3.3. La discordance entre les prix hédonistes et les dispositions à payer

Le marché de l’immobilier permet d’illustrer la discordance entre les prix hédonistes et les dispositions à payer. L’hypothèse d’équilibre du marché permet d’obtenir que le prix hédoniste corresponde aux dispositions à payer des ménages pour les caractéristiques du logement. L’équilibre du marché n’est atteint que lorsque les ménages trouvent le logement dont les caractéristiques satisfont leurs préférences compte tenu de leurs contraintes de revenus. Dans le même temps, l’ensemble des logements doit être occupé par les ménages. Par ailleurs, l’hypothèse d’équilibre de marché ne peut être réalisée qu’à la condition que les ménages soient parfaitement informés sur les prix des biens et leurs caractéristiques, et que les coûts de transaction soient nuls. En outre, les prix doivent s’ajuster instantanément à l’offre et à la demande. Cette situation n’existe pas généralement sur le marché et conduit à des biais. Ces derniers remettent-ils en cause la pertinence de l’hypothèse d’équilibre du marché ?

L’existence de coûts de transaction conduit à des biais d’estimation. L’ajustement des ménages au marché se réalise de la façon suivante : les ménages ne changent de logement que si le surcroît d’utilité provoqué par un nouveau logement est supérieur aux coûts d’information et de transaction induits par le changement de logement. Les coûts de transaction et d’information conduisent à une divergence des prix hédonistes et des dispositions à payer des ménages pour les caractéristiques. Le prix hédoniste n’intègre l’évolution des dispositions à payer que lorsque les gains d’utilité sont supérieurs ou égaux aux coûts de transaction et d’information.

D’autres phénomènes peuvent conduire aux mêmes divergences. En effet, l’existence d’anticipation des ménages sur l’évolution des caractéristiques, notamment environnementales, du logement peut modifier le consentement à payer pour le prix de ses caractéristiques. Les prix des logements sont alors différents des prix d’équilibre. Cela conduit à une surestimation ou à une sous-estimation de la disposition à payer des ménages pour les attributs du logement. Si les anticipations des ménages prévoient une baisse de la qualité d’une caractéristique, l’estimation du prix implicite par la méthode des prix hédonistes conduit à une sous-évaluation du prix hédoniste. Dans le cas inverse, le prix hédoniste est surévalué.

‘En définitive, même si les risques de voir le marché du logement s’écarter de l’équilibre semblent nombreux, les erreurs dans les estimations de la disposition à payer ne revêtent souvent qu’un caractère aléatoire. Seul un marché orienté dans une même direction (ou anticipé comme tel) pourrait provoquer un ajustement incomplet (ou une totale adaptation à des prévisions changeantes) et introduire un biais systématique (SOGUEL, 1994, p. 44).’