III - LA CONCURRENCE : LA BATAILLE DE LA MANCHE

La croissance globale du marché transmanche sur laquelle comptait Eurotunnel concernait la liaison Calais-Douvres. En 1991, Douvres a accueilli 16 millions de passagers, 2,4 millions de véhicules, 1,05 million de camions et 126 000 autocars. La ville de Calais, premier port continental de transit, a enregistré 16 millions de voyageurs (soit une croissance de 15 %) et a traité 16,4 millions de tonnes de fret en 1993. En dix ans, la progression a été de 130 % pour le trafic passagers et de 100 % pour le trafic du fret. En octobre 1993, à la veille de l'ouverture du tunnel sous la Manche, le trafic passagers sur la ligne Calais-Douvres s'est encore accru de 25 % en volume et le trafic du fret a progressé de 15,5 %. En ce qui concerne les autres ports, St Malo enregistrait 950 000 passagers par an en juin 1993 et investissait dans un nouveau terminal pour ses jumbo-ferries alors que Dunkerque enregistrait 2 millions de passagers et 7 millions de tonnes de fret la même année.

Les compagnies maritimes s'attendaient à perdre 40 % de parts de marché du trafic passagers et 25 % du trafic fret, mais elles comptaient sur la croissance du trafic transmanche pour survivre, principalement grâce aux tarifs compétitifs qu'elles comptaient appliquer.

Les compagnies aériennes, quant à elles, s'attendaient aussi à céder quelques parts de marché au profit de l'Eurostar. Malgré ses 3,6 millions de passagers par an dans les deux sens, qui faisaient de la ligne Paris-Londres la première route aérienne du monde en quantité, la perte était estimée à environ un tiers au bout de trois ans.

En d'autres termes, les compagnies aériennes et maritimes comptaient sur le développement des échanges pour limiter la fuite du trafic, mais il était très difficile pour elles d'évaluer la part réelle de trafic assuré par le tunnel.

En 1993, à la veille de l'ouverture du tunnel, 24 400 000 voyageurs étaient arrivés en Angleterre par bateau et 3 600 000 avaient débarqué dans les aéroports londoniens.