6. Plan

Pour vérifier ces hypothèses, on cherchera d’abord à définir dans une première partie quelle a été la place de l’image dans la didactique des langues pendant ces quarante dernières années. Image pédagogique, image de télévision didactique, image des manuels, des films fixes, des méthodes vidéo et des documents authentiques. Nous verrons quels ont été ses rapports avec le contenu verbal, et finalement constaterons que l’image est, en pédagogie, dans une situation où elle n’est pas reconnue comme média et qu’on ne tire généralement pas profit de ses spécificités. Cette rétrospective nous mènera à la situation actuelle pour l’enseignement/apprentissage des langues qui subit aussi l’influence d’autres disciplines et profite de leurs avancées théoriques - celles de l’enseignement des langues étrangères conçu de plus en plus dans un contexte européen ainsi que du français langue maternelle.

Ensuite, dans une deuxième partie, il sera d’abord montré que l’enseignement des langues avec des médias visuels et audiovisuels repose largement sur des représentations négatives et des préjugés d’ordre culturel. Puis, on s’attachera à montrer en s’appuyant sur des exemples pris dans le corpus comment les spécificités audiovisuelles du message peuvent servir l’enseignement et l’apprentissage de la langue et culture : en quoi les traits sémiotiques du message sont aptes à développer la communication chez l’apprenant. A l’appui des documents télévisuels, une méthodologie sera développée autour de la construction des signes visuels, scripto-visuels et sonores. Les outils d’analyse empruntés à la sémiologie serviront à l’étude des aspects iconiques, proxémiques et kinésiques, filmiques d’une part, et ceux de la linguistique à celle des sources verbales aussi bien sonores qu’écrites. La partie visuelle sera valorisée pour montrer la richesse sémantique de l’image ainsi que sa valeur communicative, tout en mettant en relation le canal visuel avec le canal sonore. Le cadre choisi est ici celui de la situation d’apprentissage présentiel où l’enseignant est donc le médiateur des savoirs et organise la réception des messages.

Après avoir revisité la notion de compétence de communication, une troisième partie traitera de situations d’enseignement/apprentissage avec les médias offrant des alternatives autonomisantes parce qu’elles ont lieu hors du cadre traditionnel de la classe de langue, mais en liaison avec celui-ci. On peut en effet s’attendre à ce que le changement du cadre d’enseignement/apprentissage et la présence de médias modifient le processus d’apprentissage. Nous verrons d’une part comment, à partir d’un corpus vidéo rassemblant les productions orales des apprenants, l’utilisation de l’image animée sous forme d’interviews vidéo peut tendre vers une situation naturelle de communication : notamment parce qu’elle met en oeuvre des processus de médiation de nature technique, linguistique et culturelle et peu pédagogique. D’autre part, le fait de tenir compte de l’apprenant et de la diversité des individus entraîne une diversité des modes d’apprentissage, de plus en plus autonomes, c’est la nouvelle situation vers laquelle tendent les Centres de Ressources. Cela nous amènera à envisager dans quelle mesure les matériaux multimédia, derrière la nouveauté des supports, renouvellent la dimension communicative et la culture d’apprentissage : en effet, les aspects interactionnel et relationnel, avec ou sans l’enseignant, sont au coeur de l’apprentissage autonome. On en déduira ensuite quel type de matériau est le plus apte à la mise en place de la compétence de communication et offre le plus d’interactions avec l’apprenant.

L’apprentissage de la langue avec l’image et les médias repose donc sur les spécificités des outils technologiques qui vont modifier le schéma didactique traditionnel. Les médias sont novateurs par les nouvelles situations d’apprentissage, les nouveaux environnements, réels ou virtuels, qu’ils créent, mais ils sont à insérer dans une méthodologie globale où chaque pole - l’apprenant, l’enseignant et la langue - trouve sa place. L’image animée est une ouverture vers la pluridisciplinarité : l’exploitation de documents télévisuels, vidéos, filmiques et de synthèse est à voir comme représentation du monde, d’une réalité étrangère, celle du réalisateur, de la société confrontée à celle du spectateur/apprenant. C’est dans ce sens que la dimension visuelle peut apporter un renouveau didactique, parce que la perception des images fait appel à d’autres fonctionnements cognitifs, et qu’elle entraîne d’autres approches méthodologiques.