a - Des clients qui s'impliquent dans les missions

L'image du consultant actif et du client passif n'est plus d'actualité. La tendance est plutôt à la constitution d'une équipe active de consultant(s) et de client(s) dans le but d'atteindre des résultats précis. Le service offert apparaît alors comme un mélange d'expertise, d'accompagnement, de confrontation d'idées ou d'opinions, de dialogues, de compromis72.

Le client s'investit de plus en plus dans la relation de service pour que le service réponde à ses attentes spécifiques, c'est-à-dire pour orienter la solution dans un sens qui correspond à la situation concrète de son organisation, mais aussi à son niveau de compétence. Autrement dit, une solution préconçue est inadaptée, de même qu'une solution qui relève de niveaux de connaissances et de compétences supérieurs à ceux du client. Par conséquent, le consultant doit intégrer très tôt dans sa démarche la spécificité de l'organisation cliente (J.-P. DETRIE 1989), de même que la spécificité "cognitive" du client. Comme le souligne A. BARCET et J. BONAMY (1994 b, p. 167), ‘"(...) il n'y a pas une solution unique et optimale : différents chemins sont possibles, le choix définitif ne résulte pas nécessairement d'une approche totalement rationnelle et, surtout, le choix ne s'impose pas et n'est pas unique ou unidimensionnel. On est dans le domaine des compromis, et l'on est surtout soumis à l'exigence de prendre en compte l'entreprise et ses acteurs dans toutes leurs dimensions et toute leur réalité"’.

Cette prise de conscience, de l'importance de l'adéquation du service à l'entreprise cliente et de la compétence de l'acheteur à la prestation de service qui lui est offerte, se relève dans les faits : la croissance très vive des services de conseil aux entreprises s'accompagne d'une augmentation des "staffs" d'experts internes73. Une étude de l'AFPLANE (Association Française de Planification d'Entreprise) (ERMES 1988) montre que les entreprises qui font le plus appel à des cabinets de conseil sont aussi celles qui ont augmenté leur personnel dans ces domaines-là : il y a donc un double développement de la connaissance interne et des savoirs externes (D. MAISTER 1996).

Le client s'investit de plus en plus car il lui est important d'assimiler des connaissances dans la relation de service pour ensuite mettre en mouvement la solution. Plus précisément, pour que le service produise le maximum d'effets, dans la mise en oeuvre de la solution le client doit mobiliser diverses connaissances sans lesquelles le service n'a aucun intérêt, et tout particulièrement des connaissances opérationnelles c'est-à-dire qui sont orientées vers l'action et la décision. Ces connaissances sont transmises par le prestataire dans la relation de service, il y a alors "formation", "préparation" du client. Cette participation dans le but de s'approprier des connaissances va donc limiter l'incertitude de la solution. Le résultat n'est donc pas identifiable en lui-même, mais seulement dans la relation qui se noue avec le client (A. BARCET, J. BONAMY 1988). Parce que c'est le client qui va mettre en oeuvre la solution, sa démarche active est donc préalable à l'acte de production de résultats.

Les organisations clientes semblent donc avoir compris l'intérêt de leur participation active dans la relation de service, source de solutions adaptées, de connaissances assimilées, de mise en oeuvre efficace des solutions et donc de résultats. La plus grande participation des clients aux missions leur permet également de gagner du temps (et donc de l'argent). Cependant, même si le prix à la journée est élevé, il ne faut pas chercher à trop réduire le nombre de journées-consultant : soit le consultant en pâtira et sera obligé de "sabrer" des étapes dans son travail, soit le client rencontrera des difficultés d'assimilation. Retenons quand même la tendance au raccourcissement des délais et de la durée des missions ; J. GADREY (1989) parle de ‘"just-in-time consulting"’ 74.

Le schéma suivant75 illustre l'importance du "répondant" du client nécessaire à l'élaboration d'une solution adaptée et l'importance de la formation du client pour une mise en oeuvre efficace de la solution.

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Schéma : Valeur d'une mission de conseil et taux de participation du conseil

Ce schéma met en évidence la valeur pour l'entreprise de la prestation du consultant compte tenu de son taux d'implication : cas 1, cas d'une formation-action avec une entreprise ayant du "répondant" en interne ; cas 2, cas d'une entreprise ayant un "faible répondant". Il ressort que le client a tout intérêt à s'impliquer dans la mission, cela lui permet de recevoir la valeur maximum.

Notes
72.

La citation d'un conseil en stratégie français, relevée dans l'article de J. GADREY (1989, p. 18) met nettement en évidence cet état : "De moins en moins on fait des expertises. De plus en plus on fait de la participation".

73.

On les appelle également des organisateurs internes. Ces derniers se sont regroupés dans une association (l'AFOPE, l'Association Française des Organisateurs Permanents dans les Entreprises) laquelle capitalise les expériences (bonnes ou mauvaises) que ses membres ont eu avec les consultants et diffuse parmi ses adhérents ce savoir (C. SAUVIAT 1991).

74.

J.-C. DELAUNAY (1989, p. 50) cite un consultant d'une firme multinationale de conseil qui disait : "(...) des missions qu'on aurait faites sur 18 à 24 mois il y a 5 ans sont aujourd'hui demandées sur 9 à 10 mois".

75.

Ce schéma n'a aucune valeur mathématique, mais simplement une valeur illustrative. En effet, et nous le verrons par la suite, il est bien délicat de mesurer la valeur d'une mission (elle n'est pas la même selon les individus -très subjectif- et elle est fonction de la période retenue -CT, MT, LT-) et la participation des parties prenantes (comment savoir si le consultant s'est donné à 100 % ou à 50 %...).

Pour cette représentation nous nous sommes inspirés d'un schéma du rapport du Ministère de l'Économie, des Finances et de l'industrie (1998, p. 13).