Un dernier type de matériel comprend les productions vidéo réalisées par les apprenants en situation d’apprentissage/acquisition face à des locuteurs natifs. A la différence des situations qui viennent d’être évoquées, où le matériel médiatique est le vecteur premier de la communication, ce sont ici les personnes qui sont au centre de la communication. Comme cela a été décrit dans le chapitre 3.2., il y a une dialectique entre les processus didactique et médiatique, une alternance permanente entre les deux démarches : au niveau des lieux d’apprentissage (institutionnel et milieu naturel), des acteurs (sujet-apprenant et interviewer), de l’enseignant (conseiller et évaluateur), de la langue utilisée (langue de communication et métalangage). Les interactions développées relèvent de deux types de communication : dans la phase 1 d’enregistrement, il s’agit de communication en face à face. Dans la phase 2 de visionnement, un deuxième niveau d’interactions peut être qualifié de métacommunicatif ; ce sont les interactions entre les apprenants et l’enseignant à propos de leurs interactions filmées. C’est dans la double perspective d’interactivité et de réflexivité dont parle Marie-Thérèse Vasseur586 que se rejoignent les activités langagières : on s’approche à la fois d’un usage authentique comme langue de communication et d’un usage réflexif à propos du processus d’apprentissage.
On constate que la communication est ici essentiellement de type interpersonnel, parce que le média vidéo n’est qu’un intermédiaire entre les partenaires de l’acte communicatif. Elle est également un moyen de conserver la communication pour permettre le retour dans le cadre didactique. Quant à l’apprenant, il est doublement impliqué dans la communication. En effet, l’apprenant est au centre de la communication interpersonnelle (lors de la réalisation de l’interview vidéo) : il est émetteur-récepteur dans l’interaction avec le natif. Il est, à un deuxième niveau, acteur et interprétant de l’interaction médiatée (E2). Par la réflexivité de la situation de visionnement, il est, avec l’enseignant, récepteur (R2) du message. A la différence de l’émission de télévision où instance d’émission et de réception cherchent à ajuster et à partager leurs savoirs, il y a identification partielle entre le locuteur et le récepteur du message, ce qui est à voir comme une situation favorable à l’implication de l’apprenant. On en conclut que la motivation et le plaisir des apprenants sont stimulés, que cette situation sera riche en interactions authentiques.
Marie-Thérèse Vasseur, “Dialogues, soliloques et projet d’apprenant chez une étudiante avancée”, Langages 134, pp.85-100.