2) Présence du traducteur

Nettement plus heureuse est la relation susceptible de faire se réunir en des duos plus ou moins fidèles metteur en scène et traducteur ; là encore nous sommes au plus près du texte, et même en plein cœur de la dramaturgie, puisque si l'on en croit Jacques Lassalle, « le travail de traduction, c'est le moment dramaturgique par excellence » 219 . Mais cette fois, nulle concurrence entre les deux instances « d'écriture » : on pourrait s'en étonner, dans la mesure où la traduction est bien souvent considérée comme une mise en scène dans la langue. « Traduire, dit encore Lassalle, c'est déjà représenter, présenter autrement » 220 . À ce titre, elle devrait faire du traducteur l'égal du metteur en scène, et donc potentiellement un rival, ayant pour lui le privilège de l'antériorité - il travaille en amont de la mise en scène - en position de faire des choix dramaturgiques que le metteur en scène pourrait ne pas cautionner. Mais ici la « science » de la langue n'est pas en concurrence avec celle de la scène : elles se trouvent à égalité de pouvoir, parce qu'elles sont aussi à égalité de précarité, pourrait-on dire.

Notes
219.

"Du bon usage de la perte", entretien avec Georges Banu publié dans Théâtre/Public n°44, mars-avril 1982, réed. in Pauses, p. 294.

220.

Op. cit., p. 296.