I,2

• Jean-Pierre Vincent : Dans la nouvelle de Boccace, le Roi est atteint à la poitrine, quelque chose comme un zona. Ici, Tonton reçoit les jeunes sortis de l'ENA, qui n'ont pas fait la guerre d'Indochine ; il se soucie de caser tout le monde avant de partir... Mais Debré n'en est pas dupe !. Et cela se coud avec l'arrivée de Bertrand : il faut travailler à cette lumière. On a aussi la présence extraordinaire de Bertrand, qui ne dit rien. Il s'est acheté un costume en arrivant à Paris... Du coup il est trop parisien ; il se pavane pendant cette scène dure. Shakespeare aurait pu faire l'économie de la présence de Paroles, mais non. C'est comme dans la scène ou Gloucester se crève les yeux dans Lear, où il y a trois serviteurs qui sont là... Bon voilà, j'ai fait ma petite allocution préparatoire, bien magistrale, on va pouvoir y aller maintenant.

Lecture-jeu

• Jean-Pierre Vincent : J'ai une vieille idée de mise en scène, depuis six mois, ce serait de le voir entrer avec une mappemonde sous le bras...
• Les postures des seigneurs ne doivent jamais être symétriques ; il ne faut pas que vous ayez l'air d'être au garde à vous. Ici il y aura un rideau orné de fleurs de lys, mais d'une texture rigide, comme une peau d'éléphant ; il faut que vous l'ayez déjà présent, dans l'imaginaire.

Lecture suite

• Jean-Pierre Vincent : Il faudra que ce soit plus rapide, plus allant. Pierre, tu devrais rester à faire tourner le monde... Et le Roi, il a le grondement du gros chien sur le petit chien.

(on attend un peu avant de reprendre le jeu ; Olivier Dupuy s'installe pour patienter ; Jean-Pierre Vincent lui propose de garder cette posture pour la scène).

Reprise

• Jean-Pierre Vincent : Le Roi trouve un fils ; ça, c'est un contenu central dans la pièce. Tout le monde est soulagé quand le Roi rigole, c'est très bien, le relâchement que vous avez eu, au moment de regarder le nouveau qui arrive.
  Bill (Bernard Freyd) tu dois retrouver le vrai fantasme qu'on avait vu, l'apparition, l'incantation, le fait de l'entendre vraiment, cette voix de Narbonne. Faut pas que ce soit une image littéraire ; ça entretient dans l'idée d'une magie, d'un double monde. Sinon on est dans la mélancolie des feuilles mortes...

Entrée du trône, porté par l'accessoiriste ; moment de joie, commentaires, notamment celui-ci, de Jean-Pierre Vincent : C’est le siège de Georges Duby à l'Académie française.

Reprise

• Jean-Pierre Vincent : C'est un Roi qui devient communiste à la fin de ses jours : <bon, il faut s'occuper des quartiers difficiles>. Il veut laisser dans les mémoires des traces de cela ; c'est le geste d'un noble communiste, ce souci de l'unité nationale
• Bernard Freyd : Le Roi fait une crise, quoi...
• Jean-Pierre Vincent : Voilà, oui, une crise, c'est le mot que je cherchais.
• Laurent Sauvage : C'est moi qui introduis le thème mortuaire, avec l'évocation de l'épitaphe
• Jean-Pierre Vincent : (Chantant sur un air de Carmen) <Ton papa, je le revois, oui je revois son visage> Le regard de Laurent vers la tombe aspire celui du roi.
  Quand le Roi dit : < les plus grands nobles, c'est ceux qui s'humilient>, il faut bien voir que Paroles pense et vit tout le contraire : lui il est dans la fierté, il cherche les photographes. Le Roi a un comportement étrange, presque divinatoire.
  Il faudrait que quelque chose se bouleverse dans le visage de Bertrand quand on lui parle de son père. Les seigneurs sont fixés sur lui, témoins comme nous de ce qui se passe, qui n'arrive à aucun autre moment de l'histoire du théâtre ou de l'humanité.

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