III - IMPORTANCE DU SYNDICAT BANCAIRE :

Eurotunnel s'est engagé auprès des banques prêteuses à respecter des obligations très précises sur un certain nombre de points, à savoir : la structure des sociétés du groupe, le développement du projet, l'exploitation du système de transport, l'exécution des contrats, les assurances et l'information financière et comptable. De même, le syndicat bancaire a accordé ces 50 milliards de francs à des conditions très strictes. Tout d'abord, il faut savoir que cette somme, répartie en six lignes, était disponible pour une période de sept ans à compter de juillet 1988, c'est-à-dire que Eurotunnel pouvait faire appel aux crédits jusqu'au milieu de 1995, soit deux ans après la date d'ouverture prévue à l'origine ; le remboursement de cette somme devait se dérouler de juillet 1995 à juillet 2005. Néanmoins, il était stipulé dans la convention que Eurotunnel avait la possibilité de refinancer la totalité des crédits alloués par le syndicat bancaire. En ce qui concerne le coût prévisionnel de ce prêt, Eurotunnel a estimé en 1987 que les frais financiers s'élèveraient à 2,3 milliards de francs en 1993, atteindraient leur pic en 1995 avec 3,5 milliards pour ensuite diminuer régulièrement, soit 2,7 milliards en 1998, 1,7 milliard en 2003... etc ; de même, Eurotunnel a estimé les remboursements de l'ordre de 8 milliards de francs en 1995, puis de 5,6 milliards en 1998 et de 1,5 milliard par an les années suivantes. Cependant, selon les termes de la Convention de crédit, il existait cinq cas de figure dans lesquels Eurotunnel pouvait être reconnu en position de défaillance, à défaut de pouvoir terminer les travaux avec les ressources prévues ou d'être capable de rembourser selon le calendrier établi. Si tel était le cas, les banques pouvaient tout-à-fait légalement prendre des mesures, pouvant aller jusqu'au remboursement exprès de ses prêts, voire jusqu'à la prise de contrôle pure et simple de la construction ou de l'exploitation de l'ouvrage. Avant d'en arriver à cette décision extrême, les banques bénéficiaient d'indicateurs financiers (appelés dans le langage de la finance "ratios de couverture" 213 ) leur signalant toute aggravation de la situation financière d'Eurotunnel et leur permettant, de ce fait, de refuser à Eurotunnel le remboursement de sa dette ou la distribution de dividendes, ou de cesser de lui verser des crédits.

Notes
213.

Ratio (du latin ratio "calcul, compte, raisonnement") : Indicateur constitué par un rapport établi entre deux valeurs extraites des comptes d'une entreprise, ou d'une nation, aux fins d'évaluation. Le taux de couverture est le rapport exportations sur importations (des biens et services), ECHAUDEMAISON, C.-D., Dictionnaire d'Economie et de Sciences Sociales, op. cit., pp. 366-367.