3.3.2.2.2. Deux concepts de base : la multicanalité et l’interactivité

- La multicanalité

La caractéristique du multimédia est de réunir des médias qui étaient auparavant indépendants, la technologie informatique permettant l’intégration de divers supports techniques dans un seul outil, l’ordinateur. D’où déjà l’appellation par certains de “monomédia”. L’une des spécificités du support multimédia est d’utiliser plusieurs canaux de transmission (multicanalité) qui renvoient aux trois composantes du message : visuelle (et iconique), textuelle et sonore. Le canal visuel transmet des images fixes ou animées empruntées à la photo, à la vidéo ou à l’animation, mais aussi de l’écrit sous forme de textes, de tableaux, et le canal sonore produit du son On ou Off (voix, bruitages, musique). Divers supports sont apparus dans l’enseignement des langues depuis le vidéodisque qui a apporté la souplesse d’utilisation qui manquait à l’audiovisuel, le CD-Rom qui a permis d’augmenter la qualité et la capacité de stockage des images fixes et vidéo, jusqu’au DVD-Rom qui pourra enregistrer553. D’un point de vue didactique, la richesse de la multicanalité est à voir dans l’intégration des canaux de transmission qui, comme le fait remarquer Henri Portine, utilisent deux types de communication : la communication écrite et la communication orale. Ils relèvent habituellement de deux méthodologies différentes, celle centrée sur la compréhension-production de l’écrit ou celle centrée sur la compréhension-production de l’oral. Or le multimédia intègre l’une et l’autre :“le triplet <son, texte, image> permet donc de traiter, séparément ou en les imbriquant, communication orale et communication écrite.”554

Au niveau de la perception, la multiplicité des composants du message offre à l’apprenant une quantité d’indices faisant appel à l’ensemble de ses facultés. Portine parle “d’intégration mentale” : “‘l’apprenant prélève des traits pertinents (sur la chaîne sonore, dans le mouvement, et dans le fond situationnel) et les compose en une signification’.”555 Encore faut-il attirer l’attention de l’apprenant sur les signes porteurs de didacticité et de signification, cela rejoint la démarche abordée avec les signes du message télévisuel dans la deuxième partie de ce travail. L’analyse de méthodes de langue sur CD-Rom nous a permis de constater que les différents modes de présentation sont enrichissants pour l’apprentissage, mais qu’ils posent la question de l’intégration de la dimension d’apprentissage. En effet, la méthodologie mise en place peut être qualifiée d’implicite : l’interface est très peu utilisé pour guider l’apprenant, pour l’aider à apprendre. Face à la complexité réelle de l’écran, les liens entre les différentes sources d’information ne sont pas explicites ; l’apprenant, surtout débutant, est amené à suivre un schéma pré-construit qui rappelle étrangement celui des méthodes audiovisuelles : consignes données par la méthode, “input” apportée par la séquence authentique et questions/réponses de l’apprenant.

Notes
553.

Alors que sur le vidéodisque seul le son était numérique, les images restaient analogiques, le cédérom est entièrement numérique. Il peut contenir jusqu’à dix heures de son, 75 min d’images vidéo, un millier d’images fixes et deux cent mille pages de texte. Le DVD-Rom sera une version plus puissante qui contiendra 7 à dix fois plus d’informations.

554.

Henri Portine, “Le multimédia dans la méthodologie de la didactique des langues”, in Outils multimédias et stratégies d’apprentissage du FLE, Cahiers de la Maison de la Recherche, Lille III, 1996, p. 54.

555.

ibidem, p. 56.