3.4.3. Communication instrumentalisée et interaction

Les matériels multimédia utilisés pour l’apprentissage sont en majorité des CD-Rom didactisés. Ils ont pour caractéristique d’être destinés à l’apprentissage de type plutôt autonome que présentiel, et ils s’adressent donc à l’utilisateur apprenant. Parmi les CD-Rom de langue - nous avons classé les méthodes dans le premier groupe de matériels pédagogiques -, certains intègrent la dimension communicationnelle à l’apprentissage, et sont aptes à développer de l’interactivité. Leur utilisation diffère en premier lieu des autres types de support dans la mesure où elle est basée sur une communication nécessitant l’intervention technique et cognitive de l’apprenant, de type stimulus-réponse-réaction. En deuxième lieu, par le fait que l’enseignant est absent de la réception, dans le sens où il n’est pas destinataire du message, c’est l’apprenant seul ou en binôme qui est concerné.

En effet, le message est porteur de signes de deux niveaux cognitifs différents : les signes linguistiques et culturels qui sont destinés à l’apprentissage à proprement parler, et les signes de type textuel (iconique et/ou linguistique) qui relèvent du métalangage destinés à l’utilisateur. D’une manière générale, pour qu’il y ait une demande d’interaction, il faut que l’interactivité, au sens où elle a été définie au début de cette partie en 3.1., ait été développée à la conception du matériel. Pour que le matériel multimédia développe une compétence de communication, il doit prendre en compte l’interactivité fonctionnelle entre l’apprenant et le programme, mais aussi proposer et gérer des interactions entre le contenu et l’apprenant. Comme l’a souligné François Mangenot⁵⁸³ à propos des simulations, l’ordinateur est à la fois récepteur et émetteur : récepteur des productions de l’apprenant, mais émetteur au moment de la mise oeuvre de la simulation. Plus la machine prendra en compte la diversité des réponses, plus les possibilités de rétroaction de l’apprenant sur le programme seront grandes, et plus le parcours d’apprentissage sera individualisé et autonomisant. On remarque cependant que le type de communication développée ici est d’une autre nature, elle est instrumentalisée (c’est ce qui a été vu en 3.3.2.2.).

Pour compenser cet aspect, deux situations d’apprentissage sont aptes à créer une communication de nature interpersonnelle, ce qui paraît indispensable pour l’apprentissage d’une langue. D’une part, l’utilisation en tandem permet à l’ordinateur de servir de vecteur de communication, il est tantôt canal, tantôt émetteur ou récepteur : “‘il multiplie les interactions en jouant un rôle de relais par rapport aux tâches à accomplir’”.⁵⁸⁴ Les apprenants engagés dans des activités sont à la fois émetteurs et récepteurs. Ces interactions générées par le média développent une communication interpersonnelle dans la mesure où elles sont menées dans la langue cible, ce qui n’est pas toujours facile à obtenir des apprenants. D’autre part, l’ordinateur sera propre à développer des interactions lorsqu’il est intégré dans le programme d’apprentissage ; c’est-à-dire que son usage implique un retour dans la classe de langue. L’enseignant (émetteur principal) organise alors l’apprentissage à partir de la communication médiatée et dirige la communication didactique à propos du travail effectué avec le média.

En fonction de la situation d’apprentissage, on distinguera donc deux niveaux d’interactions : dans le cas d’un apprentissage autonome, l’usage du matériel multimédia se fait sans la présence de médiateur, c’est la relation apprenant-machine ; la communication est uniquement instrumentalisée, les interactions personnelles étant rares. Dans le cas d’un usage où le multimédia est intégré au cursus d’apprentissage, les interactions personnelles auront une place au moins aussi importante que les interactions médiatées⁵⁸⁵.