3.1. Le modèle initial de Yinger

Le migrant choisit sa localisation résidentielle en fonction du taux de la taxe sur la propriété, du niveau de l’offre de biens publics locaux par ménage E dans chaque commune. Ainsi le montant qu’il est prêt à payer par unité de logement dans une commune dépend de l’offre de biens publics et de son financement. Le ménage possède une courbe de rente offerte du type :

Avec
.
L’enchère ne dépend pas de la taille de l’habitation,
.

Ainsi un ménage est prêt à payer pour un logement possédant H unité de logement :

La valeur vénale approximative du logement correspond à :

avec r le taux d’actualisation et un horizon infini.

Le montant de la taxe foncière qui est la seule ressource locale pour une durée de vie infinie est égal à :

Chaque ménage consomme le service rendu par le logement H, un bien composite servant de numéraire Z et les biens publics locaux E. Le ménage maximise son utilité sous contrainte de son budget.

Soit le lagrangien

avec le multiplicateur de Lagrange. Les conditions de premier ordre sont les suivantes :

A partir de la dernière équation des conditions de premier ordre, l’on peut déterminer l’effet de la taxe sur la propriété, sur la valeur vénale du logement.

Soit l’équation différentielle du premier ordre à variables séparables :

L’enchère s’applique à une offre de biens publics locaux E*.

Reprenons la dernière équation du système (4.14) et multiplions la par r, on obtient l’intégrale :

On peut décomposer
en une intégration par partie, on obtient

En réintégrant l’équation (4.17),

On obtient alors :

Avec P(0) qui représente la fonction d’enchère avant impôt.

Pour un niveau d’offre de biens publics E*, on obtient la fonction d’enchère suivante :

avec P*(E*) la fonction d’enchère pour un niveau d’offre de biens publics locaux E*.

L’équation (4.22) représente la capitalisation du taux de l’impôt foncier dans le prix du bien immobilier. Le niveau de la capitalisation ne dépend ni des préférences des ménages, ni du niveau de biens publics locaux offerts. Il n’est fonction que de la pression fiscale et du taux d’actualisation.

La valeur du logement correspond à la valeur du bien immobilier en l’absence de fiscalité minorée du prélèvement fiscal :

Il est possible de mesurer l’impact sur la fonction d’enchère d’une modification du niveau d’offre de biens publics locaux pour un taux de fiscalité donné t*. Pour ce faire, il faut recourir à une fonction d’utilité de type Cobb-Douglas :

En reprenant les deuxième et troisième équations du système (4.14), on en déduit :

La pente de la courbe d’enchère, à taux d’imposition donné, dépend des préférences des ménages pour la taille du logement et pour le montant d’offre de biens publics locaux. La pente est directement fonction du taux marginal de substitution entre taille du logement et consommation collective financée par les résidants de la commune.

L’équation (4.25) est une équation différentielle de premier ordre séparable avec K comme constante d’intégration :

La fonction d’enchères est donc définie par les équations (44) et (48) :

Pour un taux de fiscalité fixé à 0, la fonction d’enchères P*(E) :

L’équation (44) donne la fonction d’enchères :

En intégrant l’équation (50) dans l’équation (51), on obtient :

Supposons que les services de logement peuvent être décrits par une fonction multiplicative des caractéristiques de X1 à Xi:

On obtient alors :

ou encore,

Cette dernière équation est la définition de la capitalisation pour Yinger. Elle peut faire l’objet d’un test économétrique. Elle décrit la capitalisation des variables locales fiscales dans la valeur des biens immobiliers. Elle s’applique ainsi à la variation de l’offre de biens publics locaux et des taux de taxe entre communes. ‘Local fiscal variables are completely capitalized into house values if the variation in house values within or across the juridictions inhabitued by similar households exactly reflects what these households are willing to pay for the difference service-tax packages in different locations’ (YINGER, 1982, p. 923). Par ailleurs, les ménages ne considèrent pas le budget de chaque commune. Les ménages ne prennent en compte que la quantité de l’offre de biens publics locaux et de son financement par une taxe.

Le taux d’imposition foncière a un effet négatif sur le prix des biens immobiliers. Il est complètement capitalisé. En revanche, le niveau de l’offre de biens publics locaux dépend des préférences des ménages migrants représentées par le rapport c3/c2. La capitalisation des biens publics locaux dépend du taux marginal de substitution entre la taille du logement et l’offre de biens publics locaux puisque :

Une augmentation de l’offre de biens publics locaux, ceteris paribus, augmente la valeur vénale des biens immobiliers. La capitalisation de la taxe sur la propriété agit de manière uniforme et négative. Le taux de la taxe sur la propriété ne devrait pas intervenir dans le choix des ménages en termes de localisation résidentielle puisque la valeur vénale des biens immobiliers intègre complètement le montant de l’impôt sur la propriété. En effet, une hausse de la taxe dans une commune provoque une baisse de la valeur vénale des logements du montant d’impôt payé. Aussi, seul le niveau de l’offre de biens publics locaux influence-t-il les choix résidentiels des ménages.

Ainsi dans le modèle de Yinger, les différentiels de fiscalité sont complètement capitalisés dans la valeur des biens immobiliers alors que la capitalisation de l’offre de biens publics locaux dépend des préférences des ménages. Plus les ménages tirent de l’utilité de l’offre de biens publics, plus la valeur des biens immobiliers est élevée.

Par ailleurs, Yinger considère que la capitalisation est un phénomène durable. Il existe une stabilité des préférences des migrants qui fixent les enchères et de celles des résidants qui déterminent par leur vote l’offre de biens publics locaux et le niveau de la taxe. Cela suppose que les migrants et résidants possèdent des préférences identiques. Les ménages n’ont pas les mêmes préférences d’une même commune à l’autre.