmes. L’amélioration des prix du pétrole est probablement le facteur explicatif essentiel. La récupération d’une partie plus substantielle de la rente et les fonds libérés par le rééchelonnement ont permis au Trésor de financer des opérations de restructuration et de se désendetter vis à vis du système bancaire.

Sur le plan extérieur, les résultats sont tout aussi impressionnants. L’amélioration des recettes au titre des exportations d’hydrocarbures, la baisse de la demande d’importation ,en raison de la contraction de la demande globale, ont permis de dégager des excédents commerciaux et courants d’une part et de reconstituer à un niveau très appréciable les réserves de change. Par ailleurs le ratio du service de la dette a été ramené à un niveau bien plus faible que celui qui était prévu.

Le processus de libération des prix est pour ainsi dire achevé. Aussi l’inflation est-elle orientée à la baisse dans un contexte de restriction monétaire. Il en a résulté une relative détente sur le marché monétaire et une stabilisation du taux de change.

Les variables explicatives de l’économie de l’endettement semblent avoir été maîtrisées. Il reste à savoir pourquoi l’assainissement du cadre macro-financier n’a pas influencé positivement l’économie réelle. Exception faite du secteur des hydrocarbures, on peut aisément soutenir le contraire. S’agit – il de simples effets récessifs de court terme ? Quel temps faut - il à une économie pour réagir aux nouvelles incitations ? La baisse continue de la production industrielle ressemble davantage à une désindustrialisation. Le traitement répété des seuls aspects financiers de la récession industrielle a montré ses insuffisances à enrayer l’économie d’endettement. La restructuration physique des secteurs productifs, mise en oeuvre actuellement, intervient dans un contexte contraint par le nouveau cadre macro-économique, la rareté de l’investissement, la concurrence étrangère et une absence de l'Etat qui encourage les secteurs spéculatifs au détriment de la production. On peut craindre du redéploiement des hydrocarbures un maintien, voire un développement des réflexes rentiers qui condamneront l’Algérie à se réinsérer dans la division internationale du travail par les seules hydrocarbures.

Les données sur les retombées sociales de l’ajustement structurel sont insuffisantes pour analyser la répartition du coût induit par cet ajustement. L’aide apportée aux couches dites défavorisées reste négligeable eu égard au coût de couverture des besoins essentiels. Par ailleurs, cette action reste peu transparente à cause de la méconnaissance qu’ont les pouvoirs publics de la distribution réelle des revenus. Dans l’acception générale, voire même celle des pouvoirs publics, le libéralisme implique une absence de l’Etat. En Algérie, ce processus se situe dans le prolongement de l’économie informelle où les réservoirs de profits spéculatifs sont plus importants que jamais. A l’opposé, l’extension rapide de la pauvreté aux couches moyennes joue dans le sens d’un mouvement socialement déstabilisant. La création d’emplois, afin de mettre fin à la montée du chômage, est inconcevable sans la reprise du secteur industriel qui dépend des capacités de l'Etat à canaliser l’épargne vers l’investissement et assainir le climat général.