3.1.1.1.3. Systèmes vocaliques des parlers marocains

Les systèmes vocaliques brefs des parlers marocains de Casablanca et Tétouan sont typiques des parlers de sédentaires du Maghreb définis par D. Cohen (1970). Spécifiquement, ce sont des systèmes binaires constitués de deux vocoïdes brefs / message URL e.gif/ et /u/ ; la voyelle centrale / message URL e.gif/ résultant — dans ces parlers — de la confusion des anciennes voyelles brèves /i/ et /a/. En principe / message URL e.gif/ est réalisée [ message URL e.gif] quand la voyelle n’est soumise à aucune influence consonantique particulière (i.e. postériorisante et/ou antériorisante) ; dans le cas contraire elle peut connaître plusieurs colorations qualitatives (i.e. [o] dans l’entourage de [w], [a] en position finale et [ message URL a.gif] au contact d’une pharyngalisée, [i] au contact de [j]). De la même manière, [ message URL e.gif] > [ message URL e.gif w] en contexte arrondi. Les phonèmes / message URL e.gif/ et /u/ n’apparaissent qu’en syllabe fermée (i.e. de type [—CC] et/ou [—C#] et chutent littéralement en syllabes ouvertes donnant lieu à des groupements consonantiques complexes typiques des parlers occidentaux.
Du point de vue des voyelles longues, les parlers marocains attestent au niveau phonologique trois segments longs /i:/, correspondant aussi à l’ancienne diphtongue /aj/) ; /u:/ (correspondant aussi à la réalisation de la diphtongue /aw/) et / message URL ae.gif:/49. Néanmoins, étant donné qu’il ne semble plus y avoir de phonème / message URL ae.gif/ ni de phonème /i/ brefs, les phonèmes longs /a:/ et /i:/ se trouvent isolés, sans partenaire court, de sorte que leur opposition en terme de longueur n’est plus pertinente. Ce constat a conduit certains auteurs à avancer l’hypothèse selon laquelle la seule opposition binaire de quantité vocalique qui subsiste encore serait /u/ vs /u:/ (Cantineau, 1960).
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Figure 21: Système vocalique des parlers de sédentaires marocains
Notes
49.
Dans les dialectes maghrébins, nous avons choisi de représenter la voyelle ouverte /a/ par son allophone principal / message URL ae.gif/. Cette réalisation est de loin la plus fréquente dans les dialectes considérés, et constitue ce que Maddieson (1991 :13) définit comme « The most basic allophone », c’est à dire comme la réalisation phonétique la plus usitée dans la langue « [...] in most cases it is the most frequent allophone ». « The most basic allophone » doit être interprété comme l’allophone le plus représentatif. Le symbole / message URL ae.gif/ représente ainsi la prononciation dominante, la moyenne catégorielle, pour la voyelle ouverte dans les dialectes maghrébins.