3. Conclusion

A côté de l’offre de biens publics à l’échelon nationale de nombreux biens publics sont proposés par les collectivités locales. Nous retenons la définition des biens publics locaux proposée par Derycke et Gilbert (1988). Les biens publics locaux sont ‘des biens localement produits et utilisés, avec des effets géographiques plus ou moins limités, gérés et financés par des collectivités territoriales de niveau infra-étatique’. Cette définition renvoie aux caractéristiques spécifiques de l’offre de biens publics locaux, à savoir le financement et la gestion par une collectivité territoriale. Le financement et la gestion de l’offre des biens publics est la question centrale de l’économie publique locale. Dans les chapitres suivants, nous verrons que, pour certains auteurs, le financement et la nature de l’offre des biens publics locaux influencent la mobilité des ménages, et par conséquent, le prix des biens immobiliers.

Derycke et Gilbert (1988) résument les caractéristiques des biens publics locaux comme étant rarement des biens collectifs purs provoquant souvent des externalités et dont les problèmes de financement sont importants. Les biens publics locaux sont généralement des biens collectifs mixtes. En effet, ils présentent rarement simultanément les caractéristiques des biens publics purs à savoir l’indivisibilité, l’absence d’exclusion et la production jointe. Ils provoquent des effets externes qui pour reprendre la définition de Bonnafous peuvent concerner la sphère marchandes, la sphère non marchande ou collective, les satisfactions individuelles et la biosphère.

L’existence des biens publics locaux constitue un puissant facteur d’apparition d’effets externes. Deux types d’effets externes sont généralement évoqués lors de l’analyse des biens publics locaux. Ils concernent les effets de débordement et la congestion. Dans le premier cas, il s’agit de biens publics produits par une collectivité et financés par ses habitants dont les habitants d’une autre commune profitent sans participer à leur financement. Ces effets sont limités à des relations de proximité ou de voisinage. Dans le second cas, cela concerne de nombreux biens publics locaux qu’ils soient gratuits ou payants (voirie, autoroutes, piscines, musées) dont la qualité de service décroît avec l’augmentation de leur fréquentation. Ils traduisent une insuffisance permanente ou temporaire de la capacité du bien public local au regard du niveau global de fréquentation (Gannon, 1994).

Hochman et alii (1995) montrent que les biens publics locaux se caractérisent, au-delà des particularités déjà indiquées, par une localisation spécifique et par des consommateurs ayant leur propre localisation. Aussi la consommation des biens publics locaux ne peut-elle faire abstraction de l’existence de l’espace qui conduit à une différenciation des niveaux d’utilité en fonction de la distance séparant les ménages des lieux d’offre de biens publics locaux. L’homogénéité de l’offre de biens publics locaux sur le territoire d’une commune est remise en cause. Cela oblige à une réflexion simultanée sur ce qu’il se passe au sein de la commune et les effets de débordement sur les communes environnantes.

Des travaux récents tentent de dépasser les distinctions entre biens publics purs, biens publics mixtes, biens publics locaux et biens privés. Brueckner, Thisse et Zenou (1997) remplacent l’existence de biens par le concept d’aménités urbaines. Ils expliquent la localisation des différentes classes de revenus par les aménités des différentes localisations. Ils distinguent les aménités historiques, les aménités naturelles et les aménités modernes. Les aménités regroupent les le niveau d’équipements privés qu’ils considèrent comme ayant une influence sur le prix du foncier. Le concept d’aménités a l’avantage de pouvoir se soustraire à la question du financement et des caractéristiques intrinsèques de l’offre de biens publics locaux pour ne retenir que les effets (aménités positives ou négatives) qu’ils peuvent avoir sur la fonction d’utilité ou de production d’un agent économique.

Le terme de bien public local regroupe de nombreux types de biens publics aux propriétés techniques différentes (divisibilité ou indivisibilité). Certains d’entre-eux sont consommés par les agents économiques qui les financent, d’autres profitent à des agents économiques résidant dans des communes périphériques. Ils ne peuvent pas être appréhendés comme un tout. Chaque bien public est consommé à des degrés divers et par certaines catégories d’usagers. Bien que les problèmes de financement soient une question cruciale de l’économie publique locale, les biens publics ne peuvent pas être saisis dans toute leur complexité par les dépenses engagées pour financer leur offre.

Dans les chapitres suivants, nous verrons comment les modèles de localisation et de capitalisation ont pris en compte l’existence des biens publics locaux pour expliquer les choix de localisation résidentielle des ménages.