Du point de vue supra-segmental, un critère a été perçu par nos sujets, comme particulièrement utile pour la discrimination des parlers arabes : il s’agit plus particulièrement du « rythme » propre à chacun des deux groupes de parlers (i.e. maghrébin vs. oriental).
] qui se colore diversement au contact de certaines consonnes à influence modificatrice, comme les emphatiques) qu’au niveau quantitatif (i.e. passage à des voyelles ultra-brèves pouvant selon le parler disparaître complètement (chute)). De fait, les items orientaux caractérisés par une structure syllabique de type CVCVC(C) aboutissent au Maghreb à des formes de type C(v)CVC(C), ce qui conduit à l’émergence de groupements consonantiques complexes interdits par les règles phonotactiques de l’arabe standard et/ou des dialectes orientaux. L’observation de ces faits nous autorise à penser que le rythme typique des parlers maghrébins est dû en grande partie à l’importance des groupements consonantiques liée à la chute des vocoïdes brefs. Au niveau perceptuel les échantillons maghrébins sont généralement perçus comme l’enchaînement successif de bruits apériodiques continus et impulsionnels (i.e. consonnes), plutôt brefs (entre 60ms pour les occlusives et 100 ms pour les fricatives) et d’amplitude relativement faible. La succession de ces évènements conduit à une impression auditive définie par nos sujets orientaux comme [rythme +saccadé]. A l’inverse, la présence — à intervalles réguliers — de sons périodiques d’amplitude forte et d’une durée moyenne de 122 ms48 (i.e. voyelles) mène à la perception d’une organisation syllabique plus stable et à une impression de rythme plus régulier (tableau 14).
| Indices supra-segmentaux et vocaliques | |||
| Caractérisation du rythme | Traitement des voyelles brèves | ||
| + saccadé | - saccadé | Centralisation / Chute des voyelles brèves | |
| Dialectes Marocains | |||
| Parler de Casablanca | + | - | + |
| Parler de Rabat | + | - | + |
| Parler de Safi | + | - | + |
| Dialectes Algériens | |||
| Parler de Cherchell | + | - | + |
| Parler de Touggourt | + | - | + |
| Parler de Jijel | + | - | + |
| Parler de Oran | + | - | + |
| Dialectes Tunisiens | |||
| Parlers de Tunis | Non-évoqué | ± | |
| Parler de Bousalem | ± | ||
| Parler de Bizerte | ± | ||
| Dialectes Syriens | |||
| Parler de Homs | - | + | - |
| Parler de Alep | - | + | - |
| Dialectes Libanais | |||
| Parler de Beyrouth | - | + | - |
| Parler de Zahle | - | + | - |
| Dialectes Jordaniens | |||
| Parler de Irbid | - | + | - |
Afin de vérifier le poids de ces seules propriétés rythmiques pour la discrimination des dialectes arabes par zones géographiques principales (i.e. arabe maghrébin vs. arabe oriental), nous avons mis en place une seconde expérience perceptuelle de discrimination dialectale basée sur la perception de variétés dialectales arabes en parole naturelle vs. synthétique.
Cette moyenne a été calculée à partir des mesures de durée des voyelles brèves et longues obtenues — par différents auteurs — sur différents dialectes orientaux (i.e. égyptien, libanais, jordanien, saoudien, syrien) et répertoriées par Jomaa (1994).