1.2. L’autocorrélation et l’hétérogénéité spatiales

L’existence d’autocorrélation a fait l’objet d’une importante littérature : Cliff et Ord (1973, 1981), Klaassen et Paelink (1979), Upton et Fingleton (1985), Anselin (1988). Plusieurs facteurs sont avancés pour expliquer la genèse de l’autocorrélation spatiale : les erreurs de mesure des données dans des espaces contiguës et l’existence d’interactions spatiales liées aux phénomènes étudiés.

Les analyses en coupe instantanée transversale sont soumises à la présence d’effets spatiaux. En effet, les observations sont souvent collectées de manière agrégée. Il existe régulièrement une divergence entre l’étendue du phénomène mesuré et la délimitation des zones servant à la collecte des informations. De nombreuses erreurs de mesure sont ainsi engendrées. Par ailleurs, des effets de débordement existent entre les zones d’étude. Aussi, par un effet de contagion, les erreurs de mesure dans une zone peuvent-elles entraîner des erreurs de mesure dans une autre zone. Ces effets de débordement des erreurs de mesure sont l’une des principales raisons d’apparition d’interaction spatiale.

Anselin (1988, p. 12) illustre le risque d’erreur de mesure en recourant à un exemple. Soit trois zones A, B et C dont les observations seront agrégées au niveau 1 et 2.

Figure 7.1 : Les erreurs de mesure lors de l’agrégation des données
Figure 7.1 : Les erreurs de mesure lors de l’agrégation des données

Source : Anselin (1988, p.12)

Dans le cadre d’une régression, on obtient les relations suivantes :

La seconde explication avancée pour justifier l’apparition d’autocorrélation spatiale résulte du caractère intrinsèque des phénomènes étudiés. En effet, les localisations et les distances sont des caractères importants de la structuration des comportements des agents économiques et de leur inscription dans l’espace. La distance constitue notamment un frein à la diffusion des biens et aux déplacements des individus. Il existe des relations entre les observations qui dépendent des distances les séparant. Par conséquent, ce qui est observé à un endroit est déterminé (en partie) par ce qui se passe ailleurs dans le système (ANSELIN, 1988, p. 12).

En plus de la présence d’autocorrélation spatiale, il peut exister également de l’hétérogénéité spatiale. L’hétérogénéité spatiale résulte de la variabilité des caractéristiques de chaque localisation (hiérarchie des places centrales, existence de disparités de développement des régions, etc.). Ceci peut être pris en compte par des modèles économétriques spécifiques. En revanche, à l’hétérogénéité des phénomènes observés, il se rajoute l’hétérogénéité des unités spatiales servant d’unités d’observation. Les unités d’observation sont rarement homogènes. Lorsque ces différences sont reflétées dans des erreurs de mesure, cela induit de l’hétéroscédasticité à l’image de l’omission de certaines variables ou de la mauvaise spécification du modèle (ANSELIN, 1988, p. 13).

La présence d’effets spatiaux conduit au viol répété des hypothèses de la méthode des moindres carrés. Les tests standard utilisés supposent qu’il n’existe pas d’autocorrélation des résidus. L’autocorrélation des résidus viole ces hypothèses et les tests statistiques standard amènent à des conclusions incorrectes. Les résidus qui sont positivement autocorrélés sous-estiment la variance résiduelle de la population et les t de Student sont surestimés (BASU et THIBODEAU, p. 62). C’est pourquoi, il est indispensable de tester la présence d’autocorrélation et d’hétérogénéité spatiale pour les modèles dont les observations ont des caractéristiques spatiales. Dans le cas où des effets spatiaux sont présents, il faut recourir aux méthodes et aux techniques ad hoc développées par la statistique et l’économétrie spatiales.