I - LE TUNNEL VU PAR LES MEDIAS :

L'inauguration du tunnel 310 , le vendredi 6 mai 1994, a été l'occasion pour un grand nombre de périodiques de consacrer des pages entières d'articles, parfois illustrés de caricatures, à partir desquels nous avons pu dégager l'impact sociologique du tunnel sous la Manche sur la population britannique. De la description purement factuelle de la cérémonie aux analyses psycho-sociologiques, en passant, entre autres, par les détails techniques du système de transport, l'historique du projet, les réactions de la population de part et d'autre de la Manche, la question de l'environnement et l'avenir des compagnies maritimes et aériennes, les journalistes ont eu matière à développements.

Avant de revenir sur le rôle des médias et de comparer les approches française et britannique, il nous a semblé intéressant de mentionner une interview 311 de l'historien Théodore Zeldin 312 . Cet entretien a l'intérêt d'annoncer les principaux thèmes abordés par les quotidiens en relation avec l'impact socio-économique du tunnel sous la Manche. Théodore Zeldin s'est penché plus particulièrement sur les relations franco-britanniques. Selon lui, d'un point de vue sociologique, il règne entre la France et l'Angleterre un climat d'incompréhension et le tunnel ne saurait rapprocher ces deux pays par sa seule existence. Il analyse les choses de la façon suivante : la presse britannique est pleine de préjugés francophobes auxquels s'ajoute une certaine autofascination anglo-anglaise ; les Français, quant à eux, ne cherchent pas vraiment à mieux se faire connaître et font preuve d'une autosatisfaction franco-française qui masque leurs insuffisances. Les Anglais et les Français sont, selon lui, incapables d'aboutir à une forme de "réconciliation" comme celle qui est née entre la France et l'Allemagne, par suite de la politique menée par de Gaulle et Adenauer à la fin des années cinquante, car l'Angleterre fait preuve de trop de méfiance à l'égard de la France. Le Foreign Office 313 lui-même qualifie les Français de "difficiles" avec des "mentalités spéciales".

Si les Français "célèbrent" le tunnel alors que les Anglais relèvent simplement son existence, cela s'explique par le fait qu'ils ont des raisons de fêter l'évènement : depuis toujours, le tunnel a été une idée française et sa réalisation est devenue inévitable au fil du temps ; les Anglais, quant à eux, ne comprennent pas vraiment l'obstination des Français à vouloir construire un tunnel qu'ils ne semblent pas très enclins à emprunter si on se rapporte au niveau de fréquentation des ferries et des avions avant l'ouverture du tunnel. Si, pour les Français, le tunnel et le train à grande vitesse représentent une merveille de la technique, les Anglais considèrent le tunnel comme "pittoresque et commode", mais vu le retard pris dans la construction de la ligne à grande vitesse côté anglais, ils ne peuvent en tirer fierté. Selon un directeur d'établissement de crédit à Londres, "les Français adorent leur TGV. Pour nous, le tunnel est le prolongement logique du réseau TGV" 314 ; à Paris, une personne, assurant les mêmes fonctions que lui dans un établissement similaire, considère que "les Britanniques n'aiment pas les grands projets. Ils trouvent que ces trucs sont lourds, sales et coûtent trop d'argent. En plus, avec le tunnel, la Grande-Bretagne n'est plus une île" 315 . Théodore Zeldin qualifie l'attitude des Anglais de mesquine car elle est la preuve qu'ils sont incapables de mettre en oeuvre de grands projets qui nécessitent de gros investissements ; il est vrai que pour eux la tendance était plutôt à la rentabilité immédiate et aux bénéfices à court terme, ce qui n'était pas vraiment le cas avec le tunnel sous la Manche. La détermination de Margaret Thatcher à vouloir construire le tunnel s'expliquait par le fait qu'elle croyait que l'activité économique allait fortement bénéficier des effets du tunnel sur le commerce.

Sur la sempiternelle question de l'isolationnisme, Théodore Zeldin considère que ce serait une erreur de continuer à croire que l'Angleterre reste à l'écart des autres pays car il y a fort longtemps qu'elle dépend de l'extérieur pour vivre.

Dans le même ordre d'idées, l'inconscient collectif ne souffre plus de la peur obsessionnelle d'une invasion française ; les angoisses du XIXème siècle liées aux maladies vénériennes, au libertinage, aux romans licencieux...etc, en provenance du continent ont disparu pour faire place à la crainte des renards enragés et à celle des directives européennes en provenance de Bruxelles. Enfin, il insiste sur la grande part de responsabilité des médias, populaires ou de qualité, qui, de tout temps, se sont employés à exacerber une francophobie certaine. Il reste cependant plutôt optimiste sur l'avenir des relations franco-britanniques puisqu'il déclare : "Tout reste à faire" 316 .

Théodore Zeldin fait preuve, à notre avis, d'une grande clairvoyance. Son jugement nous paraît tout-à-fait fondé ; il semble avoir une connaissance approfondie du sujet. Il précise d'ailleurs dans ce même entretien : "Je passe ma vie dans un pays et dans l'autre, j'essaie donc de dire la réalité des choses" 317 . On ne saurait qualifier ses propos de pessimistes, mais plutôt de réalistes.

L'inauguration du tunnel n'a pas été perçue de la même façon par la presse du côté français et du côté britannique ; on note aussi un certain décalage, ce qui est classique, entre la presse de qualité et la presse populaire. Les principaux quotidiens français 318 ont publié des suppléments afin de pouvoir traiter amplement du sujet sous tous ses aspects ; la plupart des journalistes français se sont accordés pour qualifier l'inauguration du tunnel de cérémonie historique dans la mesure où elle symbolisait des idées importantes, telles que la fin de l'isolationnisme pour l'Angleterre, la promesse éventuelle d'une nouvelle amitié franco-britannique ou encore l'ouverture de la Grande-Bretagne sur l'Europe.

La presse britannique, quant à elle, n'a jamais montré un réel enthousiasme face au tunnel. L'évènement a souvent été relégué au second plan, quand il était traité. Un quotidien français 319 , en l'occurrence, a publié un article 320 qui révèle et dénonce l'attitude de la presse britannique à l'égard du tunnel sous la Manche, au lendemain de son inauguration. Contrairement à Théodore Zeldin, qui semble penser que la presse populaire et la presse de qualité ne font qu'une lorsqu'il s'agit de parler du tunnel, cet article les met en opposition. En effet, la presse de qualité a salué l'évènement en le qualifiant d'"historique", alors que les journaux populaires l'ont franchement ignoré. L'intérêt de la presse de qualité pour le tunnel s'est traduit par de volumineux suppléments consacrés au "rêve devenu réalité" de la part de certains grands quotidiens britanniques 321 , alors que le désintérêt de la presse populaire 322 se traduisait par l'absence de titre de manchette à propos de l'inauguration du tunnel. Cette tendance était largement prévisible ; un quotidien 323 a d'ailleurs rappelé le titre de l'article d'un de ces journaux populaires 324 à l'occasion de la jonction des tunnels français et britanniques, en décembre 1990 : "On sent une odeur d'ail passer par le trou de la sonde" 325 . Daniel Schneidermann 326 rapporta également ces propos mais de façon plus laconique : "ça sent l'ail" 327 , alors que son confrère britannique, John Ardagh, semblait plutôt enclin à penser que les Anglais craignaient plus Bruxelles, Maastricht, Jacques Delors... c'est-à-dire tout ce qui touchait à l'Europe, que les Français et leurs coutumes.

Un autre quotidien 328 , plutôt incisif, titrait : "Le tunnel ouvre aujourd'hui - et ferme" en référence au fait que le système de transport ne pouvait pas ouvrir dans l'immédiat. Il se montrait assez acerbe devant l'attitude "entièrement négative" du peuple anglo-saxon qui associe la perte de l'insularité à l'arrivée certaine "de la rage et autres maladies étrangères, d'étrangers indésirables, de terroristes, sans parler de la menace des Panzer divisions en cas de guerre" 329 . Selon le journaliste Nicholas Faith, l'attitude du gouvernement britannique risquait fort d'être "citée par les futurs historiens comme le symptôme le plus évident du déclin britannique dans le dernier quart du XXème siècle" 330 .

Un article purement factuel relatait le déroulement de l'inauguration du tunnel à l'aide d'une multitude de propos recueillis auprès des diverses personnalités présentes sur les lieux. Les détails de la cérémonie étaient d'une importance mineure par rapport aux citations qui, bien qu'elles aient sans doute été triées sur le volet, étaient néanmoins assez révélatrices de l'état d'esprit de leurs auteurs : la Reine d'Angleterre, Elizabeth II, déclara : "C'est la première fois dans l'histoire que les chefs d'Etat de France et de Grande-Bretagne se rencontrent sans avoir dû prendre le bateau ou l'avion", soulignant ainsi la fin réelle et historique de l'insularité britannique ; plus tard cependant, elle évoqua aussi "l'une des plus grandes réussites technologiques du monde" 331 .

François Mitterrand, quant à lui, très moralisateur, s'attarda sur "un tunnel qui permettra d'ajouter une dimension supplémentaire à notre voisinage... Une entente durable et profitable à une seule condition : celle de le vouloir" 332 , insistant bien sur la notion incontournable de volonté dans tout projet de grande ampleur.

Deux autres citations, très révélatrices de l'état d'esprit britannique typique, ont été rapportées dans ce même article : celle de John Major qui démentait les propos de Théodore Zeldin sur le fait que les Britanniques ne sont pas isolationnistes : "Nous sommes toujours une île. C'est peut-être le continent qui est devenu une île" 333 , à moins qu'il ne s'agisse-là simplement d'un trait d'humour britannique, et celle de Sir Alastair Morton qui exprima sa satisfaction de voir "la première souveraine britannique de l'Histoire revenir en toute sécurité et par la terre d'une aventure étrangère" 334 . Ces propos relevés au cours de l'inauguration se passent de commentaires car ils sont, me semble-t-il, assez parlants.

Laurent Zecchini 335 s'est inspiré de la célèbre citation de Shakespeare pour le titre de son article 336 : "Etre ou ne pas être insulaires". Ses propos étaient tout-à-fait intéressants dans le cadre d'une approche sociologique des Britanniques face au tunnel. Il a commencé son article en faisant référence à un éditorial récent d'un quotidien britannique 337 : "Beaucoup de gens préfèreront traverser par ferry pour sentir la brise salée sur leurs joues et voir le ciel, comme nos ancêtres marins. Cela n'a rien à voir avec la peur. Mais que restera-t-il du sens de l'aventure, de "l'étranger" ? Au lieu de regarder les blanches falaises de Douvres grossir de façon magique, nous nous fraierons notre chemin à travers leurs entrailles". On pouvait sentir beaucoup de nostalgie et très peu d'enthousiasme dans ces propos. Laurent Zecchini a révélé que la presse populaire britannique a de toute évidence contribué à pérenniser les peurs ancestrales telles que le terrorisme, les accidents et la rage. Pourtant, Eurotunnel a diffusé des brochures d'informations, avec chiffres à l'appui, soulignant les efforts accomplis dans la lutte contre la rage et les résultats positifs (1285 cas de rage recensés en France en 1992 contre seulement 261 en 1993, soit une chute de 80 %) afin de rassurer la population britannique.

Dans un autre quotidien 338 , il était question d'un lien physique établi sans doute à jamais, entre la France et l'Angleterre, sous la forme d'un tunnel qui, à lui seul, aurait le pouvoir d'"abolir, psychologiquement, tous les divorces et les querelles entretenus depuis des siècles" ; ce point de vue était en opposition avec celui de Théodore Zeldin sur l'impact que le tunnel pouvait avoir sur les relations franco-britanniques.

Un aspect très intéressant de la question a été présenté dans un autre article 339 , à savoir le rôle et la portée symbolique des grands projets de liaison dans la constitution et le développement des Etats, avec toutes les craintes et les peurs que cela peut engendrer. Cet article est axé sur une comparaison entre le tunnel sous la Manche et d'autres projets appartenant au passé, au présent ou à l'avenir en fonction de leur impact sur les échanges interrégionaux ou internationaux. Il est remonté très loin dans le passé puisqu'il citait le cas de la Chine impériale qui, grâce au Grand canal joignant le Fleuve Jaune au Fleuve Bleu, a pu trouver son unité ; la Rome impériale a pu conserver sa cohésion grâce au gigantesque réseau routier reliant la capitale aux provinces ; plus près de nous, la France a pu être centralisée grâce aux canaux de Sully, aux ponts d'Eiffel, aux chaussées de Trudaine et aux chemins de fer de Freycinet ; les tunnels ferroviaires du Saint-Gothard (1882), du Simplon (1906) et du Lötschberg (1913) ont permis à la Suisse d'être un Etat à part entière au lieu d'une juxtaposition de cantons ; au Japon enfin, grâce aux nombreux ponts et tunnels, un territoire éclaté a pu être unifié. Tous ces pays ont vu leurs échanges interrégionaux changer du tout au tout grâce à la mise en oeuvre de projets infrastructurels de grande ampleur. De même, les tunnels transalpins du Mont Cenis et du Mont-Blanc ont complètement modifié les échanges internationaux entre l'Europe du Nord et l'Europe du Sud.

Il faut néanmoins admettre, comme l'auteur de l'article le souligne, que si chaque nouvelle voie de communication construite ouvre de nouveaux réseaux d'échanges, cela ne comporte pas que des aspects positifs. Cela s'explique par le fait que l'ouverture des voies de communication a souvent été associée à la peur de l'autre qui représente l'inconnu, quelqu'un d'étranger, de différent. Par le passé, la découverte de la route de la soie, de l'ivoire ou de l'encens a signifié au mieux des invasions pacifiques, au pire la destruction d'un grand nombre de civilisations et de cultures. Le fait est que la plupart des grands projets d'aujourd'hui ont été conçus avant la période de récession économique que nous connaissons et suscitent donc des inquiétudes dans la mesure où ils vont à l'encontre de la tendance actuelle visant plutôt à se protéger de la suprématie des grandes puissances par peur du chômage, entre autres.

Pourtant l'ouverture des nouvelles voies de communication est aussi synonyme de progrès. Aujourd'hui, le tunnel sous la Manche signifie que le Royaume-Uni n'est plus une île par le fait qu'il est relié au reste du continent européen, donc qu'il est directement accessible et cela facilite les échanges. D'ici peu, Andorre ne devrait plus être une enclave avec la construction du tunnel du Puymorens. De même, le pont sur la Baltique reliant la Scandinavie au reste de l'Europe et le tunnel de Gibraltar reliant l'Espagne au Maroc, signifieront une continuité terrestre du cercle polaire au continent africain, ce qui n'est pas négligeable au point de vue des échanges. Dans le même ordre d'idées, les projets de tunnel au Chili sous la cordillère des Andes ou sous le détroit de Béring faciliteront grandement les échanges entre les pays.

Nicholas Colchester 340 , un spécialiste de la question, a exposé les raisons pour lesquelles le tunnel a été pour les Britanniques une source d'inquiétudes 341 . Tout d'abord, par crainte d'épidémie de rage, ils ont exigé l'installation de tout un système de barrières électrifiées et de pièges afin de parer la venue par le tunnel de mammifères en provenance du continent qui pourraient contaminer l'Angleterre. Selon lui, contrairement à Théodore Zeldin, le tunnel est surtout le symbole de la perte de l'insularité britannique, ceci pour une simple raison d'ordre pratique, à savoir le contrôle des papiers des passagers à bord de l'Eurostar qui peut paraître anodin à tout un chacun, mais qui, pour des personnes qui ont toujours pu circuler librement dans leur pays sans avoir à justifier de leur identité, signifie une restriction de leur liberté.

La question de l'Europe est très souvent soulevée dans les quotidiens. Les points de vue varient d'un extrême à l'autre ; rares sont ceux qui s'avèrent pro-européens affirmant que l'ouverture du tunnel "renforce l'idée que le destin de la Grande-Bretagne se trouve dans et avec l'Europe" 342 . A travers le tunnel s'expriment encore, pour beaucoup, "la haine naturelle du grand public britannique à l'égard de l'Union européenne" et "sa conviction fondamentale qu'on est mieux tout seuls" 343 . Un quotidien français a publié un sondage d'opinion, réalisé par la Commission européenne et publié dans un quotidien britannique, qui renforce l'idée du désintérêt britannique pour le tunnel et ce qu'il implique : "Les Britanniques se sentent moins européens que jamais" puisque 60 % d'entre eux, soit 5 % de plus qu'en 1993, se considéraient comme British 344 avant tout et 61 % d'entre eux, contre 56 % en 1993, se disaient anti-Maastricht... ce qui explique le commentaire d'un eurocrate de Bruxelles : "Je suppose qu'il faudra plus d'un tunnel sous la Manche pour faire que les Anglais nous aiment..." 345 . Au cours de la cérémonie d'inauguration du tunnel sous la Manche, François Mitterrand, égal à lui-même sur la question de l'Europe, souligna que le tunnel "est un atout majeur pour le renforcement de l'Union Européenne" et, s'adressant à la reine, il déclara : "Nous avons désormais une frontière terrestre, Madame, et ce qui se passe entre nous n'est pas indifférent au reste de l'Europe" 346 .

Un autre quotidien 347 a souligné que la liberté de circulation est assurée d'un bout à l'autre de l'Europe, ce qui est d'une importance capitale du point de vue des échanges. L'auteur de cet article a une vision très personnelle et fort intéressante des choses ; il considère que le tunnel sous la Manche constitue, paradoxalement, le pendant, à l'Ouest, de la chute du Mur de Berlin ; pour lui, la démolition d'une fortification a permis, en 1989, la naissance d'une liberté qui en 1994 a pu exister par la réalisation d'une voie de communication, les deux évènements ayant comme point commun de rapprocher des peuples, même si le contexte et les raisons sont complètement différents ; selon lui, l'avènement du tunnel sous la Manche s'inscrit dans une seule et même logique : tout comme on a su marcher sur la Lune, on peut maintenant rouler sous la Manche ; alors qu'un mur s'écroule, un tunnel se construit.

La question de l'impact du tunnel sur l'environnement a bien entendu souvent été traitée par les quotidiens, dans la mesure où la protection de l'environnement a toujours été un souci majeur des Britanniques, comme nous l'avons vu dans la première partie de notre travail. Par exemple, dans un article consacré au rôle des travaux de liaison, il est mentionné que les projets d'une telle ampleur subissent très souvent des pressions d'ordre écologique en vue de protéger l'environnement naturel (cas des ours dans la construction du tunnel du Somport) et humain (problèmes de transits et de trafics en Europe).

Un autre article 348 nous informe des initiatives prises par les responsables de l'aménagement dans un souci de protection de l'environnement. De part et d'autre de la Manche, le Kent et le Nord-Pas-de-Calais étaient des régions verdoyantes qu'il s'agissait de sauvegarder dans la mesure du possible. Du côté français, Jean-Marie Géhu, professeur d'écologie végétale de renommée internationale, a été chargé de la "revégétalisation" du site du terminal à Coquelles ; pour ce faire, il a bénéficié de la contribution de son conservatoire botanique de Bailleul (Nord). En ce qui concerne les travaux du terminal d'Eurotunnel et des voies d'accès au tunnel, Jean-Luc Nguyen, l'ingénieur d'arrondissement de Calais, considère que "dans bien des cas, nous avons amélioré l'état des lieux (...) Notamment en faisant disparaître des friches industrielles laissées à l'abandon parce que jusque-là invisibles". Il ne s'agit plus là de préserver mais d'améliorer l'environnement. En ce qui concerne les travaux du TGV dont le tracé prévoyait effectivement d'empiéter sur la forêt de Guînes, c'est finalement la forêt qui gagna quelques hectares supplémentaires (de 783 à 802). Du côté britannique, les choses étaient plus délicates dans la mesure où les Anglais étaient certainement encore plus soucieux de préserver intact le Kent que les Français le Nord-Pas-de-Calais. Les responsables de l'aménagement ont donc dû déployer des trésors d'ingéniosité et prendre de multiples précautions afin d'éviter l'irréparable. Selon les termes de la brochure d'Eurotunnel : "C'est la plus vaste politique d'environnement jamais adoptée en Grande-Bretagne pour un grand chantier" 349 . Cela n'empêcha pas un célèbre quotidien britannique populaire, de reléguer l'annonce de l'inauguration du tunnel en pages intérieures, à l'aide de deux photos, l'une rappelant ce qu'était la verte et paisible campagne du Kent avant la construction du tunnel, l'autre dénonçant les méfaits du tunnel en évoquant : "la jungle de béton des autoroutes, échangeurs et voies ferrées en cours de construction, à proximité du terminal de Folkestone" 350 .

Notes
310.

voir annexes 10 et 10 bis.

311.

DUPLOUICH, J., "Tout reste à faire", Le Figaro, 6 mai 1994, p. 9.

312.

Professeur à Oxford et doyen du Saint Anthony's College.

313.

Ministère des Affaires Etrangères.

314.

Propos rapportés par SIEGELE, L., "Eurotunnel. Fossé culturel = gouffre financier", Le Monde, article déjà cité.

315.

ibid.

316.

Propos rapportés par DUPLOUICH, J., "Tout reste à faire", Le Figaro, article déjà cité.

317.

ibid.

318.

Le Monde, Le Figaroet Libération

319.

Libération

320.

DUBOIS, N., "Les quotidiens de la presqu'île divisés", Libération, 7-8 mai 1994, p. 2.

321.

The Times, The Financial Timeset The Guardian qui s'était associé à Libération pour l'occasion.

322.

The Sun et The Daily Mail

323.

The Guardian du 6 mai 1994

324.

The Sun

325.

Propos rapportés par CAME, F., "L'Histoire écrite dans la craie", The Guardian / Libération, article déjà cité.

326.

Chroniqueur dans Le Monde.

327.

SCHNEIDERMANN, D., "Au bout du tunnel", Le Monde, 7 mai 1994, p. 23.

328.

The Independent.

329.

Propos rapportés par DUBOIS, N., "Les quotidiens de la presqu'île divisés", Libération, article déjà cité, d'après The Independent.

330.

ibid.

331.

Propos rapportés par BERGER, F., ROUSSELOT, F., "De Paris à Londres à pied sec sous la Manche", Libération, 7-8 mai 1994, pp. 2-3.

332.

ibid.

333.

ibid.

334.

ibid.

335.

Journaliste écrivant dans Le Monde.

336.

ZECCHINI, L., "Etre ou ne pas être insulaires", Le Monde supplément, 7 mai 1994, p. 26.

337.

The Daily Telegraph.

338.

SCHIFRES, M., "La cathédrale de la mer", Le Figaro, 6 mai 1994, p. 25.

339.

VALLET, O., "Manche : les angoisses du tunnel", Le Monde, 6 mai 1994, p. 2.

340.

Directeur éditorial de "The Economist Group Intelligence Unit" (Centre de Recherche de The Economist)

341.

Propos rapportés par Le Monde (supplément), 7 mai 1994.

342.

Propos rapportés par DUBOIS, N., d'après The Financial Times.

343.

ibid., d'après The Independent.

344.

Britannique

345.

ibid., d'après The Daily Mail.

346.

Propos rapportés par BERGER, F., ROUSSELOT, F., "De Paris à Londres à pied sec sous la Manche", Libération, article déjà cité.

347.

SCHIFRES, M., "La cathédrale de la mer", Le Figaro, article déjà cité.

348.

Propos rapportés par CANS, R., "Un souci méticuleux de l'environnement", Le Monde, 7 mai 1994, p. 29.

349.

ibid.

350.

Propos rapportés par DUBOIS, N., d'après The Daily Mail.