b - La dynamique extra-territoriale et les réseaux sociaux

On a vu l'importance des réseaux locaux (source de dynamique territoriale) dans le point précédent, mais ce n'est qu'un support possible à la constitution et au développement des marchés et donc à la coordination des acteurs. Il faut aussi tenir compte des supports (professionnels et sociaux) extra-territoriaux. Bien évidemment le territoire dans lequel s'inscrit l'entreprise est important dans la mesure où il peut stimuler une dynamique relationnelle (proximité territoriale), mais cette "efficacité par les relations" (P. VELTZ 1996) n'implique pas mécaniquement la proximité physique, elle renforce plutôt le rôle d'autres types de proximités : économique, sociale, organisationnelle, institutionnelle, professionnelle (c'est-à-dire socio-économique).

Sur le marché du conseil, comme le souligne C. SAUVIAT (1994), si l'offre peut s'ajuster à la demande c'est parce qu'il y a dans les principales entreprises de conseil comme dans la grande entreprise française, des individus qui rapprochent une même formation, une même identité culturelle et le sentiment d'appartenir à une élite (proximité socio-économique). ‘"Mais cela n'est possible que grâce à des réseaux sociaux qui maintiennent dans la durée ce type de relations privilégiées, nées autour de la fréquentation commune d'une même école, de l'apprentissage commun d'un même savoir, et du partage des mêmes référents techniques et culturels. Les relations de réseaux sont autant d'occasions de rencontre, de sociabilité entre prestataires et clients où circulent les informations et les connaissances sur le management des entreprises. Elles produisent des indices de fiabilité sociale qui valent autant vis-à-vis de l'extérieur (la clientèle) que de l'intérieur (entre consultants et cabinets) où il s'agit de se positionner les uns par rapport aux autres"’ (C. SAUVIAT 1994, p. 251). Mais, et c'est le revers de la médaille, les relations sont limitées au "voisinage culturel" (C. MIDLER 1986) de la population des consultants (anciens de grandes écoles, anciens de cabinets prestigieux qui occupent des postes importants dans les grandes entreprises, etc.), ce qui restreint l'espace de circulation de l'information entre les prestataires et les clients348.

Le réseau apparaît non plus pour maîtriser les coûts de la distance (devant le développement des infrastructures et des nouvelles technologies d'information et de communication (NTIC), la distance n'est plus une barrière aux échanges), mais pour favoriser les relations, pour maximiser les opportunités, pour entretenir les rapports de confiance et de connivence, pour maintenir le contact, et finalement atteindre une clientèle du côté du cabinet ou sélectionner un offreur du côté du client.

Notes
348.

Tous les intermédiaires (par exemple les prescripteurs), qui parlent du conseil ou le prescrivent, vont permettre un élargissement du marché par la stimulation de contacts entre des individus qui ne se connaissent pas, c'est-à-dire quand il n'y a pas d'ajustement spontané entre l'offre et la demande. Aussi, les intermédiaires permettent de rapprocher des individus au départ éloignés (d'un point de vue socio-économique) et de construire peu à peu des proximités.