3 – La question du statut social.

La troisième étape qui complète ce dispositif mythologique, revient à mettre en avant la place modeste qu’occupe Voitrinsur l’échiquier social, situation qui fait de lui une figure emblématique de ce petit peuple qu’entend défendre le Parti communiste : ‘ « Lucien Voitrin ’ ‘ , vingt-sept ans, père de deux enfants, deux ans et six mois. Ouvrier scieur, travaillant dur pour élever sa petite famille ’ ‘ 1367 ’ ‘ . » ’ Cependant, l’enquête diligentée par les Renseignements Généraux grenoblois en juillet 1943 à propos de Voitrin au moment où il fait acte de candidature à la « Franc-Garde de la Milice Française » – ce document, au passage, nous renseigne sur le profil social et les conditions de recrutement des sbires de Darnand – n’est guère élogieuse et ne correspond pas à la description flatteuse du prolétaire méritant que fait Le Travailleur alpin.

‘« VOITRAIN [sic] Lucien, né le 21 novembre 1921, à Vizille (Isère), demeurant chez ses parents à Moirans (Isère), travaille comme bûcheron.
L’intéressé, ainsi que les membres de sa famille sont jugés peu intéressants ; la mère et le père ont été arrêtées à plusieurs reprises par la Gendarmerie, pour vol. De fortes suspicions pèsent également sur le fils pour des vols commis dans le canton. Ce dernier est un illettré. On ne lui connaît aucun antécédent politique, mais cette famille est à considérer comme douteuse et peu intéressant  1368 . »’

Notes
1367.

Le Travailleur Alpin, numéro du 25 septembre 1948.

1368.

Copie certifiée conforme, établie le 22 septembre 1948 (soit quatre jours après les événements) par les RG de Grenoble, du rapport envoyé par le « Chef du Service départemental des R.G . de l’Isère » au « Chef du Service Régional des R.G. à Lyon  », le 17 juillet 1943. MRDI.