Annexe II
La Résistance se déchire : les réunions de l’Union Départementale des Organisations de Résistance de l’Isère 1966 .

Séance du 30 octobre 1947.

Président : VALOIS Secrétaire : HERBAUT

Le Secrétaire lit le P.V. de la réunion du 25 Septembre.

Au passage, les commentaires suivants sont apportés en ce qui concerne :

1°/ - La Défense des Résistants  : Me AUZIMOUR appelé d’urgence en d’autres lieux s’est fait excuser. Il espère pouvoir assister à la prochaine réunion. Mais d’ores et déjà, il fait connaître son avis : il convient d’utiliser ce texte de loi.

2°/ - Les attestations de présence dans les F.F.I. Le Commandant GUEYMARD ne figure pas sur la liste des Officiers habilités à délivrer des attestations aux F.F.I. de l’Isère.

3°/ - Le vestiaire : Le Secrétaire a reçu une lettre du Secrétaire Général de l’Office des Combattants et Victimes de la Guerre qui l’invite à adresser les colis de vivres et les paquets de cigarettes aux destinataires prévus par la circulaire Ministérielle.

Le Secrétaire en conclut que de bons Apôtres ont mis en garde l’Office des Combattants contre le mode d’utilisation des cigarettes tel qu’il avait été envisagé au cours de la précédente réunion, il croit que les meilleures intentions ont été déformées. Il ne suffit pas de bien faire pour être bien considéré.

L’Assemblée est ensuite mise au courant des démarches faites auprès de Monsieur le Directeur des Contributions Indirectes qui entend ne pas abandonner les droits de l’État au paiement des sommes dues par le Sieur EYBERT qui a opéré d’importants trafics de vin et d’eau de vie à l’époque de la Résistance.

SEGAL déclare qu’une bonne partie de la population de l’Oisans au courant des agissements de cet individu, espère que la Résistance ne se laissera pas duper et tirera cette affaire au clair.

[...]

THOMAS dit que la fusion des Organisations ne peut être envisagée mais que les résistants doivent pouvoir adhérer individuellement.

SEGAL répète que l’Assemblée Générale de la FNAR s’est prononcée contre la fusion. Il ne peut actuellement être question de revenir sur cette décision. Personnellement il approuve la déclaration que vient de faire MICHALLON.

R. BUISSON répond que la politique proposée par le mémorandum est incluse dans le programme du C.N.R., accepté par tous les Résistants. Cette politique ne devrait pas trouver d’adversaire au sein de la Résistance.

[...]

SEGAL propose alors que CHAVANT donne son avis.

CHAVANT avant de donner son avis pose à Robert BUISSON la question suivante : « Comment envisagez-vous la représentation du Bureau Directeur ? »

R. BUISSON prévoit d’abord une première étape : chaque organisation aurait des représentants.

CHAVANT répond qu’automatiquement se créeraient, avec les représentants des courants de droite et de gauche et qu’il serait impossible d’obtenir l’Union dès que serait abordée, même légèrement, la question politique. Certes dit-il, il est nécessaire de s’appuyer sur le programme du C.N.R., peut-être faudra-t-il réviser les statuts ; mais je ne vois pas la manière de réaliser une fusion complète. Il paraît plus indiqué d’essayer de perfectionner l’organisme existant.

On parle de ressusciter les C.D.L. qui ont fait faillite. Je le veux bien, mais je demande comment ils seraient utilisés à nouveau. Je ne crois pas qu’il convienne de recréer une Préfecture camouflée, sans notions administratives, chargée de contrôler l’autre.

Quant à la révision des statuts, puisqu’elle apparaît nécessaire qu’on la fasse.

MICHALLON proteste en faisant remarquer que de nombreuses séances ont été employées à l’élaboration des statuts qui ont été finalement adoptés à l’unanimité. S’il faut chaque fois les remettre en cause, nous passerons le reste du temps à en faire la révision. Il accepte néanmoins une prochaine révision qu’il espère définitive.

THOMAS fait alors remarquer, à propos du vote, que tous les vrais résistants sont des Républicains mais qu’ils sont divisés lorsqu’il s’agit de déterminer le sens dans lequel ils doivent agir.

R. BUISSON réplique que les résistants devraient rester d’accord s’ils s’appliquaient à ne pas sortir du cadre du programme du C.N.R.

Jusqu’à présent, l’action de l’U.D. s’est bornée à des œuvres de secours et à l’examen de quelques cas concrets de défense des Résistants. Il estime que les Représentants de l’Union Départementale vont se vider de leur substance en traitant des questions de détail cependant que d’autres qui n’ont pas les mêmes droits prétendent diriger le pays.

Les résistants ont un devoir : faire appliquer le programme du C.N.R. Ils ne se comprennent plus depuis qu’ils sont dispersés dans de trop nombreuses organisations.

En se regroupant par la fusion, ils auront des contacts plus fréquents, ils retrouveront la fraternité des combats de l’époque clandestine.

SEGAL dit alors que le programme du C.N.R. étant admis à l’unanimité des résistants, la fusion n’apparaît pas nécessaire.

Puisqu’on nous reproche de ne pas traiter les questions importantes ; je propose que les Délégués des Organisations apporteront ici à chaque séance le texte des questions importantes qu’ils désirent voir traiter.

VALOIS admet que dans une certaine mesure cette manière d’opérer peut être adoptée.

[...]

R. BUISSON demande :

1°/ - un blâme à propos de l’affaire FLAUREAU.

2°/ - la mise aux voix de la proposition REYNAUD.

La proposition REYNAUD est adoptée à l’unanimité.

REYNAUD , BRISAC et CHAVANT estiment qu’il convient d’abandonner l’affaire FLAUREAU, l’intéressé lui-même n’ayant rien demandé à l’Union Départementale.

CHAVANT ajoute que NAL et lui-même, attaqués après la Libération, se sont défendus par leurs propres moyens.

GAMONNET fait alors remarquer que l’Union Départementale n’existait pas.

R. BUISSON accepterait d’abandonner l’affaire FLAUREAU si le Comité d’Épuration, organe de la Résistance, n’avait pas été mis en cause. Pour lui, la gravité de l’affaire est dans l’attaque contre un organisme de la Résistance.

Si l’Union Départementale ne réagit pas, de telles attaques se renouvelleront et toute l’action de la Résistance sera mise en cause. Cela, les vrais résistants, quelles que soient leurs attaches politiques ne doivent pas le tolérer.

Après discussion, l’Ordre du jour suivant est adopté.

1°/ - Examen d’une Partie du programme du C.N.R. et prise de position sur ce programme.

2°/ - Examen, en vue de réponses précises aux propositions suivantes contenues dans le mémorandum F.T.P.F.

– travail en coopération avec le C.N.R.

– propositions de modifications des statuts.

3°/ - Prise de positions en présence des attaques contre le Comité d’Épuration du C.D.L. de l’Isère.

4°/ - Questions diverses.

La prochaine réunion est fixée au jeudi 30 novembre 1947 à 20 h 45 au Salon Rouge de la Préfecture.

VALOIS demande l’envoi d’une délégation à l’inauguration du Monument de MALLEVAL le dimanche 9 novembre à 15 heures.

Cette délégation aura la composition suivante : ROUGET, porteur du drapeau, GAMONNET et BRISAC.

Il propose en outre que les Résistants, à l’exemple de l’U.F.A.U. soient absents aux manifestations officielles des 1 er et 2 novembre 1947. Cette proposition est adoptée à l’unanimité.

Le Secrétaire enverra aux journaux un communiqué destiné aux résistants qui seront avisés que cette abstention constitue une protestation contre le sort fait par le Gouvernement aux victimes de la Guerre et à leurs ayant droits.

Séance du 27 novembre 1947.

« Présents : A.S., CHARTREUSE, F.F.L., F.N.A.R., F.T.P.F., MEDECINS de la RESISTANCE, MERLIN GERIN, OISANS, RESEAUX, RESISTANCE FER, SUPPLICIES DE LA GESTAPO, U.M.R., VERCORS, BATTAILH, ROBIN, THOMAS, VERNET, R. BUISSON, SEROUL, FLAUREAU, MICHALLON, RAVINET, TISSOT, GAMONNET, GODFAR, NAGENRANFT, REYNAUD, COHN, BRISAC, CHAVANT.

Président : THOMAS Secrétaire : HERBAUT

La séance est ouverte à 21 heures.

THOMAS présente ALBRON Président des F.F.L. de l’Isère.

« [...] A propos du P.V. de la réunion du 30 octobre, Robert BUISSON demande :

1°/ - Pour quelles raisons il n’est pas indiqué que GAMONNET au nom du Réseaux F.2 avait répondu oui (page 3).

GAMONNET répond qu’il s’est rendu au Secrétariat pour faire rectifier son vote.

2°/ - Qu’il soit indiqué, en ce qui concerne le GRESIVAUDAN, que la réponse de cette association serait donnée à la suite d’une prochaine Assemblée Générale (p. 3)

[...]

BATTAILH et R. BUISSON font remarquer qu’il avait été convenu (page 8 et 9) que l’Union Départementale, non seulement s’abstiendrait de participer aux manifestations officielles, mais aussi qu’elle conformerait son attitude à celle de l’U.F.A.C..

Le Secrétaire déclare qu’il n’avait pas été question de la manifestation de l’U.F.A.C.. Ce n’est que par la suite qu’il a connu cette manifestation et aussi une autre pour laquelle l'Union Départementale avait aussi été sollicitée.

Le Président lit la première question à l’Ordre du Jour.

CHAVANT estime, étant donné l’accord unanime sur le programme du C.N.R. qu’il suffit de le relire et de préciser les points sur lesquels pourraient apparaître des divergences.

Pour R. BUISSON , l’Union Départementale doit trouver l’aliment nécessaire à son activité dans son application.

Il demande que plusieurs soirées soient consacrées à son examen. Pour aujourd’hui il conviendrait seulement de lire le programme en soulevant au passage les objections qui paraîtraient nécessaires.

MICHALLON et THOMAS se plaignent de n’avoir pas reçu ce programme.

Le Secrétaire déclare qu’il attend encore un certain nombre d’exemplaires promis par SEGAL.

[...]

FLAUREAU fait remarquer qu’en parlant de cet incident il ne fait que citer un exemple concret, ce qu’il conviendra d’ailleurs de répéter fréquemment en cours de lecture.

R. BUISSON déclare qu’il ne doit pas y avoir d’inconvénient à intervertir l’ordre des questions.

Après avoir entendu FLAUREAU on pourra lire le programme du C.N.R. et, si possible, entraîner deux ou trois points particuliers.

[...]

Il demande que l’Assemblée veuille bien fixer une prochaine date pour régler l’incident en présence de FLAUREAU et de NAL.

COLI partage l’avis de R. BUISSON.

FLAUREAU accepte n’importe quel jour de la semaine prochaine, pour une réunion qu’il estime nécessaire afin d’empêcher un développement public d’une affaire sur laquelle tout n’a pas été dit.

MICHALLON émet l’hypothèse que NAL, interrogé en séance publique, n’a pas voulu découvrir ceux de son Parti et qu’il a peut-être accepté la paternité d’un tract dont il n’était pas l’auteur.

Il demande, étant donné l’état de santé de NAL, que la séance ait lieu assez tôt en soirée, vers 18 h 15.

REYNAUD propose la mise au voix de la proposition REYNAUD.

R. BUISSON s’élève contre cette proposition excessivement habile.

Il faut d’abord régler l’incident et, s’il y a lieu, faire ensuite paraître un communiqué dans les journaux.

BATTAILH demande que le Secrétaire se mette en rapport avec NAL pour fixer un jour de la semaine prochaine.

Après consultation les membres présents demandent au Secrétaire de proposer à NAL le jeudi 4 décembre à 18 h 15 au Salon Rouge de la Préfecture.

Sauf contre ordre, les Délégués sont donc convoqués.

GAMONNET prévoyant que des révélations sur des affaires confidentielles de l’époque clandestine vont être faites, demande que le nombre des présents soit limité aux seuls membres titulaires de l’Union Départementale.

Le Secrétaire fait remarquer qu’il a été prévu que seuls les membres titulaires devaient assister aux réunions, mais que cette règle n’a jamais été respectée. Il s’agit aujourd’hui de savoir si on va limiter le nombre des résistants autorisés à assister à des réunions qui les intéressent.

BATTAILH proteste contre la proposition de GAMONNET en faisant remarquer que le Délégué Titulaire de son Organisation n’assiste pour ainsi dire jamais aux réunions, réunions auxquelles il assiste presque toujours lui-même, bien que suppléant.

La présence des deux Délégués lui paraît nécessaire afin d’obtenir la continuité.

REYNAUD propose que les Délégués Titulaires suppléants soient autorisés à assister à la réunion du jeudi.

Le Président propose que les suppléants soient seulement auditeurs.

Ces deux propositions sont acceptées à l’unanimité.

La question n° 2 vient à l’Ordre du Jour : STATUTS.

R. BUISSON au nom des F.T.P.F. propose un texte tendant à la modification des statuts.

Le Secrétaire est invité à transmettre un exemplaire de cette proposition à chaque Association en vue de sa discussion au cours de la prochaine séance.

THOMAS donne la réponse écrite des F.F.L. au mémorandum F.T.P.F. et lit les statuts de cette Association (réponse en annexe).

MICHALLON à la suite de la réunion du Comité médical de la Résistance lit une déclaration de cette Organisation (texte joint).

COLI promet au Secrétaire la réponse écrite de l’U.M.R. qui avait été lue au cours de la précédente réunion.

QUESTIONS DIVERSES

R. BUISSON voudrait savoir quelle suite a été donnée à sa demande d’enquête concernant un incident de l’époque clandestine.

Le Secrétaire qui avait été chargé de l’enquête désire, étant donnée l’importance de l’affaire, qu’une Commission en soit chargée.

Cette Commission composée comme suit : BUISSON, CHAVANT, HERBAUT et ROBIN se rendra dans la Région de la Mure le samedi 6 décembre. Départ à 13h30 du Bureau Vercors. ROBIN prêtera sa voiture.

Le Secrétaire prendra au préalable les contacts nécessaires avec les personnes susceptibles d’être interrogées.

Lecture est donnée d’une lettre de la F.N.D.I.R.P. qui invite la Résistance Unie à son Congrès Départemental le dimanche 30 novembre.

A la demande de R. BUISSON le Secrétaire assistera à ce Congrès au cours duquel il fera une brève déclaration pour faire connaître l’accord sur le maintien de l’esprit de la Résistance et la volonté d’application du C.N.R.

NAGENRANFT demande qu’une Délégation de l’Union Départementale soit désignée pour assister à l’Inauguration d’une plaque à la mémoire des cheminots patriotes morts au Champ d’Honneur.

Cette Délégation aura la composition suivante : NAGENRANFT, BATTAILH, BUISSON, COLI, ROUGET (porteur du drapeau). En raison des événements actuels, la date et l’heure peuvent être modifiées, NAGENRANFT tiendra le Secrétaire au courant.

TISSOT demande si un secours peut être accordé à une polonaise et à son enfant dont le soutien, déserteur de l’armée allemande, est venu combattre aux côtés des hommes du maquis avant d’être fait prisonnier et probablement tué. Il est convenu que le Secrétaire s’efforcera de vêtir l’enfant en prélevant sur les reliquats du vestiaire qui n’ont pu être distribués aux combattants à cause de l’exiguïté des tailles.

COLI annonce que l’U.M.R. va organiser son arbre de Noël. A cette occasion, il demande si l’Union Départementale ne peut en faire autant au profit de tous les résistants qui trouveraient là une occasion de se rencontrer à nouveau et de fraterniser.

Le Président et TISSOT font ressortir les difficultés matérielles insurmontables d’une telle réalisation.

TISSOT citant l’exemple de l’Oisans qui avait réuni près de 800 enfants croit qu’il faudrait prévoir une formidable affluence, même si tous les résistants ne sont pas aussi chargés de famille que lui.

L’Assemblée décide qu’il ne peut être donnée suite à la proposition COLI.

La date de la prochaine réunion au cours de laquelle sera examiné le programme du C.N.R. et traitée la question des statuts sera fixée le jeudi 4 décembre 1947, à l’issue de la réunion.

La séance est levée à 23h30.

PROJET DE MODIFICATION DES STATUTS DE L’UNION

DEPARTEMENTALE PRESENTE PAR R. BUISSON AU NOM DES F.T.P.F.

L’Union Départementale des Organisations de Résistance de l’Isère s’organise en application des principes de la démocratie.

Chaque Organisation adhérente est représentée à l’Union Départementale par un Délégué ou par fraction de 500 membres.

Ce Délégué est élu démocratiquement par l’ensemble des adhérents consultés dans une ou plusieurs Assemblées Générales provoquées à cet effet.

Le respect de ces élections intérieures sera témoigné par un Procès Verbal de l’Organisation précisant, le lieu, la date, le nombre des présents et les résultats des votes.

Tous les votes pour l’élection des organismes de direction ou pour les décisions à prendre se font démocratiquement à la majorité absolue des voix lesquelles correspondent exactement à l’effectif des organisations représentées.

Un règlement particulier réglera le contrôle des effectifs. »

Notes
1966.

ADI, 2797 W 92.