Section 2 - Les analyses des relations interfirmes

Parce qu'au-delà des relations entre les membres de la firme il faut également tenir compte des relations avec l'extérieur, nous consacrons cette deuxième section aux analyses des relations interfirmes.

Comme précédemment avec les analyses de la firme, les analyses questionnées dans cette deuxième section apportent un éclairage du terrain principalement sur la manière dont les individus doivent se coordonner pour produire mais également sur la manière dont les offreurs et demandeurs se rencontrent.

Dans le cadre des activités de conseil, deux types de relations externes peuvent être relevés. D'une part la relation de service, c'est-à-dire la relation entre le cabinet de conseil et le client, et d'autre part la relation entre le cabinet et une (ou plusieurs) autre(s) entreprise(s) (de service ou non). Ces deux types de relation sont des relations interfirmes269.

Dans le premier cas (relation de service), il faut tenir compte au préalable de l'étape de constitution du marché sans laquelle il ne peut y avoir de relation de service. Ensuite, une fois la relation de service mise en place, le client délègue la réalisation d'acte à quelqu'un d'autre, il lui demande de faire à sa place ou pour lui, ce qu'il ne peut pas faire, ce qu'il ne sait pas faire, ou ce qu'il ne veut pas faire. Cette délégation met le producteur de service dans une certaine relation de dépendance, mais elle est plus ou moins explicite, car le demandeur n'a pas de pouvoir pour définir comment se fera la prestation (pas de subordination au sens du droit du travail). Dans cette relation, le prestataire est donc "maître du faire" mais le client n'est pas passif, il n'y a pas un engagement dynamique dans un sens, mais engagement réciproque. En effet, ‘"(...) c'est du résultat de l'action du client, de la spécification de ses attentes, de son rôle parfois actif dans la prestation, de son rôle actif dans l'appropriation des effets et de l'action de l'offreur dans la conception et la réalisation de la prestation que le service peut naître"’ (A. BARCET, J. BONAMY 1998, p. 7). Dès lors, les moments de constitution du marché et de coordination sont fondamentaux, sans eux la relation de service ne peut exister et ne peut produire les effets escomptés.

Dans le second cas (relation prestataire-partenaire(s)), on a en fait une entreprise (le cabinet de conseil) qui est limitée dans ses compétences, pour satisfaire pleinement le client, et qui doit mobiliser des "compétences de support" (J. GADREY et alii 1992). Une fois la relation entre les entreprises (prestataire et partenaire(s)) constituée, elles doivent alors coordonner leurs actions : l'une n'intervient pas à une étape du processus de production et l'autre à une autre, d'ailleurs en matière d'activité de conseil il est bien difficile de parler d'étapes d'un processus de production, au contraire, leurs actions s'imbriquent totalement dans la réalisation de la prestation (tous c'est-à-dire prestataire et partenaire(s) sont responsables du "faire"). Le processus de prestation, lorsqu'il nécessite des "compétences de support", implique donc une articulation des compétences principales (celles du prestataire) et des "compétences de support" (celles du partenaire), d'où là aussi, l'importance de la constitution de cette relation avant la production et l'importance de la coordination des actions de tous dans la phase de production en commun.

Cette section va donc essayer de mettre un peu de lumière sur les modalités de constitution de ces relations interfirmes et sur les modalités de coordination de cette structure organisationnelle particulière. Plus précisément, il s'agira de questionner les analyses théoriques des relations interfirmes sur les opérations de constitution des relations et de production en commun. Ensuite, les réponses relevées seront confrontées à la spécificité des relations interfirmes dans le cas d'un cabinet de conseil. L'objectif est donc de comprendre comment se structurent et se développent d'une part les relations de service (A-), d'autre part les relations entre partenaires (B-).

Notes
269.

Dans les deux cas et par analogie aux travaux réalisés sur l'organisation industrielle, on pourrait parler de relations interfirmes verticales. En effet, il y a bien un rapport de fournisseur à client qui concerne deux entreprises qui se situent à des stades différents d'un "processus de production", aussi peut-on parler d'accords verticaux. Concrètement il peut s'agir de franchises, concessions commerciales, contrats de distribution, sous-traitance, partenariats industriels. Par opposition, les relations interfirmes horizontales correspondent aux accords du type joint-venture, contrat de recherche-développement, contrat de fabrication en commun, cotraitance. Pour le cas des relations interfirmes verticales, on est loin des relations de sous-traitance pures où le fournisseur assure totalement la conception du produit, de même qu'on est loin des relations de quasi intégration verticale où le client (donneur d'ordres) maîtrise totalement la conception du produit. On se rapprocherait plutôt de la quasi intégration oblique où la conception du produit est le fruit d'une "collaboration" entre client et fournisseur.