b - Les "infrastructures immatérielles"

A la différence du point précédent, où il s'agissait de structures "matérialisées" au sens de visibles, représentées par des individus repérables, par un statut précis (telles que les associations), nous abordons ici le cas de structures totalement différentes. Nous les qualifions d'"infrastructures immatérielles" parce que non visibles, non formelles, rassemblant un ensemble d'individus indénombrable. Plus concrètement, ces "infrastructures immatérielles" sont des réseaux propres à chacun qui évoluent au fil du temps, au fil des rencontres. Comme les "structures-relais", ces "infrastructures immatérielles" vont contribuer à favoriser les mises en contact (de l'offre et de la demande, de prestataires et de partenaires), et se prolonger peut-être par une production en commun.

Ces "infrastructures immatérielles" apparaissent du côté des clients pour solliciter un conseil, un point de vue et du côté du cabinet, pour diffuser et valider ses pratiques.

Dans le premier cas, le client mobilise son réseau personnel (socio-économique, familial...) quand il ne sait pas trop vers quel prestataire se diriger, cela lui permet d'obtenir des informations sur l'offre. Autrement dit, les clients potentiels vont se représenter le "sérieux" d'un cabinet en fonction de l'information transmise par les clients passés de ce cabinet ; ils s'informent donc sur les niveaux de satisfaction qu'ont obtenus des entreprises ayant déjà eu recours aux services du prestataire concerné. Dans ces conditions, les relations de réseau vont faire connaître les mérites de tel ou tel consultant et peut-être motiver les clients potentiels à recourir au conseil. Ces relations donnent finalement des "indices de fiabilité sociale" (C. SAUVIAT 1994, p. 251) et favorisent l'ajustement offre-demande.

Dans le second cas, il s'agit en fait pour les cabinets de préparer le terrain c'est-à-dire de se positionner dans divers lieux, réseaux afin de se faire connaître, en tout cas de faire connaître ses méthodologies, autrement dit de crédibiliser ou de valider ses pratiques. En effet, tous les clients, tous les chefs d'entreprise sont plus ou moins frileux à l'idée de recourir à un cabinet de conseil, en tout cas ils ne veulent pas appliquer n'importe quelle méthode. Aussi, les cabinets doivent apporter de la crédibilité à leurs pratiques, elles doivent être reconnues. Cela passe par un long travail de constitution de chaînes d'intermédiaires : contacts avec l'Université (interventions, cours), participation à des colloques, séminaires, études, publications d'articles, d'ouvrages... La parole ou la publication valide en quelque sorte les connaissances, les pratiques. Il s'agit donc de mobiliser délibérément divers réseaux pour faire reconnaître et donc valider ses développements. Autrement dit, le cabinet cherche à créer un "espace de validation".

Quels qu'ils soient, ces réseaux sont activés intentionnellement pour retirer de l'information ou pour en diffuser. D'une manière générale, même s'ils ne sont pas une garantie parfaite quant à la qualité du service, de la relation de service et des résultats, ils apparaissent comme le moyen de rendre la mise en contact moins aléatoire. Au fond, ces réseaux participent à la construction des représentations de chacun.